mardi 25 octobre 2016

La Russie et la Chine se préparent à une guerre – au seuil même de l’Amérique



La Fédération de Russie a effectué, du 5 au 10 septembre, l’un des plus grands exercices militaires jamais exécutés, « Caucase 2016 ». 120 000 soldats et officiers ont participé à cet exercice de défense. Selon l’agence Tass, tout cela a eu lieu dans le voisinage immédiat de la péninsule de Crimée. Il n’y aurait jamais eu plus de 12 500 participants à l’exercice en même temps, a annoncé le 9 septembre Valéry Guérassimov, chef de l’état-major général russe. Des représentants des ministères et des membres de la banque centrale russe y ont également pris part.
Guérassimov a décrit les manœuvres militaires comme un « entraînement militaire intensif ». Il s’agissait d’un test difficile pour tous les gradés, qui a également mis les organismes de contrôle militaires à dure épreuve et testé leurs capacités de coordination des opérations des forces armées unies.

Un avertissement clair pour l’Occident

L’ampleur même de ces manœuvres et le choix de l’endroit peuvent être considérés, sans qu’on ait besoin de le souligner de façon explicite, comme un avertissement clair à l’Occident afin qu’il n’utilise pas la question de l’« annexion de la Crimée » et ne mette pas à trop rude épreuve la patience de la Russie dans le Donbass. On a appris en même temps la construction projetée jusqu’en 2018 d’une ligne de défense côtière à la pointe orientale de la Russie.
Une semaine avant le début de l’exercice militaire « Caucase 2016 », le ministre russe de la Défense, Shoigu, a fait état de la création d’une unité spéciale dans la région de la Tchoukotka impliquant d’énormes dépenses en personnel et en matériel. La décision a été prise en 2015 et fait « partie d’un plan d’installation d’un système unifié de défense depuis la côte arctique au Nord jusqu’au territoire de Premorja au Sud ». Le but en est de sécuriser les Iles Kouriles et la mer de Béring ainsi que d’assurer la protection des routes maritimes de la flotte dans le Pacifique et d’accroître la combativité de la marine nucléaire. Les nouvelles divisions doivent assurer la défense des régions très faiblement peuplées de la côte orientale de la Fédération de Russie. 

Des divisions russes à la frontière orientale de la Russie

Le communiqué n’en dit pas plus. Par rapport à ces deux nouvelles, il est vraiment intéressant de noter que la Fédération de Russie adresse un message tout à fait clair à Washington. Jusqu’à présent, la Russie n’avait aucune division défensive côtière. Les frontières ouest de la Russie se trouvent sur le continent européen et du côté est, désert, il n’y avait aucune nécessité à défendre les côtes contre l’Alaska qui se trouve en face, elle aussi pratiquement déserte. Il n’y a aucune indication, ni sur ce à quoi une défense côtière orientale doit ressembler, ni sur son déploiement où sur l’armement prévu. Jusqu’à présent – à l’époque soviétique –, il y avait des forces navales en mer Baltique, dans l’océan Arctique, en mer Noire et dans le Pacifique assurant la défense des côtes russes. Pourquoi met-on alors en place des divisons terrestres entières le long des côtes ?
Une division est une grande organisation de forces terrestres capable de mener un affrontement « interarmes », c’est-à-dire infanterie, génie militaire, défense NBC, blindés, service de santé, missiles et artillerie lourde … bref, tout l’attirail du « Grand Cirque ». Dorénavant, plusieurs divisions seront installées le long de la côte orientale.

Pas plus de 90 kilomètres de l’Alaska

Un coup d’œil sur la carte, et on se rend compte que le point le plus avancé du nord-est de la Russie n’est séparé des États-Unis que par le détroit de Béring. Là, où il est le plus étroit, les deux superpuissances ne se trouvent pas à plus de 90 kilomètres l’une de l’autre. L’Alaska n’est qu’à un jet de pierre. Mais qu’y a-t-il en Alaska, à part des élans, des loups, des ours, des rennes et quelques villages ?
Il y a déjà quelques bases militaires américaines pas tout à fait anodines, telle la base Elmendorf Air Force à Anchorage. C’est là qu’on trouve non seulement les derniers modèles d’avions de combat F-22-Raptor, capables d’en décoller pour intercepter les bombardiers stratégiques russes, mais aussi le Norad pour la zone d’Alaska, le Command of the 11th Air Army et Fort Richardson, avec la 4th Brigade Combat Team (parachutistes) de la 25e division d’infanterie.

"Les avions de combat américain auraient à peine le temps de décoller en cas de guerre"

Comme mentionné plus haut, les divisions pourraient aussi être équipées de missiles de différentes sortes. Dans l’une de ses analyses, l’analyste militaire Sergej Ischenko a remarqué que si la Russie installait le long de sa côte orientale des rampes de lancement mobiles pour le système de missiles balistiques à courte portée Iskander, les F-22-Raptors des Américains auraient à peine le temps de décoller pour intercepter les bombardiers russes. Comme nous l’avons appris avec le cas « Donald Cook » [1] et d’autres démonstrations de force des Russes, ces derniers peuvent paralyser complètement l’électronique militaire américaine, ce qui se produirait très vraisemblablement également en Alaska, plongeant dans le noir tous les postes d’observation et d’alerte. « Tout comme au temps de la guerre froide, les troupes des bases militaires d’Elmendorf et de Fort Richardson iront se coucher chaque soir avec un mauvais pressentiment », résume Ischenko.

Avec les USA, la Russie applique ce qu’elle a dû elle-même supporter

La Russie applique à présent exactement ce qu’elle a dû elle-même supporter au cours des dernières années : les bases militaires et les troupes de la puissance adverse se resserrent sur les frontières des États-Unis. Là-dessus, comme l’a souligné le président chinois Xi Jinping lors du Sommet du G20 à Hangzhou : la Chine poursuivra avec confiance ses intérêts dans la mer de Chine méridionale. Celle-ci se situe juste au-dessous de la côte orientale de la Russie. Cela ne se présente pas très bien pour les États-Unis.
Cependant, il n’y a pas que les divisions de défense côtière dans la Tchoukotka et les côtes du sud vers la Chine. L’armée de l’air russe a construit dix bases aériennes dans l’Arctique. L’organisation russe pour les constructions spéciales (Spetsstroy) développe actuellement les installations d’infrastructure de ces bases militaires aériennes dans le grand Nord, en Extrême-Orient et en Sibérie pour 20 000 militaires, leurs familles et des employés civils du ministère de la Défense.
Selon un rapport du site Internet « The National Interest », les avions de combat des 10 bases de l’armée de l’air sont équipés du redoutable Vympel R-37 (missile air-air) à très haute portée et qui est en mesure d’abattre de manière ciblée les avions américains AWACS et C4-ISTAR ; ils peuvent également se déplacer sur une si grande distance qu’ils sont inaccessibles pour les avions de combat américains qui doivent protéger les AWACS et les C4-ISTAR. Les avions de combat russes peuvent en outre abattre avec une très grande précision les avions ravitailleurs des Américains, ce qui, lors de l’explosion du chargement de kérosène hautement inflammable, rend obsolète la possibilité pour l’équipage de s’échapper en utilisant leurs sièges éjectables. Un tir réussi transforme immédiatement le chargement de kérosène volant en boule de feu.
Viennent en outre les missiles air-air Nivator KS-17 qui portent déjà parmi les Américains le nom d’AWACS-killers et atteignent sûrement leur but sur une portée de 400 kilomètres. Ce sont les missiles air-air les plus lourds et les plus destructeurs ayant jamais été construits. L’armée de l’air indienne en possède afin d’armer ses SU-30MKI-FIGHTERJETS russes.

1500 soldats d’élite russes en Bolivie

Le réarmement ne s’arrête cependant pas à la frontière nord-ouest de l’Amérique. Le 6 septembre, l’agence Tass a rapporté que la Fédération de Russie avait envoyé 1500 soldats d’élite, les Spetsnaz, pour action immédiate en Bolivie. Cette mesure faisait partie d’un accord sur la collaboration militaire signé entre la Fédération de Russie et la Bolivie et appliqué sur le champ. Il s’agit là également d’une avant-garde – qui ne devrait pas s’en tenir au nombre de 1500 – se rapprochant des frontières étatsuniennes. La Bolivie voit la Russie comme un pays fraternel, avec lequel elle entretient d’excellentes relations, a fait savoir le ministre de la Défense bolivien. De son côté, la Russie voit en la Bolivie un partenaire prometteur, a répondu avec bienveillance le ministre de la Défense russe Shoigu.

Pas de nouveau Brésil

L’empressement de la Bolivie à collaborer avec la Russie doit être vu dans un contexte de crainte de devenir le prochain Venezuela ou le prochain Brésil où les Etats-Unis provoqueraient désordres et renversements politiques. Au Brésil, où Washington serait derrière la destitution de Dilma Rousseff, dont le successeur au poste de président, Michel Temer, a, selon des informations de Wikileaks, travaillé de longues années comme informateur des services secrets américains contre son propre pays.
L’article indique ensuite que Temer va nommer Goldman Sachs et le FMI pour gérer et diriger l’économie brésilienne.
Lors du renversement de Dilma Rousseff, Temer était soutenu par le sénateur Aloysio Nunes qui a œuvré pour la destitution de celle-ci. Une fois que le renversement a abouti, Nunes est allé trois jours aux Etats-Unis pour y rencontrer des représentants du gouvernement américain. Parmi ceux-ci, on trouvait aussi des membres du US-Senate Foreign Relations Committee, de l’Albright Stonebridge Group (Présidente :
Madeleine Albright) et l’ancien ambassadeur américain au Brésil, Thomas Shannon. De plus, l’actuelle ambassadrice des Etats-Unis au Brésil Liliana Ayalde est une femme qui, selon Wikileaks, a déjà été impliquée dans la chute du gouvernement paraguayen.

Avion-espion américain au-dessus de la mer Noire

La Russie s’est justifiée du renforcement massif de ses efforts militaires – dirigés à l’évidence contre les Etats-Unis – par le survol de la mer Noire, d’un des avions-espions américains P8-Poseidon, ayant tenté de pénétrer la semaine dernière, avec son transpondeur éteint, dans l’espace aérien russe. Il a été intercepté par un SU-27. Le Pentagone s’est ensuite plaint de ce que l’avion de combat russe ait opéré des manœuvres dangereuses et s’est approché de l’avion américain à une distance de 10 pieds. La tentative de pénétrer dans l’espace aérien russe est contre toutes les règles internationales et, serait en outre le prolongement des agressions américaines délibérées du 1er août, lorsque les Etats-Unis ont fait voler le long de la frontière nord de la Russie plusieurs bombardiers stratégiques pouvant transporter des armements nucléaires.
Si l’on prend en compte également le fait – déjà mentionné plus haut – que la Chine a ouvertement montré sa disposition de s’opposer aux activités américaines dans la région, et l’armement qu’a développé la Chine, il en résulte une nouvelle image de la situation internationale.

Une nouvelle image de la situation internationale

Avec son missile PL-15, la Chine a plongé les instances dirigeantes de l’armée américaine dans la perplexité. Les AIM-120 AMRAAM des avions de combat américains, vieux de plusieurs décennies, ne peuvent plus tenir la comparaison. « Que pouvons-nous opposer à cette menace ? » a demandé le général Herbert Carlisle, commandant de l’Air Combat Command. Et il a exigé : « Le PL-15 et la portée de ce missile … nous devons tout simplement être capables de le surclasser. » En outre, les Chinois ont également développé avec le Chengdu-J-20, un avion de combat furtif, efficace et ultramoderne. Les Chinois dissimulent certes de nombreuses données, mais il est clair pour les militaires américains qu’ils ont là affaire à un avion optimisé capable d’atteindre une vitesse élevée et de très grande portée. En armant ces avions de combat de missiles PL-15, les Chinois peuvent détruire les avions ravitailleurs américains ainsi que des navires de guerre.
Cependant, afin de permettre les opérations aériennes des avions de combat américains F-22 en mer, trois ou quatre avions ravitailleurs doivent, selon un RAND-Briefing, décoller toutes les heures pour délivrer 2,6 millions de gallons de kérosène aux avions de combat. Cela, Pékin le sait aussi. Les avions Chengdu J-20 n’ont qu’à cibler – à distance sécurisée – les lourds et maladroits avions-ravitailleurs avec des PL-15 à grande portée pour les tirer comme des pigeons et paralyser l’armée de l’air américaine dans les eaux extraterritoriales de Chine et des côtes orientales de la Russie.

Les Américains doivent se faire à l’idée d’une guerre menée dans leur propre pays

Si la Russie y ajoutait encore sa capacité à éliminer le très complexe système électronique AEGIS des forces armées américaines, les Etats-Unis ne pourraient à moyen terme plus se permettre aucune épreuve de force avec la Chine et la Russie dans cette région. Il ne serait pas possible aux bombardiers américains de pénétrer profondément en Chine et en Russie pour détruire les grandes villes et les centres importants par des attaques à la bombe, pas plus que de mener des opérations d’engagement dans les zones côtières de la Chine et de la Russie. L’Amérique est en train de perdre sa souveraineté aérienne sur la mer de Chine méridionale, région de grande importance avec les itinéraires commerciaux mondiaux et perd aussi son influence sur les Etats riverains qui voient le champion jusqu’ici incontesté provoqué et mis à mal.
En revanche, la Russie et la Chine ont de bonnes chances d’affronter les Américains le long de leur côte occidentale sur leur propre sol, dans de très dures attaques aériennes. Privées de leurs systèmes d’alerte électroniques, que la Russie peut désactiver, les possibilités de la défense antiaérienne seront restreintes. En combat aérien, les missiles de grande portée russes et chinois sont supérieurs à ceux des Américains. Cette fois-ci, les Américains doivent se faire à l’idée d’avoir la guerre dans leur propre pays. Toute la côte ouest, jusqu’à loin dans l’arrière-pays, serait touchée. Si les Etats-Unis jouaient la carte du nucléaire, la riposte consisterait en au moins une bombe atomique sur une grande ville américaine de la côte ouest.
La tendance esquissée ici montre à l’évidence que la Chine et la Russie veulent le faire voir clairement aux Américains et sont décidées, le cas échéant, à mettre leurs plans en œuvre. Le peuple américain n’est cependant psychologiquement absolument pas préparé à un tel scénario catastrophe. Il y aurait une explosion de panique déclenchant une tourmente anti-gouvernementale. Les Etats-Unis ne seraient pas en mesure de mener une telle guerre plus de deux semaines.
Niki Vogt


VOIR AUSSI :


Source : http://www.comite-valmy.org/spip.php?article7756