"Dès lors qu'on avait arrêté quelqu'un, il fallait qu'il soit
coupable. Quand une bombe avait éclaté, si on attrapait un type et qu'on
trouvait qu'il avait la tête du client, on ne s'en embarrassait pas
plus", témoignage de Jean-Claude Périer, membre du Conseil Supérieur de
la Magistrature (CSM) en 1956.
« Avis défavorable au recours » ou encore « Recours à rejeter » : ces deux
formules tracées à l'encre bleue ont la préférence de François
Mitterrand quand, garde des Sceaux, il décide de donner un avis au recours en grâce des condamnés à mort du FLN dont les
dossiers lui sont soumis. René Coty, président de la République - et
décideur ultime -, préfère barrer d'un long trait noir la première page
du formulaire administratif et indiquer sur l'autre, d'une écriture
ronde d'enfant, qu'il laissera « la justice suivre son cours ». Des
expressions qui reviennent tout au long des dossiers de condamnés à mort
exécutés durant la guerre d'Algérie. Sinistres périodes, sans parler des "enfumages", sorte de gazage à bas coût des civils "musulmans", ou des oreilles coupées, car il est plus facile de transporter des tonneaux d'oreilles afin de décompter les morts, que de transporter les cadavres ou les têtes. Elle était belle la civilisation apportée par la France aux Algériens, à l'image de qu'apportent, en ce moment, les Occidentaux aux Irakiens, aux Syriens et aux Yéménites.
De façon générale, sous la IVe
République, 142 Algériens sont guillotinés. Les 80 autres subiront le
même sort après le retour du général de Gaulle au pouvoir, en juin 1958.
Ces exécutions arbitraires commencent un certain 19 juin 1956. Les
premières victimes sont Abdelkader Ferradj Ben Moussa et Ahmed Zabana
(inscrit Ahmed Zahana dans le dossier du CSM).
Bien que ce dernier soit connu des services de police pour son engagement politique au sein du PPA-MTLD (parti du peuple algérien - Mouvement pour le Triomphe des Libertés Démocratiques), le premier est un inconnu des services jusqu'à ce qu'il soit arrêté pour la mise à feu d'une maison des colons, le 7 mars 1956.
Bien que ce dernier soit connu des services de police pour son engagement politique au sein du PPA-MTLD (parti du peuple algérien - Mouvement pour le Triomphe des Libertés Démocratiques), le premier est un inconnu des services jusqu'à ce qu'il soit arrêté pour la mise à feu d'une maison des colons, le 7 mars 1956.
Quant à Ahmed Zabana,
grièvement blessé au moment de son arrestation, il lui a été reproché sa
participation à l'attaque d'une maison forestière, le 4 novembre 1954.
De
plus, l'engagement révolutionnaire de Ferradj, selon plusieurs
témoignages, est sujet à caution. "Pour son supérieur, le capitaine
Martini, Ferradj donnait satisfaction et rien ne laissait prévoir qu'il
était en liaison avec des hors-la-loi. Les autorités de son village, en
revanche, estiment qu'il est anti-français, de mauvaise tenue et aime
semer le désordre et la panique", écrivent François Mayle et Benjamin
Stora, dans François Mitterrand et la guerre d'Algérie.
Cela
dit, au bénéfice du doute et compte tenu de l'état de santé de Zabana
-monseigneur Duval parle de l'exécution d'un infirme-, la condamnation à
mort est antinomique avec les principes républicains voire avec
l'esprit de l'État de droit. Or, pour la France, l'année 1956 est
l'année où la République vacille sous les coups d'estocades des ultras.
"Une justice soumise à une terrible pression des européens d'Algérie,
des militaires, des tribunaux d'exception installés à la suite de la
promulgation des décrets d'application des pouvoirs spéciaux, mais une
justice qui a décidé d'entrer en guerre à son tour. Et son arme, c'est
la guillotine", écrivent-ils.
Dans ce cas, le débat au sein du CSM
est biaisé par le chantage permanent du lobby colonial pour que le
gouvernement frappe très fort. Bien que le CSM soit collégial, deux
personnages importants -François Mitterrand, ministre de la Justice et
René Coty, président de la République- veillent à ce que les décisions
ne déstabilisent pas la République. Selon les deux historiens, "sur
quarante-cinq dossiers d'exécutés lors de son passage place Vendôme,
François Mitterrand ne donne que huit avis favorables à la grâce (...)
On peut le dire autrement: dans 80% des cas connus, il a voté la mort".
Et
tout ça, pour ne pas avoir à dos les ultras qui ont, pour rappel,
humilié le président du Conseil quatre mois plus tôt à Alger.
Pour
conclure, il va de soi que les premières exécutions, le 19 juin 1956,
représentent un clin d'œil aux ultras. Ainsi, malgré les engagements
électoraux de Guy Mollet en faveur de la paix en Algérie, à son arrivée
au pouvoir, il change littéralement de cap. En fait, tout commence lors
de la journée des tomates, le 6 février 1956, quand le président du
Conseil s'illustre par son recul face au chantage des ultras.
Dans
la foulée, les choses vont s'accélérer à travers le vote des pouvoirs
spéciaux en mars 1956, les exécutions en juin 1956 et enfin le rapt
aérien de la délégation extérieure du FLN en octobre de la même année.
Pour
ces raisons, on peut dire que Guy Mollet n'a pas respecté le mandat que
les métropolitains lui ont confié. Mais, sous la IVe République, un
président de Conseil peut-il se mesurer à la coalition ultras-militaires
de carrière? En tout cas, à chaque fois que l'un d'eux suggère une voie
libérale, sa chute survient aussitôt. Du coup, toutes les mesures
tendant à rassurer les ultras sont de nature à prolonger la durée de vie
de leurs gouvernements.
Histoire de la guillotine en Algérie
C’est donc un certain Abdelkader ben Zelouf Ben dahman reconnu coupable de différents assassinats et de vols qui a été le premier Algérien exécuté Place Bab El-Oued à Alger 16 février 1843.
Depuis lors, la guillotine fut utilisée à de nombreuses reprises.
Même les combattants de la liberté et de l’indépendance Algérienne furent exécutés de la sorte, car considérés comme des délinquants et des criminels de droit commun, la France refusant de reconnaître qu’elle était en guerre. Le 17 mars 1956, sont publiées les lois 56-268 et 56-269 qui permettent aux tribunaux militaires d’appliquer - sans instruction préalable - la peine de mort aux combattants algériens pris les armes à la main.
C’est ainsi que le 19 juin 1956, Ahmed Zahana, condamné à mort à la suite de l'assassinat dans la nuit du 31 octobre au1er novembre 1954 du garde forestier François Braun, est guillotiné dans la prison de Barberousse, et ce malgré l’intervention de l’archevêque d’Alger, Mgr Duval.
Ahmed Zabana adressa une lettre à sa famille :
« Je vous écris sans savoir si cette lettre sera la dernière et cela, Dieu seul le sait. Si je subis un malheur quel qu’il soit, ne désespérez pas de la miséricorde de Dieu car la mort pour la cause de Dieu est une vie qui n’a pas de fin, et la mort pour la patrie n’est qu’un devoir […] Ne me pleurez pas et soyez fiers de moi ». « tahia el-Djazaïr ».
Le même jour fut guillotiné Abdelkader Ferradj, membre du commando Ali Khodja.
Le 25 juillet 1957 Badèche Benhamdi, âgé de 27 ans, accusé d’avoir tué le maire de Boufarik et président de la Fédération des maires d’Algérie, Amédée Forger, le 28 décembre 1956, au 108 rue Didouche Mourad (ex Michelet) fut exécuté.
Il fut arrêté dans la nuit du 25 février 1957 par les Bérets verts du 1er Régiment des étrangers parachutistes (1er REP). Après un passage à la Villa Susini, il fut écroué à la prison de Serkadji. Le 11 avril 1957, il fut jugé et condamné à mort. Il fut défendu par ma consœur Gisèle Halimi.
Abderrahmane Taleb a été guillotiné le 24 avril 1958 à la prison de Barberousse. Il était considéré comme le «chimiste» de la bataille d'Alger de 1957.
Le 11 février 1957, Fernand Iveton, membre du Parti communiste algérien, a été guillotiné, avec deux autres militants algériens, Mohamed Lakhnèche et Mohamed Ouenouri.
Aux côtés de ces exécutions politiques, celles de droit commun étaient aussi importantes. Une seule femme a été guillotinée en Algérie. C’est le 10 avril 1948, à Sidi Bel Abbes que Madeleine Mouton, reconnue coupable de l’empoisonnement de 11 personnes a été exécutée.
Le 12 août 1959 a eu lieu la dernière exécution par guillotine d’un condamné à mort.
Il s’agissait de Ouïs Mostifa ould habib, condamné pour viols et meurtres.
Source: http://www.blogavocat.fr/space/chems-eddine.hafiz/content/histoire-de-la-guillotine-en-alg%C3%A9rie_