Le 18 juillet 2015, dans son premier discours
consécutif à l’accord sur le nucléaire iranien conclu quatre jours auparavant,
Sayed Ali Khamenei, le Guide Suprême de la Révolution Islamique, a adressé un
message retentissant à l’Occident, et en particulier aux Etats-Unis et à
Israël, démentant la propagande qui transforme une victoire éclatante de l’Iran
en victoire de la diplomatie occidentale. Et afin de mieux souligner la
détermination de la République Islamique d’Iran et son hostilité fondamentale à
l’impérialisme américain, qui restera toujours pour elle le « Grand Satan » (de même qu’Israël restera la
« tumeur cancéreuse qui doit
disparaître de l’existence »), Sayed Khamenei a prononcé son
discours en tenant à la main rien moins
qu’un fusil d’assaut : c’est là un fait exceptionnel, surtout pour
une telle autorité religieuse, dans une mosquée et à l’occasion du discours
commémorant la fin du mois de Ramadan et l’Aïd-al-Fitr, un jour de fête dans
tout le monde musulman.
Bien
entendu, afin de ne pas contrevenir à l’euphorie impériale qui se vante d’avoir
fait plier l’Iran, les médias dominants n’y ont pas fait la moindre référence.
L’Associated Press a même pu faire un compte rendu
de ce discours avec une photo assez claire sans faire le moindre commentaire à
ce sujet, tandis que Reuters a fait le choix de publier une photo de
Sayed Khamenei datant de 2012. Pourtant, ce fait absolument unique méritait
d’être mentionné selon les standards occidentaux, et aurait même pu aller dans
le sens de la diabolisation du régime iranien et de ses supposées velléités
agressives et expansionnistes. Mais l’heure est à l’autosatisfaction et à
l’auto-congratulation, et les presstituées, comme leurs maîtres, n’ont que
faire de la réalité des faits ou de l’exigence de cohérence.
Plusieurs
points de ce discours sont à retenir.
En premier
lieu, Sayed Khamenei ne fait preuve d’aucun triomphalisme suite à cet accord.
Il reste très circonspect, et rappelle que cet accord doit encore être scruté
et validé par les plus hautes autorités de l’Iran – aucune référence, en
revanche, à son approbation inévitable par le Conseil de Sécurité des Nations
Unies, instance nulle et non avenue aux yeux du Guide Suprême. Dès le lendemain
de la conclusion de l’accord, Sayed Ali Khamenei avait adressé un message en ce sens au Président Hassan Rouhani,
dans lequel, après avoir félicité l’équipe des négociateurs iraniens, il
soulignait :
«
Cependant, il est nécessaire d’étudier très soigneusement le texte qui a été
préparé, de sorte qu’il puisse ensuite suivre le processus légal qui a été
déterminé pour qu’il soit accepté. Ensuite, en cas de ratification, il est
nécessaire d’être à l’affût des éventuelles violations des accords par la
partie adverse et de veiller à ce qu’ils ne soient pas bloqués. Vous savez très
bien que certains des six gouvernements participants ne sont fiables en aucune
façon. Je m’attends également à ce que notre cher peuple continue à préserver
son unité et sa quiétude afin que nous puissions assurer les intérêts nationaux
dans un environnement calme et raisonnable. »
La méfiance,
et même la défiance vis-à-vis des Etats-Unis et de leurs alliés (notamment la
France, qui s’est distinguée par son hostilité à l’Iran due à sa servilité
pro-Israël ; il y a fort à parier que l’Iran s’en souviendra, et que les
entreprises françaises auront plus de mal à participer à la ruée vers l’or perse qui s’annonce) reste donc
maximale, à juste titre. Fort de son expérience, l’Iran, loin de fonder de
quelconques espoirs sur des accords conclus avec les Etats-Unis, ne compte –
après Dieu – que sur lui-même, sur l’unité, l’éveil, la résistance et les
facultés d’innovation de son propre peuple, et la sagesse de ses dirigeants.
Une guerre ouverte reste un horizon possible, bien que non souhaité, et l’Iran
continue à s’y préparer avec une grande confiance en ses capacités.
Sayed
Khamenei a également tenu à réaffirmer les principes intangibles de la
République Islamique et de sa politique extérieure, pour lesquels aucune
compromission, aucune négociation même ne sont envisagées. Le dialogue
Iran/Etats-Unis s’arrête à la question nucléaire et n’a pas vocation à
s’étendre à d’autres questions. L’hostilité de l’Iran au gouvernement
américain, considéré comme « le cœur de l’Arrogance mondiale », est
inconditionnelle, de même que son hostilité à l’Etat d’Israël :
« Mort à l’Amérique » et « Mort à Israël » resteront les
slogans fondamentaux, constitutifs de l’identité même de la République
Islamique et du peuple iranien – et John Kerry devrait savoir qu’il s’agit de bien plus que de simple rhétorique. Dans ce sens
et de manière prévisible, Sayed Khamenei a réaffirmé
le soutien indéfectible de la République Islamique aux peuples opprimés de la
région, qu’il s’agisse du soutien humanitaire, diplomatique et moral pour le
Bahreïn et le Yémen, ou du soutien total (économique, financier, militaire,
etc.) pour les pays et mouvements de l’Axe de la Résistance – Irak, Syrie,
Hezbollah, Hamas, Jihad Islamique et autres factions de la Résistance
palestinienne. Du reste, Sayed Khamenei n’a pas même fait cette distinction,
parlant simplement de soutien continu aux uns et aux autres.
Enfin, Sayed
Khamenei a fait référence à la marche de l’histoire en soulignant les multiples
errements et revers des Etats-Unis depuis la fin de la Seconde Guerre Mondiale,
appelés à se répéter. Le Guide Suprême de la Révolution Islamique, qui est
également l’autorité ultime à laquelle se réfèrent des dizaines de millions de
musulmans chiites du monde entier, tant en Orient qu’en Occident – dont le
Hezbollah, qui le considère comme rien moins que le dirigeant de la Communauté
Islamique dans son ensemble –, confirme que loin d’être un archi-conservateur, comme le prétend la
propagande occidentale, il reste à l’avant-garde des luttes politiques et
sociétales internationales, à l’exemple d’un pays comme Cuba. Cela peut être
difficile à concevoir en Occident, historiquement habitué à voir des autorités
religieuses « traditionnelles », comme le pape pour l’Eglise
catholique, avoir des positions conservatrices voire réactionnaires sur nombre
de questions de politique internationale et être attachés à maintenir l’ordre
établi et à enseigner la résignation aux peuples. Pourtant, c’est bien sur
l’Islam et en son nom que la République Islamique fonde sa politique, et l’Iran
est voué à jouer un rôle de premier plan dans le monde de demain.
Les nations
et forces chiites sont aujourd’hui, par leurs actions, les plus représentatives
de l’opinion publique des pays musulmans et des intérêts authentiques de leurs
peuples, et on peut s’attendre à ce que grâce à l’aide internationaliste de
l’Iran (et non pas sous sa tutelle intéressée), leur aura
grandisse au sein du monde islamique de manière inversement proportionnelle à
celle de l’Arabie Saoudite, qui se révèle aux yeux de tous comme un outil Usraélien, tandis que Téhéran apparait le seul espoir de la Palestine. Par ailleurs, on
voit se forger et se renforcer une alliance objective entre l’Iran et ses
alliés des BRICS et de l’OCS, en particulier avec la Russie
traditionnellement orthodoxe, qui est aujourd’hui le principal adversaire de l’impérialisme
américain à l’échelle mondiale et le champion de la défense du droit international. On
peut aujourd’hui distinguer, avec de plus en plus de clarté, un avenir ou les
équilibres des puissances classiques seront rétablis, ainsi que les forces et
les valeurs traditionnelles, pour le meilleur intérêt
des peuples et de la paix entre les Nations.
UN ŒIL SUR LE MONDE MUSULMAN
Par Sayed Hasan
Par Sayed Hasan
(Voir l’article précédent :
« Le triomphe de la République Islamique »)