mardi 6 octobre 2015

SYRAK. Pour l'Occident, il est interdit d'attaquer Al-Qaïda

Le 2 octobre 2015, François Hollande déclare  à l’Élysée « Ce que j'ai rappelé au président Poutine, c'est que les frappes doivent concerner Daesh et uniquement Daesh. », ce qui complète la déclaration de Fabius :"Elle fait du bon boulot en Syrie".
On s'amusera de l'effet qu'a très certainement produit cette injonction péremptoire faite par le président français à son homologue russe à l'issue de leur tête-à-tête du vendredi 2 octobre à l'Élysée. Passé l'éclat de rire, on s'étonnera de ce curieux distinguo qui exclut de fait toute une partie de la mouvance islamiste extrême gangrenant la Syrie. Que l'on sache, le Front al-Nosra, branche syrienne d'Al-Qaïda sévissant au nord-ouest du pays, ne se différencie guère, en matière d'horreurs, de son frère ennemi Daech.

Les pilotes américains et alliés de la coalition opérant en Syrie et en Irak ont reçu l’ordre de ne jamais frapper les terroristes du groupe Front al-Nosra, la filiale syrienne d’Al-Qaïda, révèle le Canard enchaîné du 6 octobre.

"La Turquie (membre de l’Otan), l’Arabie saoudite et le Qatar (alliés et clients des États-Unis et de la France) arment et financent cette Armée de la Conquête", une force "dirigée par le Front Al-Nosra (branche syrienne d’Al-Qaïda)", écrit le Canard.
"Les pilotes américains et alliés ont, voilà plus d’un an, reçu l’ordre de ne jamais balancer le moindre missile sur ces héritiers de Ben Laden. Une interdiction encore valable aujourd’hui", poursuit le journal célèbre pour ses révélations.
Et le Canard de poursuivre en énumérant, parmi d’autres "vérités premières": "c’est l’armée de Bachar, avec le soutien militaire de la Russie, de l’Iran et du Hezbollah, qui a empêché Daech de planter ses drapeaux noirs sur Damas".

Al-Qaïda est-elle devenue "fréquentable" pour l’Occident? par Mikhail Gamandiy-Egorov

Les médias occidentaux (francophones comme anglophones d’ailleurs) sont tout de même étonnants (dans le sens négatif). Leur façon de traiter l’information, ou plutôt de mener la guerre de l’information, atteint des niveaux où la morale et la déontologie n’ont plus aucune signification.
Quoi qu'il en soit, depuis que la Russie est entrée dans une nouvelle phase de lutte contre le terrorisme en Syrie, le mainstream est passé, lui, à un autre niveau de guerre informationnelle. Accuser la Russie de ne pas limiter ses frappes au groupe terroriste Daech, mais de les étendre à « d'autres groupes soutenus par les États du Golfe », qu'ils avouent eux-mêmes « être liés à Al-Qaida et à d'autres groupes salafistes » , voilà le comble du comble.
Cela signifie-t-il que, depuis septembre 2001, tout le matraquage médiatique voulant que l'ennemi N°1 de l'humanité soit le groupe terroriste Al-Qaïda, c'était donc du pipeau? Al-Qaïda et ses affiliés sont-ils devenus désormais "fréquentables" et même des "alliés" pour certains membres de la communauté internationale? Devrait-on alors réinterpréter complètement les attaques terroristes du 11 septembre 2001, revoir leur "signification" ainsi que toute la notion du terrorisme international qui s'est élaborée depuis?
l'aviation d'attaque russe à l'aérodrome syrien de Hmamiyat

La Russie de son côté a toujours été fidèle à ses principes, y compris ceux liés à la lutte anti-terroriste. Du terrorisme, c'est du terrorisme, peu importe contre qui il est visé. On ne peut pas en dire autant des élites occidentales, aussi bien au niveau politique que médiatique. A une époque, les Talibans étaient des "freedom fighters" (lorsqu'ils combattaient les troupes soviétiques) pour devenir par la suite "des extrémistes du Moyen-Age" à éliminer à tout prix. Al-Qaïda était devenue, depuis l'épisode du 11 septembre, le "principal défi pour toute l'humanité", à en croire là encore les politiciens et journalistes d'une partie de l'humanité. Mais aujourd'hui, ces terroristes sont soudainement devenus plutôt "fréquentables", du moment qu'ils aident à nous débarrasser d'un leader arabe laïc qui n'arrange aucunement les intérêts néocolonialistes de certains.
Cette hypocrisie atteint donc une telle altitude qu'il ne faut nullement s'étonner que la chute soit proportionnelle. En différents endroits du globe, y compris même au sein des pays occidentaux, un grand nombre de voix s'élèvent pour dire que ce genre d'approche ne peut plus être tolérée. On peut partager des valeurs différentes, basées notamment sur nos histoires et traditions respectives (n'est-ce pas d'ailleurs ce qu'avait rappelé le président russe lors de son allocution à la 70ème Assemblée générale de l'ONU?). Mais il est tout simplement inacceptable et en fonction des intérêts géopolitiques du moment de portraiturer un terroriste pur et simple en "rebelle modéré", pour ensuite, lorsque les intérêts immédiats auront été satisfaits et qu'une nouvelle donne sera à l'ordre du jour, le remaquiller en le terroriste égorgeur qu'il a toujours été.
Pendant ce temps, les frappes russes contre les positions des terroristes en territoire syrien ont donné, en quelques jours, plus de résultat que les "frappes" de la coalition occidentalo-golfiste depuis plus d'un an… On peut du reste se demander ce que faisait ladite "coalition" pendant tout ce temps, et quels étaient ses objectifs véritables. Depuis les tout débuts de l'intervention russe répondant à la demande officielle du gouvernement syrien, et selon les dernières informations, un grand nombre de terroristes sont désormais pris de panique, ceux possédant des passeports de pays occidentaux, dont européens, cherchant par tous les moyens à rentrer chez eux. Reste à savoir, après, si les autorités des pays en question sauront les accueillir comme il se doit, ou pas…
"Nos bombardements sur les positions des terroristes apportent leurs fruits. Les terroristes paniquent, nombreux quittent leurs positions et fuient. Selon les informations dont nous disposons, plus de 600 terroristes tentent de quitter la Syrie pour rejoindre l'Europe (ce qui laisse supposer qu'ils sont citoyens de l'Union européenne). Dans cette situation, non seulement nous n'allons pas réduire le nombre de nos frappes, mais nous allons au contraire les intensifier".   a déclaré Andrey Kartapolov, chef de la direction opérationnelle de l'état-major des Forces armées de la Fédération de Russie

Une grande partie des combattants syriens coordonnaient leurs actions avec Al-Qaïda dès la mi-2012.

A l'issue d'une longue guerre des Etats-Unis en Irak, les néoconservateurs américains diffusent de dangereux mensonges sur l'histoire de ce conflit, écrit Matt Purple dans le National Interest.
Kobani, Syrie
Il s'agit d'un conflit interconfessionnel qui a embrasé l'Irak après le renversement de Saddam Husseïn. Les "faucons" et les "néocons" prétendent que la violence sévissait en Irak dès le début, en raison des insurrections des sunnites et chiites, mais que George W. Bush, héroïque, s'est ingéré pour y introduire ses troupes. Selon les néocons, l'ingérence des États-Unis a apporté la paix dans la région, mais le retrait des troupes opéré par le "lâche Obama" a débouché sur la création de l’État islamique. Une telle vision des choses relève plutôt du conte de fées, estime l'observateur. Mais elle est partagée par de nombreux intellectuels américains.
Des combattants du groupe terroriste Etat islamique, Syrie, 2014
Aujourd'hui, ce sujet "mythique" est utilisé pour expliquer la situation en Syrie. Or, c'est le soutien aux insurgés syriens par Washington, préconisé par les "faucons", qui a créé la situation actuelle. A savoir, les combattants formés par des instructeurs américains ont donné leurs armes à Al-Qaïda et l’État islamique possède désormais des missiles antichars américains. Charles Lister, expert de la Syrie, soulignait dans un de ses textes qu'une grande partie des combattants syriens coordonnaient leurs actions avec Al-Qaïda dès la mi-2012, souligne Matt Purple.
La participation des États-Unis aux combats au Proche-Orient ne peut qu'aggraver les conflits. Et les versions "invraisemblables" des néoconservateurs concernant la situation en Irak et en Syrie donnent une fausse vision de la puissance américaine et empêchent de tirer les leçons des quinze ans de guerre au Proche-Orient, conclut l'observateur.