Partisans et
opposants à la charia, musulmans et non musulmans, politiques et apolitiques,
spécialistes et novices, intellectuels et journalistes…Tout un monde est pris
au dépourvu. Comment prétendre qu’un sujet aussi brûlant n’en est pas un ?
Juste une illusion, un mythe, une dérive de l’esprit…
La
charia : une définition problématique
La charia
est définie comme étant « la loi canonique de l’Islam qui régit la vie
religieuse, politique, sociale, appliquée par certains États musulmans ».
Cette définition « universelle » reprend un message largement
véhiculé dans les sociétés musulmanes.
L’association
égyptienne des Frères musulmans, [créée par les
Britanniques] dans les années vingt du vingtième siècle et inspiratrice de quasiment tous
les mouvements islamistes, a fait de l’édification d’un État islamique,
garant de l’application de la charia, sa grande cause. L’idée des Frères
musulmans n’est pas nouvelle. Au 8ème siècle de l’Hégire (14ème
siècle de notre ère), Ibn Qayyim al-Jawziyya, un des grands érudits de l’islam,
affirmait que « La charia est fondée sur le pouvoir (politique) et la
préservation des intérêts des gens… ».
La
définition en vogue de la charia est problématique. Elle évoque deux
éléments étrangers à la religion : la loi et l’État. Ce n’est pas un goût
prononcé pour la laïcité qui dicte ce constat, mais plutôt un souci de
cohérence avec les principes même de l’Islam.
L’approche qui consiste à associer l’Islam à la charia
et rattacher la charia à l’État et à la loi produit une situation ubuesque.
D’une part,
le fait de considérer la charia comme une loi (de source divine) a poussé de
nombreux musulmans à l’opposer systématiquement à la loi positive. Ils trouvent
ainsi inconcevable de préférer la loi de l’Homme à la loi de Dieu ! Il est
certes pénible de croire que le code civil, le code de la route et les autres
textes de lois puissent être en compétition avec la religion, mais certains
raisonnent ainsi.
D’autre
part, la soif du pouvoir et l’obsession de créer un « État
islamique » pour « appliquer la charia » hantent l’esprit de
certains musulmans, en particulier les extrémistes. Néanmoins, force est de
constater que les
différents modèles d’application de la charia rencontrés dans le monde
musulman réduisent la religion à une caricature, ou à un drame absolu.
L’association
est donc malheureuse, mais pas anodine. Elle est d’autant plus malheureuse
qu’il s’agit d’une conception infondée et contraire à l’esprit de la religion. Une
confrontation du concept de la charia aux sources même de l’Islam ne peut être
que bénéfique.
L’équation
de la charia
Inutile
d’insister que le concept de la charia, telle que
reconnu de nos jours, n’a pas de trace dans les sources même de l’Islam.
En fait, le terme
« charia » n’est apparu que quelques siècles après l’avènement de
l’Islam. Et ce sont les oulémas (savants de l’islam) qui l’ont inventé.
Cependant, le nom « charia » est dérivé du verbe arabe
« charaa » qui lui est cité dans le Coran.
Le verset 13
du chapitre 42 est très explicite : « Il (Dieu) vous a légiféré en
matière de religion, ce qu’Il avait enjoint à Noé, ce que Nous t’avons révélé,
ainsi que ce que Nous avons enjoint à Abraham, à Moïse et à Jésus ».
Le verbe souligné (légiféré) correspond au mot arabe « charaa ».
Ainsi, la charia, la vraie, n’est autre que la religion. D’après le
Coran :
Charia
= Religion
Cette
équation à l’énoncé simple rétablit des vérités majeures :
-
Premièrement, une religion est un ensemble de
croyances, de rituels, de valeurs et de pratiques qui traduisent le rapport de
l’individu à Dieu, à la nature et à ses semblables. Pour ce, assimiler une religion à une loi est un
non-sens absolu. De même, opposer d’office la loi positive à la religion
est une attitude infondée. Au contraire, la loi qui veille sur les droits
individuels et collectifs dans une société est conforme à l’esprit de la
religion qui promeut la recherche permanente des intérêts légitimes des êtres
humains.
-
Deuxièmement, la religion est une affaire purement individuelle.
Elle relève des convictions intimes et profondes de chaque individu.
D’ailleurs, les commandements du Coran s’adressent à l’être humain, à
l’individu, et non pas à un pouvoir politique ou à un État. La religion peut
bien exister, comme à l’époque de Noé ou Jésus, sans qu’il y ait un État.
Donc, revendiquer l’application de la charia (la religion) par un État est
complètement absurde. Si un musulman cherche sincèrement à appliquer la charia,
il n’a qu’à se conformer, lui personnellement, aux normes de sa religion.
-
Troisièmement, la charia que beaucoup appellent de
leurs vœux est presque une simple caricature. Pour ceux-là, appliquer la
charia, c’est rétablir des châtiments corporels, interdire l’alcool et les
intérêts bancaires, imposer le voile, répandre des discours vagues sur la
justice et la bonne morale…et faire passer des traditions anciennes pour des
règles sacrées.
Par contre,
la charia authentique, c’est-à-dire la religion, exige du croyant, outre les
rituels et l’engagement envers Dieu, de s’appliquer à donner le bon exemple. Et ce, par
l’attachement aux bons principes et aux valeurs humaines, l’engagement envers
sa famille et l’humanité en général, la tolérance et le respect des droits de
la femme et de l’enfant, la défense de la liberté, le respect de la dignité et
de la vie humaine, l’amour du travail et du savoir…Des centaines de versets coraniques et de paroles
du prophète de l’Islam consacrent ces préceptes religieux qui, étrangement, ne
figurent nulle part dans les revendications des partisans de la charia.
C’est pour le moins douteux de la part de ceux qui crient sur les toits qu’ils
veulent appliquer la parole de Dieu.
Conclusion
Pour démêler
le vrai du faux, l’idée de
la charia largement admise n’est autre qu’une imposture ; une
imposture établie à partir d’une dérivation linguistique erronée et d’une
construction conceptuelle irrationnelle. Cette imposture est de surcroit trop
coûteuse, vu toute l’agitation – stérile et parfois destructrice – créée autour
de la charia dans le monde musulman depuis des siècles.
A l’origine,
il y a la religion : l’Islam. Une religion est une religion et non pas une
loi. Les enseignements religieux s’adressent à l’individu qui est libre et
souverain dans leur application.
D’autre part,
l’État est une organisation politique et sociale qui émane de la volonté
collective d’une société humaine et de ses valeurs. Un État moderne est régi
par des lois qui sont censées refléter les valeurs de la société et garantir
les droits et les intérêts de tous.
Dans ce
schéma, le concept classique de la charia n’a tout simplement pas de place.
Mohamed El
Khamlichi.
Source : http://reseauinternational.net/le-mythe-de-la-charia/
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- La charia n’existe pas !
- Le lycée français de Doha enseigne la charia
- TUNISTAN. Noureddine Khadmi président d’une association sur les objectifs de la Chariâa
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