Le président américain Donald Trump a posé une
colle inhabituelle aux médias du monde entier, tenus de puiser dans leurs
lexiques les plus fleuris pour traduire ses propos
allégués au sujet des « shithole countries ».
Terme très vulgaire, « shithole » se
réfère aux latrines extérieures pour désigner un endroit particulièrement
repoussant. Effectivement, près d'un milliards de terriens défèquent dans la rue, sans respect pour les autres, sans honte ni retenue [1].
Toute la difficulté pour les traducteurs consiste à reproduire au mieux la grossièreté du langage, mais aussi, parfois, à ménager la sensibilité du public, selon un florilège rapporté par les bureaux de l'AFP.
En français, de nombreux médias, dont l'AFP,
ont retenu la formule très crue de « pays de merde », proche du sens
littéral et conforme au style souvent sans fioritures de M. Trump, qui a
toutefois laissé entendre vendredi ne pas avoir utilisé l'expression
incriminée.
Des dictionnaires bilingues comme le Harrap's
proposent toutefois des solutions moins grossières, comme « porcherie »,
« taudis » ou « trou paumé ».
Variations sur le même « terme »
La presse espagnole est à l'unisson de la
presse française avec « paises de mierda », des
médias grecs introduisant quant à eux une nuance : « pays de
chiottes ».
Aux Pays-Bas, le grand quotidien Volkskrant
et une bonne partie de la presse néerlandophone esquivent la vulgarité en
utilisant le terme « achterlijke », ou « arriéré ».
En Russie, Ria Novosti parle de « trou
sale », mais Troud, un journal syndical, va plus
loin avec « trou à merde ».
En Italie, le Corriere della Sera avance « merdier »
(merdaio),
et l'agence tchèque CTK choisit de son côté de parler de « cul du
monde ».
La version animalière
Les médias allemands optent souvent pour
l'expression « Dreckslöcher », qui peut se
traduire par « trous à rats ».
L'allégorie animalière est aussi de mise dans
la presse serbe, avec l'expression « vukojebina », à savoir « l'endroit
où les loups copulent ».
Les plus polis
En Asie, les médias semblent davantage à la
peine pour trouver le mot juste en langue locale, tout en évitant parfois de
choquer.
Au Japon, la chaîne NHK a choisi de parler de
« pays crasseux », l'agence Jiji utilisant un terme
familier, mais pas forcément injurieux pouvant se traduire par « pays
ressemblant à des toilettes ».
Les médias chinois se contentent en général de
parler de « mauvais pays », évitant de reproduire
l'expression originale dans sa grossièreté.
Les poétiques
La version la plus allusive et la plus imagée
revient sans conteste à l'agence taïwanaise CNA, qui évoque des « pays
où les oiseaux ne pondent pas d'œufs ».
NOTES
[1] Dans
de nombreux pays du monde, il y a toujours un manque chronique de toilettes, ce
qui pousse les gens à déféquer à l'extérieur.
En
fait, comme le
note Niall McCarthy de Statista, un peu moins d'un milliard de personnes
pratiquent encore la défécation à l'air libre dans le monde entier et c'est un
problème qui entraîne
des maladies répandues et des millions de morts.
En
2015, l'ONU a appelé à la fin de la défécation à l'air libre d'ici 2030 et
certains pays comme le Vietnam ont réussi à l'éradiquer.
D'autres
luttent encore, comme le montre la carte suivante.
Selon
les données
les plus récentes de la Banque mondiale datant de 2015,
40% des Indiens défèquent encore à l'extérieur.
Cela
est également courant en Afrique où les taux les plus élevés ont été
enregistrés en Érythrée (76%), suivie par le Niger (71%) et le Tchad (68%).
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Ouvrons
les yeux et cessons de nous tromper de combat
Quelques
jours après les propos racistes mais surtout racialisants et insultants de
Donald Trump à l’égard d’Etats souverains, il faut bien dire qu’il n’y a rien
d’étonnant dans ceux-ci. Ils confirment ce que chacun peut attendre d’un
président populiste et guidé par l’idéologie de la « White
supremacy ». Il va bien falloir que tous ceux qui sont frileux à propos de
cette expression commencent à comprendre, s’ils veulent manifester efficacement
leur opposition à de tels propos, qu’ils ne peuvent faire l’économie d’une
analyse approfondie de ce qui autorise le représentant de l’Etat le plus fort,
mais aussi le plus impérialiste, à les proférer.
Dans
l’idéologie portée par la suprématie blanche, reste profondément ancrée la
conviction d’une race supérieure. C’est devant une telle évidence que la
hiérarchie des races fut introduite, et peu importe que cette hiérarchisation
ne repose sur aucun caractère scientifique, c’est un fait et cela opère comme
par magie. On construit, artificiellement, une nouvelle catégorie sociale et le
tour est joué. Des millions d’Africains déportés, déshumanisés et devenus par
la décision de quelques blancs une sous catégorie de l’humanité à l’issue des
Découvertes, l’une des plus grande catastrophe démographique et métaphysique,
qui a changé irréversiblement le sens de l’humanité en brisant l’altérité et
l’intersubjectivité dans les relations sociales et dans les expériences vécues
des hommes et des femmes.
Le président
américain ne fait que dire tout haut ce que des millions de personnes pensent,
même si, dans d’autres régions du monde, un très grand nombre pense le
contraire.
Un président
le dit, les vannes sont lâchées et les propos les plus abjects sont à attendre,
sans bien sûr oublier que toute personne qui prendra la défense des exclus, des
marginalisés, en un mot des damnés, sera criminalisée. Le système capitaliste
ne connaît pas d’autres façons d’agir : dominer, faire plier sous le joug
d’accords et d’obligations iniques et félonnes sans rien donner en retour et si
cela ne suffit pas instiller la guerre permanente comme moyen de contrôle et de
régulation.
Bien sûr, il
faut affirmer notre solidarité à l’égard des pays pointés par Donald Trump,
mais il faudrait surtout que l’ensemble des pays qui sont dans le collimateur
des pays occidentaux cessent de répondre aux injonctions des pays dominants et
demandent enfin réparations pour les conséquences innombrables assumées par
leur peuple et qu’ils cessent d’embrasser, de manière compulsive, cette
idéologie portée par la Modernité.
Hannibal GENSERIC