jeudi 17 novembre 2016

Les coupeurs de tête à l’ONU !

Élire l’Arabie saoudite au Conseil des droits de l’homme, c’est comme nommer un pédophile directeur d’école. Mais ça y est, c’est fait. Cette monarchie est esclavagiste et corrompue. Pudibonde et obscène, elle se prosterne devant le dieu-dollar et vomit tout ce qui n’est pas wahhabite. Elle diffuse à l’échelle planétaire une idéologie débile et sectaire. Elle invoque le Créateur à chaque virement bancaire, mais elle décapite comme d’autres font un barbecue. Seulement voilà, elle a beaucoup d’amis. Et ils trouvent qu’elle a un excellent pedigree pour se voir confier la promotion des droits de l’homme. Remarquez, on a échappé au pire. On a failli lui confier les droits de la femme.

Voilà donc l’Arabie saoudite chargée, avec notre bénédiction, de soutenir les droits de l’homme comme la corde soutient le pendu. Car les Occidentaux ont voté comme un seul homme pour la candidature de Riyad. Avec une bienveillance de marchands de canons soucieux de la réputation du client, ils ont arrosé d’eau bénite cette fosse à purin. Vus de Paris, les dix milliards de contrats d’armements valent bien cette petite mascarade dont personne ne parlera plus dans 48 heures. On leur a vendu des armes, distribué des médailles, bradé l’honneur national. Tant qu’on y est, on peut aussi leur permettre de parader au sein de ce conseil qui de toutes façons ne sert à rien. Puisqu’ils y tiennent !
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Le prince héritier Mohamed ben Nayef, reçu par François Hollande à l’Elysée
pour lui remettre la Légion d’Honneur, mars 2016

On pourrait craindre, bien sûr, que l’ONU y perde de sa crédibilité. L’organisation internationale s’en remettra-t-elle ? En réalité, aucun risque. L’ONU est une avaleuse de couleuvres professionnelle
Elle n’est pas à un paradoxe près. Elle tente de donner une apparence de réalité à cette fiction qu’est la communauté internationale, mais personne n’est dupe. Le Conseil des droits de l’homme a des attributions ronflantes, mais ce machin onusien est devenu la « bonne-à-tout faire » des ploutocrates. L’arène internationale est un champ de forces où les alliances se font et se défont. 
Richissime, la monarchie wahhabite a des moyens de persuasion que n’a pas le Burkina Faso.
Que cette élection au CDH (28 octobre) ait eu lieu trois semaines après le massacre perpétré à Sanaa par l’aviation saoudienne (8 octobre) ne manque pas de sel. Quel symbole ! L’admission en grande pompe au Conseil des droits de l’homme, c’est la prime à l’assassin
On a heureusement échappé au Prix Nobel de Laurent Fabius, l’apologiste alcoolique des psychopathes d’Al-Nosra. On a frôlé celui des Casques blancs « auto-reverse », brancardiers le jour et tortionnaires la nuit. Mais c’était plus fort que tout. On n’a pas pu éviter l’élection des coupeurs de tête saoudiens au Conseil des droits de l’homme de l’ONU.
On aurait dû surtout demander ce qu’il en pense au peuple yéménite. Il subit tous les jours des bombardements qui ont fait 10;000 morts et provoqué une crise humanitaire sans précédent. Mais on s’est bien gardé de lui demander son avis, à ce peuple arabe martyr, avant de coller ce nouveau fion de hamster au revers du veston wahhabite. Car les droits de l’homme, en fait, c’est bon pour justifier les bombardements, pas pour les interdire. Sauf s’ils sont russes. Et même lorsqu’il n’y a pas de bombardement ! Explication.
Comme par hasard, deux jours avant le scrutin onusien, une école a été attaquée à Idlib (Syrie). Selon l’ONU, il y a eu 28 morts dont 22 enfants. L’ONU n’a accusé personne, faute de preuves. Mais les officines de propagande et les médias occidentaux ont accusé la Russie. Niant toute implication, le ministère russe de la Défense a fourni les preuves qu’il n’y avait pas eu de bombardement aérien. Aucune importance ! L’essentiel, c’est le vacarme organisé contre Moscou avant l’élection des membres du conseil des droits de l’homme. Résultat : la Russie a obtenu moins de voix que la Croatie. Contrairement à l’Arabie saoudite, elle ne fait plus partie du CDH. Mission accomplie.

Bruno Guigue (29.10.2016)

Bruno Guigue, ex-haut fonctionnaire, analyste politique et chargé de cours à l’Université de La Réunion. Il est l’auteur de cinq ouvrages, dont Aux origines du conflit israélo-arabe, L’invisible remords de l’Occident, L’Harmattan, 2002, et de centaines d’articles.


Les dirigeants occidentaux justifient presque toujours leur politique étrangère par des mots sur la «démocratie» et les «droits de l'homme». Surtout quand on parle du Moyen-Orient, l'insincérité de ces mots est évidente. Alors que ces dirigeants critiquent l'Iran et la Syrie pour des violations présumées des droits de l'homme, le monde entier peut voir que les alliés des Occidentaux dans la région font des violations sérieuses des droits de l'homme.
Israël a été largement condamné pour son traitement des Palestiniens. L'Arabie saoudite est un pays où même la notion des droits de l'homme n'existe pas. Le Royaume est une monarchie absolue où les gens peuvent encore être exécutés par décapitation ou par crucifixion dans ce 21ème siècle. Les crimes punis par la mort sous le régime saoudien incluent la «sorcellerie» et l’«insulte au roi». Selon la loi saoudienne, les gens ne sont pas des citoyens avec des droits, mais plutôt des «sujets» qui sont essentiellement la propriété du roi. Il en est de même dans les autres États croupions.
Le Qatar est aussi un régime répressif. Comme l'Arabie Saoudite, c'est une monarchie absolue, où un Roi sert d'autocrate non élu. Bahreïn est connu non seulement pour son manque de structures démocratiques, mais pour sa répression de la majorité de sa population qui est musulmane chiite et qui descend souvent dans la rue pour exiger un minimum de droits.
Les Émirats arabes unis, le Koweït, la Jordanie et presque tous les autres régimes alignés sur les États-Unis dans le monde arabe ont un système politique primitif, centré sur une monarchie autocratique. Ces régimes sont connus pour torturer, décapiter,  flageller, réprimer la liberté d'expression, opprimer les minorités religieuses, et faire toutes sortes de choses auxquelles les dirigeants occidentaux  prétendent s'opposer. Cela n'empêche pas les États-Unis de vendre des armes à ces régimes ou d'acheter leur pétrole. Cela n'empêche pas non plus les États-Unis d'établir des bases militaires sur leur sol et de les gâter. Le Financial Times décrit comment les Émirats arabes unis deviennent un «paradis fiscal» bien-aimé par les riches et puissants dans le monde occidental. Alors que les dirigeants occidentaux aiment parler des droits de l'homme, ils n'ont aucun problème avec les émirats autocratiques gérer leur argent.

 Hannibal GENSERIC