Je vous avais promis que ce Noël ne serait pas triste ; voilà que
pour la première fois en quarante ans, les US viennent de voter au
Conseil de sécurité de l’Onu contre les volontés officielles de Tel
Aviv. Le miracle pour lequel les amis de la Palestine et les Israéliens
progressistes ont tant prié s’est produit, après tout. C’est l’un des
premiers effets bénéfiques de la victoire de Donald Trump : cassée,
enterrée, la longue soumission américaine envers les juifs. C’est
l’administration Obama qui l’a fait, mais cela ne serait pas arrivé si
Mme Clinton était le président élu.
Depuis 40 ans, les US opposaient leur veto à chaque résolution de
l’ONU qui aurait pu limiter le droit inaliénable d’Israël à traiter ses
goy [1] à sa guise, par exemple en raflant leurs terres et en installant des
juifs sur leurs propriétés volées. Ceci était dans la ligne de la
vision traditionnelle juive selon laquelle les Gentils [les goys, les non-Juifs] [2] n’ont aucun
droit, de manière générale, comme un chat n’a pas de droit à son coussin
ou le cheval à sa stalle ; ils n’en jouissent qu’aussi longtemps que
cela convient à l’être humain. La communauté mondiale grinçait des
dents, l’allégresse israélienne se faisait jubilation, mais les US
restaient les défenseurs indéfectibles d’Israël. En 2011 c’est le même
président Obama qui s’était opposé à une autre Résolution pratiquement
identique à celle qui vient de passer maintenant. Depuis lors, Obama a
donné à Israël 38 millions de dollars en aide militaire. Qu’est-ce qui a
changé, maintenant ? Pourquoi est-ce que cette fois Obama a décidé que
le mauvais génie d’Israël exige un traitement plus rude ?
Le New York Times a expliqué cela par la liberté que lui
donne l’approche de la retraite. Comme les enfants le dernier jour
d’école avant les vacances se sentent libres de faire des farces pour
régler leurs comptes, les politiques sur le départ ont tendance à se
soulager, et bien souvent sur le dos des juifs qu’ils ont eu à
supporter, à tolérer ou à vénérer, peu importe.
Le dirigeant malais Mohammad Mahathir a attendu jusqu’au dernier jour
à son poste en 2003 pour dire que les juifs avaient réussi à prendre le
contrôle des pays les plus puissants et de gouverner le monde par
procuration. Jimmy Carter et George Bush I n’avaient pas attendu, ils
avaient agi pour borner les appétits israéliens insatiables au cours de
leur premier mandat, puis ont échoué à se faire réélire. Obama a eu
droit à deux mandats, et le voici libre de batifoler un moment.
Cela peut expliquer le choix de ce moment, mais ne suffit pas à
éclaircir le sentiment qui est en jeu. Rien n’agace plus un homme de
pouvoir que d’avoir à plier le genou devant un pouvoir obscur. Pas
devant un roi, mais devant quelqu’un qui n’a même pas une armée. L’Église avait mis des bâtons dans les roues de bien des dirigeants,
mais les juifs sont une nuisance plus grande.
Jamais un si petit nombre
de gens n’a mis autant de pagaille, me disait un ami.
Des tas de gens
prient pour qu’ils se cassent la figure. Même des politiciens et des
hommes d’État très prudents se réjouiraient si ces gens arrogants se
voyaient remis à leur place.
Pour un président US, le dépit devait être insupportable.
Lui,
l’homme le plus puissant sur terre, il a été humilié à plusieurs
reprises par les Israéliens. Quand il s’est rendu en Israël, le rabbin
en chef Obadiah Youssef a dit qu’il aurait dû baiser les pieds aux juifs
qui l’autorisaient à les approcher. Ses propositions pour un règlement
plutôt honnête du problème palestinien ont été rejetées sans ménagements
et son propre Congrès a reçu Netanyahou avec plus de faste qu’il n’en
avait jamais connu.
Quelle est la source mondaine, profane, du pouvoir israélien ?
Aujourd’hui comme en 1917, c’est la capacité des juifs américains pour
influencer l’opinion publique américaine à travers la machinerie
médiatique. C’est ce que les juifs avaient dit à Lord Balfour en 1917,
quand ils lui ont demandé de leur promettre la Palestine, ce qui lui
vaudrait en retour qu’ils sauraient attirer les US dans la Première
Guerre mondiale. Dans aucun pays les juifs ne sont aussi puissants
qu’aux US, et partout où ils sont puissants, c’est à cause du soutien et
de l’insistance américaine. C’était là aussi une source de frustration
pour un président américain.
Et voilà que les juifs ont raté leur coup avec Obama et avec la
Clinton qu’il soutenait. Ils ne sont pas parvenus à ficeler l’opinion
publique américaine. Ils ont bien essayé, ils ont activé tous leurs
media, ils ont fait parader les Maîtres du discours, et pourtant, ils se
sont ramassés. Trump a su jouer de la cassure entre juifs libéraux et
sionistes, et il a su éviter de se faire traiter d’ennemi des juifs,
comme l’ADL le voulait de toutes ses forces. Après son élection, le
président élu Trump a lâché le chat parmi les pigeons
en nommant David Friedman comme ambassadeur US en Israël. Il a su faire
de la déchirure entre juifs libéraux et juifs sionistes purs et durs
une guerre à mort.
“ Il a gelé en enfer”, a écrit Mondoweiss, un site progressif juif : « le New York Times a
sorti un article qui dit que le sionisme est raciste ». Les juifs
sionistes libéraux d’Amérique ont été sommés de choisir : le racisme
avec le sionisme, ou les valeurs libérales.
L’extrême droite européenne s’est servie de cette ruse, en faisant
appel aux sionistes contre les juifs libéraux pendant des années [3].
Breivik, l’assassin de masse norvégien, a mis cette stratégie en avant
aussi. Les partis européens d’extrême droite qui ont refusé de jouer
avec les sionistes et avec les juifs libéraux à la fois se sont
retrouvés privés de micro, sans le moindre écho médiatique.
C’est un schéma semblable qui a été mis en œuvre par les Britanniques
: ils ont donné aux juifs ce qu’ils demandaient, plus précisément
Theresa May a annoncé qu’elle avait décidé d’accepter la définition de
l’antisémitisme donnée par l’IHRA (Alliance Internationale pour la
Mémoire de l’Holocauste), et l’intègrerait à la législation britannique,
et au même moment ils ont rendu plus facile l’abstention US et rendant
le texte plus succulent pour Obama.
Les Russes en ont fait autant : ils ont repris les chaînes de
télévision aux oligarques juifs, les ont chassés du pouvoir, mais
caressent dans le sens du poil les fondamentalistes loubavitch et
Netanyahou.
Le monde va se libérer de l’hégémonie juive, mais cette transition
compliquée exige d’utiliser un groupe juif contre un autre, du moins
c’est ce que ressentent les politiques. Ce qui n’empêche pas que le
moment de la libération approche. A mesure que l’hégémonie US décline,
celle des juifs suit la même pente. Trump a gagné malgré le fait que les
media juifs, les Maîtres du discours, étaient contre lui. Cette leçon,
les politiciens vont la retenir, et s’en resservir.
La conduite des Israéliens a beaucoup contribué au changement. Les
blancs aiment jouer à la loyale ; ils ont donné l’intégralité des droits
aux juifs et aux noirs, malgré le fait que ce n’était pas à leur
avantage. Mais les juifs n’ont que faire de la loyauté, tout ce qui
compte, pour eux, c’est le but à atteindre.
Leurs mauvais traitements
aux Palestiniens ont dépassé tout seuil de tolérance. Ils pouvaient
renoncer à la Palestine et vivre bien sur les 78% du territoire qu’ils
lui avaient confisqués, honnêtement ou non. Ils auraient pu obtenir la
solution à Deux États, où l’État palestinien n’aurait pas eu le moindre
contrôle sur les frontières, son espace aérien, son eau ou sur sa
capacité militaire, juste un drapeau et un hymne national.
Ou encore, s’ils veulent la terre de Palestine tout entière, ils
pourraient traiter honnêtement les Palestiniens, leur donner des droits
dans un seul État, au lieu de continuer à implanter toujours plus de
colonies juives sur la terre qu’ils volent aux Palestiniens tout en
prétendant viser la solution à Deux États. Mais les juifs ont préféré
avoir le beurre et l’argent du beurre. C’est un stratagème qui peut
marcher un temps, mais pas éternellement, et les sionistes viennent de
découvrir les limites de leur pouvoir.
La dramaturgie du vote au Conseil de sécurité mériterait d’être mise
en musique. L’Égypte a tracé les grandes lignes, et Israël a commencé à
faire pression. Le général Sissi est un dirigeant plutôt fragile ; il est
arrivé au pouvoir par un coup d’État, il n’est pas très populaire, et
il est donc sensible aux pressions. Netanyahou a demandé à Trump d’aller
parler à Sissi, ce qu’il a fait. Trump redoute que ses adversaires lui
jouent un sale tour avant la prise de pouvoir, et il a besoin de
protection. Sissi a accepté de retarder indéfiniment le vote. Mais Obama a
été outré par l’interférence de Trump et celle de Netanyahou passant
par-dessus lui. « Un seul président à la fois », selon sa réplique
célèbre.
Quatre États ont alors repris la motion abandonnée par l’Égypte. La
Nouvelle Zélande a été menacée par Netanyahou qui lui avait promis « ce
sera la guerre » et qui a rappelé son ambassadeur, en fermant
l’ambassade. Mais la Nouvelle Zélande n’a pas reculé d’un pouce ! Ils
avaient connu cette situation avec l’Angleterre, et les menaces de
Netanyahou les ont laissés froids. Quelques années plus tôt, ils avaient
déjà envoyé l’ambassadeur israélien faire ses valises, lorsqu’on a
avait appris que les assassins israéliens du Mossad étaient équipés de
faux passeports NZ.
La motion a été mise sur la table à nouveau. Netanyahou a appelé
Poutine à la rescousse. Poutine a été très amical et il a promis de voir
ce qu’il pouvait faire. L’homme de la Russie à l’Onu, Vitally Churkin, a
bien tenté de retarder le vote jusqu’après Noël, ou après
l’installation de Trump, mais personne d’autre ne l’a suivi. Il a donc
voté pour la motion.
Il ne pouvait rien faire d’autre ; en tant que membre du quartet, la
Russie constitue un soutien solide et généreux pour la Palestine, c’est
un protecteur historique des Palestiniens. Jusqu’à une date récente, la
Russie ne reconnaissait pas les conquêtes israéliennes de 1948, et cela
inclut Jérusalem Ouest. Sur les cartes russes, les frontières d’Israël
sont celles du projet de partition de 1947, avec ses lignes de
démarcation, 7000 km2 de moins que n’en fixait la Ligne verte de 1949.
Les israéliens ont sous-estimé la fibre morale et religieuse russe.
La veille, le représentant israélien s’était tenu à l’écart lors du
vote sur la Syrie à l’Assemblée générale de l’Onu, pour faire plaisir à
Poutine. Netanyahou s’attendait donc à un renvoi d’ascenseur. Mais
Poutine a préféré ne pas mettre en danger sa réputation bien méritée et
durement gagnée de protecteur de la Palestine et de la Syrie. Le
président russe est quelqu’un de rationnel. Il veut l’amitié avec
Israël pour plusieurs raisons, mais pas à n’importe quel prix ; il n’est
pas Sissi, mais pas non plus Sissi l’impératrice. Tandis que Netanyahou
n’a pas hésité à bombarder l’aéroport de Damas et des unités de l’armée
syrienne, les alliés de la Russie. Poutine n’a pas riposté, mais n’a pas
oublié.
Maintenant Netanyahou est hystérique; il menace le monde entier d’une
guerre diplomatique et il attaque l’Autorité palestinienne. Dans un
accès de frénésie, il a convoqué les ambassadeurs des États membres du
Conseil de sécurité au ministère des Affaires étrangères le jour de
Noël, comme si le monde était en guerre. Il n’avait pas encore compris
qu’il avait perdu. Israël et sa politique envers les Palestiniens sont
détestés par le monde entier, parce qu’ils sont arrogants et déloyaux,
c’est tout.
Netanyahou espère que Trump va remettre tout ça dans les rails qui
lui conviennent, mais j’en doute. Pour le moment, Trump considère qu’il a
besoin de soutien juif, mais une fois en place… il va voir que le prix à
payer est trop élevé. Trump va probablement faire comme Poutine : jouer
l’amitié, mais sans perdre de vue ses propres intérêts.
Et Obama, qui en a vraiment assez, a encore une autre fenêtre de tir,
car le 15 janvier, le programme français devrait internationaliser les
négociations de paix. Ce qui est un danger considérable pour Netanyahou
et son extrême droite.
Il s’avère que les juifs ont grandement surestimé leur poids et leur
force de frappe réelle. Ils ont fini par croire aux Protocoles [4], à en
faire leur charte pour l’exercice du pouvoir, alors que ce n’était
qu’une fable. Et ce genre d’histoires a sa durée de vie propre, et une
date de péremption.
Article orginal: http://www.unz.com/ishamir/christmas-surprise/
Traduction : Maria Poumier
Source: http://plumenclume.org/blog/205-surprise-de-noel