vendredi 7 mai 2021

Dépeuplement: Karl Marx et le devenir mongol de la globalisation par Nicolas Bonnal

Devenues folles et incontestées par les cerveaux qu’elles contrôlent, les élites rêvent de nature vierge et de dépeuplement en se servant du prétexte écologique. Ce n’est pas la première fois. Guillaume le conquérant (inspirateur du Doomsday book qui sonna l’heure du Reset et de la confiscation pour les braves paysans de l’Angleterre traditionnelle, voyez Robin des bois…) anéantit des dizaines de villages pour établir ses chasses. Les mongols rêvaient eux de créer un désert chinois (Grousset) et parlaient des populations à exterminer comme d’insectes. Et les nobles écossais ou spéculateurs londoniens chassèrent des dizaines de milliers de Gaëls de leurs Highlands pour créer ces réserves de chasse qui font rêver les plus riches et les ex-touristes trop romantiques.

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De même la Patagonie et les grands territoires britanniques volés (Canada, Australie, Nouvelle-Zélande) vont, d’ici peu, être encore plus vides qu’à l’accoutumée. C’est Hitler qui parle du devoir de dépeupler dans un livre célèbre et ce ne sont pas nos champions allemands, suisses (Ursula, Klaus, leur montagne magique) ou américains (Hitler donne dans Mein Kampf en exemple l’eugénisme US pratiqué par la dynastie Gates) qui iront le contredire.

Mais voyons comment Marx en parle, du dépeuplement. Car quand les élites ne sont plus contestées, voilà comment ça se passe, qu’elles soient bourgeoises ou féodales (on assiste aujourd’hui à une fusion des deux, voyez mes livres sur la Patagonie et sur Internet – les techno-lords)

Dans son magnifique et inépuisable développement sur les secrets de l’accumulation primitive Marx décrit l’expropriation de la population campagnarde dans la romantique Écosse :

« George Ensor dit dans un livre publié en 1818 : les grands d'Écosse ont exproprié des familles comme ils feraient sarcler de mauvaises herbes; ils ont traité des villages et leurs habitants comme les Indiens ivres de vengeance traitent les bêtes féroces et leurs tanières. Un homme est vendu pour une toison de brebis, pour un gigot de mouton et pour moins encore... Lors de l'invasion de la Chine septentrionale, le grand conseil des Mongols discuta s'il ne fallait pas extirper du pays tous les habitants et le convertir en un vaste pâturage. Nombre de landlords écossais ont mis ce dessein à exécution dans leur propre pays, contre leurs propres compatriotes. »

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Puis Marx évoque une duchesse de Sutherland, homonyme de l’infect Peter Sutherland, commissaire européen, Goldman Sachs et Bilderbergs. Ce diable d’homme fut élevé par les jésuites.

Marx donc :

« Mais à tout seigneur tout honneur. L'initiative la plus mongolique revient à la duchesse de Sutherland. Cette femme, dressée de bonne main, avait à peine pris les rênes de l'administration qu'elle résolut d'avoir recours aux grands moyens et de convertir en pâturage tout le comté, dont la population, grâce à des expériences analogues, mais faites sur une plus petite échelle, se trouvait déjà réduite au chiffre de quinze mille.

De 1814 à 1820, ces quinze mille individus, formant environ trois mille familles, furent systématiquement expulsés. Leurs villages furent détruits et brûlés, leurs champs convertis en pâturages. Des soldats anglais, commandés pour prêter main-forte, en vinrent aux prises avec les indigènes. Une vieille femme qui refusait d'abandonner sa hutte périt dans les flammes. C'est ainsi que la noble dame accapara 794.000 acres de terres qui appartenaient au clan de temps immémorial. »

Une fois qu’on a vidé (c’est le cas de le dire, dans la discothèque mondiale) tout le monde, une métamorphose a lieu :

« Enfin une dernière métamorphose s'accomplit. Une portion des terres converties en pâturages va être reconvertie en réserves de chasse.
On sait que l'Angleterre n'a plus de forêts sérieuses. Le gibier élevé dans les parcs des grands n'est qu'une sorte de bétail domestique et constitutionnel, gras comme les aldermen de Londres. L'Écosse est donc forcément le dernier asile de la noble passion de la chasse. »

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Grâce à la chasse pratiquée par nos grands monarques (Juan Carlos, le prince Philip, le Bernard des Pays-Bas, qui créa les monstrueux Bilderbergs…), on crée des espaces vierges :

« La conversion de leurs champs en pâturages... a chassé les Gaëls vers des terres moins fertiles; maintenant que le gibier fauve commence à remplacer le mouton, leur misère devient plus écrasante... Ce genre de forêts improvisées et le peuple ne peuvent point exister côte à côte; il faut que l'un des deux cède la place à l'autre. Qu'on laisse croître le chiffre et l'étendue des réserves de chasse dans le prochain quart de siècle comme cela s'est fait dans le dernier, et l'on ne trouvera plus un seul Gaël sur sa terre natale. D'un côté cette dévastation artificielle des Highlands est une affaire de mode qui flatte l'orgueil aristocratique des landlords et leur passion pour la chasse, mais de l’autre, ils se livrent au commerce du gibier dans un but exclusivement mercantile. Il n'y a pas de doute que souvent un espace de pays montagneux rapporte bien moins comme pacage que comme réserve de chasse... »

En plein dix-neuvième, rappelle Marx, on retrouve la pire barbarie féodale :

«  L'amateur à la recherche d'une chasse ne met, en général, d'autre limite à ses offres que la longueur de sa bourse1080... Les Highlands ont subi des souffrances tout aussi cruelles que celles dont la politique des rois normands a frappé l'Angleterre. Les bêtes fauves ont eu le champ de plus en plus libre, tandis que les hommes ont été refoulés dans un cercle de plus en plus étroit... Le peuple s'est vu ravir toutes ses libertés l'une après l'autre... Aux yeux des landlords, c'est un principe fixe, une nécessité agronomique que de purger le sol de ses indigènes, comme l'on extirpe arbres et broussailles dans les contrées sauvages de l'Amérique ou de l'Australie, et l'opération va son train tout tranquillement et régulièrement. »

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Purger le sol des indigènes, cela ne vous rappelle rien ?

Marx cite ensuite un auteur oublié :

« Vingt ans après, cet état de choses avait bien empiré, comme le constate entre autres le professeur Leone Levi dans un discours, prononcé en avril 1866, devant la Société des Arts. « Dépeupler le pays, dit-il, et convertir les terres arables en pacages, c'était en premier lieu le moyen le plus commode d'avoir des revenus sans avoir de frais... Bientôt la substitution des deer forests aux pacages devint un événement ordinaire dans les Highlands. »

Le mouton chasse l’homme, puis le daim (j’allais dire le vaccin !) le mouton.

« Le daim en chassa le mouton comme le mouton en avait jadis chassé l'homme... En partant des domaines du comte de Dalhousie dans le Foriarshire, on peut monter jusqu'à ceux de John O'Groats sans jamais quitter les prétendues forêts. Le renard, le chat sauvage, la martre, le putois, la fouine, la belette et le lièvre des Alpes s'y sont naturalisée il y a longtemps; le lapin ordinaire, l'écureuil et le rat en ont récemment trouvé le chemin.

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D'énormes districts, qui figuraient dans la statistique de l'Ecosse comme des prairies d'une fertilité et d'une étendue exceptionnelles, sont maintenant rigoureusement exclus de toute sorte de culture et d'amélioration et consacrés aux plaisirs d'une poignée de chasseurs, et cela ne dure que quelques mois de l'année. »

Une belle phrase de Marx :

« Les instincts féodaux se donnent libre carrière aujourd’hui comme au temps où le conquérant normand détruisait trente-six villages pour créer la Forêt Nouvelle (New Forest)... »

En Patagonie une dizaine d’estancias appartenant aux Soros, Benetton, Lewis, Turner, etc. couvrent un territoire composé marginalement de villes surpeuplées, mal équipées et confinées. Ici les indiens furent exterminés comme au nord du continent par privation de viande (phoques et éléphants de mer). Les survivants furent éliminés, leurs oreilles coupées et sélectionnées à Londres.[1]

Marx conclut – et cette conclusion vaut une méditation :

« La spoliation des biens d'église, l'aliénation frauduleuse des domaines de l'État, le pillage des terrains communaux, la transformation usurpatrice et terroriste de la propriété féodale ou même patriarcale en propriété moderne privée, la guerre aux chaumières, voilà les procédés idylliques de l'accumulation primitive. Ils ont conquis la terre à l'agriculture capitaliste, incorporé le sol au capital et livré à l'industrie des villes les bras dociles d'un prolétariat sans feu ni lieu. »

Retenez bien ce groupe nominal, lecteur, car que vous veniez d’Afrique, d’Asie, de France ou de Navarre, il explique notre inertie actuelle de prolétarisés : « les bras dociles d'un prolétariat sans feu ni lieu. »

Ce serait le temps de rappeler mes textes sur Ibn Khaldoun qui explique comment le rat des villes se laisse aisément circonvenir et soumettre par une autorité supérieure. Et on rappellera que même ces grands pays anglo-saxons ont une population urbaine docile et très concentrée. Dans l’énorme Australie, 80% de la population vit…dans cinq villes. Pour le reste la désindustrialisation rapide et imposée a créé une population servile (de services) peu encline à la contestation ; et comme la techno-addiction remplacé l’agonisante religion comme opium du peuple…

Sources & lectures complémentaires:

http://www.dedefensa.org/article/ibn-khaldun-et-le-modele...

https://www.dedefensa.org/article/sir-john-glubb-et-la-de...

http://classiques.uqac.ca/classiques/Marx_karl/capital/ca...

https://www.amazon.fr/INTERNET-SECRETS-MONDIALISATION-Nic...

https://www.amazon.fr/BATAILLE-CHAMPS-PATAGONIQUES-Roman-...

NOTES de H. Genséric

[1] FRANCE : des primes pour "décapitations d'indigènes"

« … Un plein baril d’oreilles… Les oreilles indigènes valurent longtemps dix francs la paire et leurs femmes, demeurèrent comme eux d’ailleurs, un gibier parfait » (1). C’est en ces termes choisis qu’un général français racontait les exploits de ses troupes pendant la guerre de conquête de l’Algérie (2).
 «… Tout ce qui vivait fut voué à la mort… On ne fit aucune distinction d’âge, ni de sexe… En revenant de cette funeste expédition plusieurs de nos cavaliers portaient des têtes au bout de leurs lances… ».

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Photos souvenirs d'Algérie (Armée française)

ANNEXE : colonisation de l'Algérie

La mainmise coloniale progressive sur la terre algérienne s’est faite par la force des armes à la cadence de la célèbre devise du maréchal Bugeaud ense et aratro, et par l’expropriation administrative des Algériens de leurs terres, sous les coups de lois visant la déstructuration de l’ordre économique traditionnel, comme la loi Warnier. La restructuration de l’économie agraire selon le modèle capitaliste, que les Algériens ne connaissaient pas, permet aux colons de s’approprier ces biens fonciers en usant de leur citoyenneté française face aux indigènes, simples sujets de la France et, pratiquement sans droits. Séquestre, confiscation, usure, spoliation, pressions juridiques et administratives sont exercées sur les paysans algériens par la force de réglementations abusives, les contraignant à céder leurs terres.

La déstabilisation économique de la société algérienne l’a extrêmement fragilisée. Les tentatives d’extermination entreprises par les armes, et qui ont échoué, se poursuivront par la faim et la maladie. Car, selon Castille, H. « L’idée de l’extermination eut longtemps cours en Afrique du Nord ».
De Maupassant, G. abonde dans le même sens : « 
Notre système de colonisation consiste à ruiner l’Arabe, à le dépouiller sans repos, à le poursuivre sans merci et à le faire crever de misère ».

Face aux épidémies qui existaient déjà ou qui, comme dans le cas amérindien, ont fait leur apparition au contact des populations européennes, les Algériens étaient dépourvus de toute protection. Les explications fournies par Abid, L. pour le choléra ou Chaulet, P., par exemple, et le bilan démographique désastreux sont édifiants à ce sujet. Liauzu, C. constate, quant à lui, que : « La population algérienne a diminué du tiers entre 1830 et 1870 sous le poids de la guerre, des spoliations, des famines et épidémies. Et certains ont annoncé, voire souhaité, sa disparition ». C’est durant cette période que la population algérienne a inauguré sa régression forcée vers le dénuement, l’ignorance, la maladie et la surmortalité endémique. La première hécatombe qui s’apparente à un génocide intervient en 1868 : « La France s’est émue en 1868. Si 300.000 d’entre eux ont succombé, ceux qui survivent sont dans un état de dénuement. (…) Peut-être même, n’avait-on jamais vu sous la domination turque misère pareille à celle qui s’est produit dans l’hiver de 1868 ».

Comme le constatent Courbage, Y. et Fargues, Ph., la mortalité des Algériens « atteignait un niveau digne d’un sombre Moyen Age : plus de 50 % jusqu’en 1855. La natalité, malgré une élévation entre 1830 et 1851, ne suffisait pas à assurer la relève. La croissance naturelle est systématiquement négative (jusqu’à moins 13 % entre 1830 et 1856) ».

En dix années d’occupation coloniale, alors que la population scolarisable était sensée augmenter, les effectifs des élèves du secondaire et supérieur ont été réduits à plus de 90 %, et les écoles de ce niveau quasiment anéanties. La fermeture, au deux tiers, des écoles primaires s’est traduites par une réduction des effectifs scolaires aux trois quarts alors que la natalité était plutôt ascendante.

Après un siècle et demi presque, le constat de Frantz Fanon et Jean Paul Sartre confirme, on ne peut plus clairement, le résultat dévastateur d’une telle politique.

En préface de l’œuvre de Fanon, F., Les Damnés de la terre, un classique sur la « décérébration » des Algériens par la colonisation, Sartre, J.-P., qui avait refusé le prix Nobel en geste de solidarité avec la lutte des Algériens pour leur indépendance, écrivait : « La violence coloniale ne se donne pas seulement le but de tenir en respect ces hommes asservis, elle cherche à les déshumaniser. Rien ne sera ménagé pour liquider leurs traditions, pour substituer nos langues aux leurs, pour détruire leur culture sans leur donner la nôtre ; on les abrutira de fatigue ».

De même qu’en 1830, des décideurs politiques français colonialistes avaient justifié, à priori, l’expédition coloniale française en Algérie par des représailles pour laver l’affront du coup de l’éventail, vieux d’une douzaine d’années si tant est qu’il advint, de même aujourd’hui, des décideurs politiques français nostalgériques essaient de justifier, à postériori, cette même expédition par les « aspects positifs » qu’elle aurait légués à l’Afrique du nord.

Par Mohammed Kouidri

 

 

 


4 commentaires:

  1. Deux constats :
    La Terre n'est pas extensible et tous les vivants doivent cohabiter de façon harmonieuse.
    La nature a sagement prévu une limitation des espèces vivantes par la sélection naturelle, que les hommes ont supprimé en ce qui les concerne, par les divers effets du "progrès".
    Le contrôle des naissances aurait dû être mis en place depuis longtemps à la place du laissé faire ou pire de l'incitation à pondre par le biais de mesures incitatives d'allocations et aides diverses, sous prétexte de démographie geo politique des uns et des autres. Gouverner, c'est prévoir... Rien n'a été prévu, et voilà que les pays endormis de l'époque cherchent à rattraper leur incompétence par la mise en place de mesures immondes et criminelles de drpopulation, comprenez "assassinats et génocides" qu'ils sont les premiers à en accuser d'autres innocents !

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    1. Si tout le monde avait ne serait ce qu' un jardin pour pouvoir cultiver ses propres produits, on n' en serait pas là dans un monde complètement absurde et sans cœur ....

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    2. 4 milliards d'habitants sur Terre. Pour vivre d'un jardin, celui ci doit faire, disons 1000 M2. Ce qui ferait 4 mille milliards de M2 de jardins. Calculez la surface des terres émerge es cultivables et déduisez en la surface restante pour les autres activités humaines et combien il restera pour la nature sauvage et espaces vierges nécessaires aux divers cycles de l'eau et autres...

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  2. Bon rappel Hannibal. Population algérienne : un tiers en moins durant la "conquête". Dixit JB Duroselle jadis dans mon livre de première en histoire (Nathan) !!!

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