Le
Premier ministre a pris pour habitude, depuis quelques années, de
s’exprimer en faveur de la thèse proclamée depuis toujours par le CRIF (1) : « l’antisionisme, c’est de l’antisémitisme ». Le
Premier ministre, s’est ainsi manifesté le 18 janvier 2016, dans une
soirée organisée par les «Amis du CRIF » et à nouveau le 7 mars au «
célèbre » dîner annuel du CRIF, où le Tout-Paris, se fait une obligation
de participer - sauf les communistes.
Le Premier ministre VALLS a déclaré le 18 janvier : «
Nous ne devons pas avoir peur de dénoncer des actes antisémites, dès
que nous avons la certitude d’être face à de tels actes ». Je ne peux que l’approuver, il a cent fois raison. Il a ajouté : « La société a eu peur, ce qui explique une forme d’impunité ».
Lui, a-t-il peur - ou est-il complice - de reconnaître l’impunité
accordée, depuis 1967 aux dirigeants israéliens par les dirigeants
occidentaux?
Le Premier ministre, le même jour, a « déploré
que les critiques de la politique d’Israël se soient transformées en un
antisionisme dissimulant presque systématiquement de l’antisémitisme ». Selon lui, «
de nombreuses organisations participent à ce climat nauséabond, à
commencer par la campagne internationale de boycott d’Israël, BDS ».
Stigmatisant la manifestation, le 5 janvier, devant l’Opéra de Paris,
de militants pro palestiniens protestant contre un ballet de la
compagnie israélienne «Bar Sheva », il a fait valoir son
engagement de longue date (?) contre le boycott d’Israël et a affiché sa
volonté de combattre ce genre de manifestation « négation du rôle même
de la culture ». Il a finalement affirmé : « Les pouvoirs publics doivent changer d’attitude (…). Ça suffit, on ne peut pas tout admettre dans ce pays ».
Le
Premier ministre a « oublié » de dire qu’il n’avait pas protesté contre
les pressions exercées par l’ambassade d’Israël sur la Galerie
d’Artcurial, à la même époque, pour faire retirer de la vente, une photo
du grand résistant palestinien Marwan Barghouti.
Le Premier
ministre peut-il nous expliquer pourquoi cette sempiternelle politique
de « deux poids deux mesures » pour tout ce qui touche à Israël ?
Le Premier ministre en a redoublé ses affirmations au dîner du CRIF, le 7 mars : « Nous savons qu’il y a un antisémitisme ancien et un antisémitisme nouveau. (...) Et puis (…) il y a l’antisionisme, c’est-à-dire tout simplement le synonyme de l’antisémitisme et de la haine d’Israël ».
Le
Premier ministre a, certes, le devoir de défendre la politique de son
gouvernement. Il peut aussi, comme citoyen, exprimer ses propres idées
comme tout un chacun : « Par ma femme, a-t-il déclaré à la Radio Judeïca en 2011, je suis lié de manière éternelle à la communauté juive et à Israël ».
C’est son droit. Il ne peut pour autant, lui, le représentant de tous
les Français, après le Président de la République, criminaliser, de
facto, certains qui ne font qu’user de leur liberté d’expression en
critiquant la politique des dirigeants israéliens qui perpétuent
l’occupation de la Palestine, et qui, il doit le savoir, « rejettent complètement l’établissement d’un État palestinien à l’ouest du Jourdain ». (Charte du Likoud)
Le
Premier ministre, en stigmatisant ainsi dans une soirée organisée par
une association, le CRIF, qui prétend représenter tous les Juifs de
France – ce qui est inexact -, mais, en revanche, qui représente la
politique la plus réactionnaire des dirigeants au pouvoir en Israël, a
blessé profondément des milliers de militants, y compris juifs, qui,
depuis toujours, luttent, dans notre pays, pour la reconnaissance des
droits du peuple palestinien occupé. J’ai pour ma part commencé ce
combat, dès juin 1967, avec le GRAPP - où participaient les Jacques
Berque, Claude Cahen, Albert-Paul Lentin, Théodore Monod, André Philip,
Robert Buron, Pierre Cot, Maxime Rodinson, Denise Barrat, Régis
Blachère, Henryane de Chaponay, Georges et Fanny Scapira.… Il avait
alors cinq ans M. Manuel Valls !
Le Premier ministre a-t-il «
oublié » que plus de 4 millions de nos compatriotes ont manifesté dans
la rue, le 11 janvier 2015, au nom de la « liberté d’expression », au
lendemain des lâches et criminels attentats djihadistes contre la
rédaction du journal Charlie Hebdo, contre des policiers et contre des
clients de l’Hyper Cacher à la Porte de Vincennes ?
Le Premier ministre a-t-il « oublié » ses dires lorsqu’il était simplement Maire d’Evry ? A la Mutualité le 20 novembre 2002 :
« Il faut qu’Israël respecte les résolutions de l’ONU. Pour cela le
rapport des forces est indispensable et donc il faut ramener les
parlements et les gouvernements à suspendre l’accord d’Association
U.E.-Israël, ce qui aurait effectivement un écho énorme en Israël et en
Palestine ». (Haine d’Israël ? Antisémitisme ?). Et encore, en
2006, lors du jumelage de l’association Evry Palestine avec le camp
martyrisé de Khan Younis à Gaza, en présence de Leïla Shahid : « On
veut détruire les infrastructures, la mémoire, le futur de ce peuple.
Cela est inacceptable et nécessite la mobilisation de toute la
communauté internationale». (Haine d’Israël ? Antisémitisme ?).
Et ce voyage en Palestine occupée où vous étiez à mes côtés dans le car ?
Le
Premier ministre devrait avoir en tête la claire réponse du Président
de la République, François Mitterrand, au CRIF, qui entendait s’opposer à
la venue du président Yasser Arafat en France, en 1989 : « La politique française ne se fait pas à la Knesset»!
(1) CRIF : Conseil Représentatif des Institutions Juives de France
Par Me Maurice Buttin
Courrier du C.V.P.R – mars 2016*
*Le Courrier du CVPR est le bulletin du Comité de Vigilance pour une Paix Réelle au Proche-Orient (CVPR PO) que préside Maître Maurice Buttin.
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