dimanche 25 février 2018

"Tigre en papier" : Le Pentagone construit toute sa stratégie sur des sables mouvants chinois !



En avril dernier, le président Trump a lancé 59 missiles de croisière Tomahawk sur la Syrie, sous le faux prétexte d'une attaque d'armes chimiques par le gouvernement syrien. C'était le mouvement militaire le plus théâtral de Trump depuis qu'il est devenu président. C'était aussi la première attaque délibérée des États-Unis contre la souveraineté de la Syrie. Au moment précis où il a ordonné la frappe, Trump accueillait  le président chinois, Xi Jinping, pour un dîner à Mar-a-Lago, la station balnéaire de Trump en Floride. Trump voulait impressionner Xi, mais c'était un coup d'épée dans l'eau. Voici pourquoi.
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"L'impérialisme est un tigre en papier"Mao Tsé-Toung
Trump avait déclaré:
Nous étions assis à table. Nous avions fini le dîner. Nous en étions au dessert. Et nous avons eu le plus beau  gâteau au chocolat que vous puissiez imaginer. Le président Xi l'appréciait. Et j'ai reçu le message des généraux que les navires sont verrouillés et chargés. Que faire? Et nous avons pris la décision de le faire. Donc les missiles étaient en route. Et j'ai dit: "Monsieur le Président, laissez-moi vous expliquer quelque chose ... nous venons de lancer 59 missiles ... en direction de la Syrie et je veux que vous le sachiez."
Lorsqu'on lui a demandé comment le président Xi a répondu, Trump a déclaré: "Il a fait une pause pendant 10 secondes et ensuite il a demandé à l'interprète : voulez-vous répéter s'il vous plaît."
Le moment de l'attaque était censé intimider Xi et envoyer un message à la Chine.
Cependant, la Chine et la Syrie sont des alliés. Les Chinois apportent au gouvernement syrien un soutien diplomatique, militaire et économique. La Chine a également utilisé son droit de veto à l'ONU à plusieurs reprises pour soutenir la Syrie.
Donc, si Trump a invité le président Xi et sa femme à dîner chez lui, c'était pour bombarder l'un des pays amis de Xi, "entre la poire et le fromage" comme on dit.
Trump espérait que sa diplomatie «de la batte de baseball» encouragerait la Chine à resserrer la vis à la Corée du Nord.
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Xi à Trump :
vos menaces m'en touchent une sans faire bouger l'autre
Il voulait aussi imposer à la Chine des changements dans d'autres domaines comme le commerce. Il l'a dit explicitement à Xi.
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Cependant, en y regardant de plus près, le feu d'artifice syrien de Trump n'était qu'un geste creux. Car, d’une part les missiles lancés ont été, en grande partie, détruits par la Syrie [1], et d’autre part, sans la Chine, Trump n'aurait aucun missile à lancer sur qui que ce soit.
Les systèmes de guidage sur les missiles de croisière Tomahawk lancés par Trump sur la Syrie dépendent de matériaux spéciaux dont la Chine a le quasi monopole [2]. Sûrement, Xi le savait, et il est fort probable que Trump ne le savait pas à ce moment-là.
Et cela ne concerne pas que les missiles ...
Si la Chine décidait d’arrêter de vendre ces matériaux spéciaux, toute l'armée américaine (et celles de l'OTAN) cesserait rapidement de fonctionner !!
Sans surprise, l'affichage du machisme par Trump n'a pas impressionné les Chinois. Cela ne les a pas non plus fait changer leur approche de la Corée du Nord ni de la Syrie.
En effet, quelques mois plus tard, la Corée du Nord a testé pour la première fois un missile balistique intercontinental et une arme thermonucléaire capables de frapper le continent américain. Les deux auraient pu être évités si la Chine avait poussé plus fort ses pressions sur la Corée du Nord.
En menaçant de couper le commerce avec n'importe quel pays qui fait affaire avec la Corée du Nord, Trump visait  la Chine.
Bien sûr, cela ressemble à des menaces inconsidérées. Mais cela montre la frustration de Trump. Cela signifie également que des sanctions commerciales contre la Chine pourraient être imminentes et à double tranchant.
Car la Chine a une grosse carte à jouer. 
Elle pourrait restreindre l'accès aux matériaux spéciaux dont nous parlions, qui sont utilisés pour fabriquer des composants électroniques de pointe, comme le système de guidage des missiles de croisière Tomahawk.
La Chine a déjà utilisé cette stratégie auparavant. Il y a environ six ans, elle a restreint les exportations lors d'une prise de bec avec le Japon. La crise de l'approvisionnement a provoqué une véritable crise dans l'industrie des matériaux spéciaux. Du jour au lendemain, les prix de ces matériaux spéciaux ont augmenté de plus de 10 fois.
Les États-Unis et la Chine sont aux premières étapes d'une guerre commerciale. Ce n'est qu'une question de temps avant qu'elle ne dégénère. Cela arrivera probablement bientôt. La situation périlleuse avec la Corée du Nord le garantit.

NOTES
[2] La Chine a un quasi-monopole sur la production des métaux rares

Si les métaux rares sont une trentaine, les « terres rares » en regroupent 17 des plus stratégiques pour les nouvelles technologies. La Chine assure 95 % de la production de ces terres convoitées. Un quasi-monopole qui profite largement à l'Empire du Milieu.
Les métaux rares sont une grande famille. Ils contiennent les 17 terres rares, le graphite, le cobalt, l’antimoine, le tungstène, le tantale, le platine, l’iridium, le ruthénium, le niobium et quelques autres. Ils ne sont pas forcément rares autour du globe. Cependant, leurs gisements assez vastes pour que l’exploitation soit commercialement rentables avec les technologies actuelles le sont.
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C’est "l'or noir"de la Chine. Rassemblant des métaux aux propriétés magnétiques, thermiques, optiques et catalytiques difficilement substituables, les terres rares sont aujourd’hui indispensables à la fabrication des produits de haute technologie. L’absolu monopole de la Chine sur l’extraction mondiale des terres rares est dès lors un enjeu géopolitique majeur. La fin récemment annoncée par Pékin des véhicules à essence et le basculement vers les voitures électriques risquent potentiellement d’accroître la dépendance des économies occidentales à l’égard de la Chine.
On les retrouve dans les puces de smartphones, les écrans plasma, les lampes LED, les batteries des véhicules électriques, les moteurs d’éoliennes ou encore les panneaux photovoltaïques. L’industrie de la défense y recourt, elle aussi, pour la fabrication des systèmes de guidage des missiles et des radars.
Au début des années 1990, la Chine a commencé à vendre des terres rares à prix cassé. Les mines californiennes qui fournissaient la majorité du marché, ont dû fermer leurs portes dans les années 2000, les mineurs ont dû ranger leurs pioches. Les autres pays qui disposent des ressources, notamment la Russie, le Groenland, le Canada, le Vietnam, les États-Unis, et même la France en ont abandonné ou négligé l’exploitation. Seule maître à bord, la Chine fait désormais sa loi sur le marché. Résultat : elle concentre aujourd’hui 95 % de la production mondiale de terres rares, alors qu’en n’en détiendrait que 36 % des réserves. 
Les Chinois ont bien l’intention de gagner la bataille sur l’aval de toutes les technologies du futur et cela fonctionne. Le pays est déjà le leader des technologies vertes dans le monde. Il s’agit du premier producteur d’énergies vertes au monde, du premier fabricant d’équipements photovoltaïques, de la première puissance hydroélectrique, du premier investisseur dans l’éolien et du premier marché mondial des voitures à nouvelles énergies.

Hannibal GENSERIC