Le 17 décembre 2010, Mohamed
Bouazizi, vendeur ambulant de fruits et légumes sur brouette, s’immolait par le
feu à Sidi Bouzid, ville agricole et pauvre du centre de la Tunisie. Frustré de
voir la police municipale confisquer, pour la énième fois, sa brouette, pour
stationnement gênant, il s’asperge d’essence et craque une allumette. Ce fut le
début d’une série d’émeutes dans toutes les villes tunisiennes,
ayant abouti au départ, le 14/01/2011, de Ben Ali, ex grand ami de l’Occident,
vers un exil doré en Arabie Saoudite, grande amie de l’Occident aussi, et parangon
de la démocratie et des droits de l’homme arabo-musulman (et pas de la femme). Désabusés et découragés, les Tunisiens ont rebaptisé la "révolution de jasmin" en "révolution de la brouette".
D’ailleurs, dès 2011, il y a eu, à Hammamet, une exposition
des artistes peintres d'Hammamet intitulée « Les 14 brouettes de la
révolution ».
La brouette de la mort de la Tunisie. Voici le Tunistan, repère des mafias islamistes |
Contrairement à ce que l’on croit, la brouette n’est pas un
instrument secondaire. Elle a facilité, durant des siècles et très
largement, l’agriculture et les grands travaux d’utilité publique. Bien plus,
elle est restée, jusqu’à nos jours, beaucoup plus que d’autres, un instrument
indispensable que l’on voit dans toutes les campagnes, que l’on rencontre dans
tous les chantiers, et dans les jardins des maisons.
En Tunisie, où elle a été le principal outil de la
«révolution», elle est devenue la vedette, l’icône, l’outil
indispensable à chaque chômeur tunisien, diplômé ou non, qui veut survivre. Du temps de Ben Ali,
il n’avait que la brouette. La « révolution » a élargi son
choix : la brouette ou le djihad. En cas de survie , et après avoir décapité suffisamment de Syrien(ne)s, le djihadiste est ensuite exfiltré par la Turquie (supervisée par l'OTAN) pour s'installer en Europe, en attendant d'autres missions éventuelles. Ma cabane au Canada
Dans une déclaration accordée à la radio tunisienne Mosaïque FM, l’ambassadrice du Canada en Tunisie, Carol Mc Queen, a déclaré le 14/01/2016, que la famille des Bouazizi, au complet, s’est installée légalement au Canada. Elle a ajouté qu’elle ignore la voie que cette famille a utilisée pour y arriver, sachant que le Canada n’accepte l’installation définitive qu’à ceux dont le portefeuille est bien garni. D’où vient donc l’argent des Bouazizi, réputés pauvres et démunis ? Du Qatar ou d’Arabie ? Des USA ou des Frères Musulmans ? On ne le sait pas encore, mais beaucoup de Tunisiens se posent la question.La "révolution" et ses séquelles
L’auto immolation par le feu de Bouazizi avait
subitement déclenché des jacqueries à travers toutes les villes et les
campagnes. C’était comme si des groupes organisés et bien encadrés
n’attendaient qu’un signal pour s’attaquer simultanément aux postes de
police et de gendarmerie, pendant que d’autres défonçaient, à coup de bulldozer
et de barres de fer les devantures des banques et des bureaux de poste pour les
dévaliser. Les grandes surfaces commerciales, les magasins d’électroménager, et
toutes sortes de boutiques ont subi le même sort.
Le chômage de masse et le déséquilibre régional,
que de savants analystes ont jugé responsables des révoltes, se sont aggravés
de nos jours. Les gouvernements qui se sont succédés depuis janvier 2011, sont
à dominante ou à coloration islamiste, tendance arabo-qatarie, ce qui n'est pas
un gage de liberté ou de démocratie. Leur seule solution (non officielle mais patente)
pour résoudre le problème des jeunes chômeurs, c’est le djihad ou
l’émigration sauvage (voir l'exemple ci-dessous). Des mosquées, des « associations caritatives »,
des écoles coraniques, et diverses officines semi clandestines, semi
officielles, recrutent garçons et filles pour les envoyer en tant que
mercenaires, respectivement pour le djihad armé et le djihad sexuel. Toutes ces organisations et filières sont financées par les
promoteurs habituels du terrorisme que sont l’Arabie et le Qatar.
L’insécurité, les trafics en tous
genre (drogues, êtres humains, armes, etc.) et le terrorisme se sont
banalisés. Le tourisme est à l’agonie. Cependant, les oligarques de la finance et de la
classe politique se portent bien, merci.
Le commerce informel, qui était l’exception sous
Ben Ali, est devenu la règle. Plusieurs jours par semaine, dans mon quartier, rues et trottoirs sont envahis de brouettes
et d’étalages de fortune, qui rappellent plus des camps de réfugiés que des
villes normales.
De la charrette aux voitures de luxe
Sur ces deux photos prises en Allemagne et en Tunisie, on perçoit la
dimension palpable du gain et de la célébrité que connaissent certains «
cheikhs », malgré l’extrémisme de leurs pensées. Béchir Ben Hassen est
une de ces figures illustrant la montée des islamistes extrémistes,grâce un contexte occidental qui leur est favorable, mais qui devient nauséabond pour les vrais musulmans.
Dans un post Facebook, le cheikh Ben Hassen remercie Allah « qui lui a permis de monter dans pareille voiture [NDLR : Une Maybach] après avoir déambulé dans la « jungle » tunisienne en charrette ». Quand l’islamisme devient fonds de commerce, le gain est à l’image des sommes dépensées pour sa propagation. Bourguiba avait dit : "Méfiez-vous des commerçants de la religion". La masse inculte des Tunisiens ne l'a pas écouté et a voté pour "Allah et son Prophète". Ces Tunisiens l'ont eu dans le baba.
Dans un post Facebook, le cheikh Ben Hassen remercie Allah « qui lui a permis de monter dans pareille voiture [NDLR : Une Maybach] après avoir déambulé dans la « jungle » tunisienne en charrette ». Quand l’islamisme devient fonds de commerce, le gain est à l’image des sommes dépensées pour sa propagation. Bourguiba avait dit : "Méfiez-vous des commerçants de la religion". La masse inculte des Tunisiens ne l'a pas écouté et a voté pour "Allah et son Prophète". Ces Tunisiens l'ont eu dans le baba.
Exemple1 : La fin des commerçants de Sidi Bou Saïd (par Rym Haddad)
On n’entend que le son de la radio provenant du café déserté.
Les rideaux sont baissés, les chats déambulent parmi les silhouettes
d’une poignée de vendeurs perdus dans le vide de leurs boutiques. Les
traits tirés, les bras ballants, un sourire mécanique se dessine sur
leur visage à la vue d’un potentiel client qui n’arrive pas.
Voici Omar, 39 ans, que je rencontre en
premier. Il m’invite dans sa boutique, pour jeter un coup d’œil
rapide. Pas la peine d’acheter, me dit-il. Omar a les yeux vifs et
malicieux, un discours bien rodé et un gros ras le bol. Les larmes lui
montent aux yeux en prononçant les mots « attentat, Sousse et
terrorisme ». Il n’est devenu que le simple gardien de ses babioles ;
quelques colliers et souvenirs.
Ça fait 25 ans que je travaille dans ce secteur. J’employais trois personnes. Je gagnais de l’argent grâce aux croisières. Les (touristes) européens venaient et payaient en Euros. On avait nos 300 /500 euros par jour. Aujourd’hui, je n’ai pas de quoi diner. Je marche vers chez moi sans savoir comment je vais me débrouiller… Dieu est bon et n’abandonne personne.
On fait le tour de l’endroit où se
trouvent les échoppes. Des échoppes construites et délivrées gratuitement à l’époque de Ben Ali par
la municipalité. Il y a 150 échoppes, 50 ont fermé, sachant que chacune
d’entre elles employait deux à trois personnes, ce qui fait à peu prés
plus de cent familles privées de revenus.
Je ne me suis pas marié. J’ai annulé par manque de moyens. 39 ans et célibataire, c’est plus insoutenable que la pauvreté. Ces deux-là, tout en indiquant deux échoppes fermées, ils ont pris le risque d’aller en Italie. Zomayti 27 ans et Mohamed, 29 ans. Aucune nouvelle d’eux. Espérons qu’ils ne soient pas morts. Certains ont pu se faufiler avec les réfugiés en Europe. Ils sont partis vers la Turquie, la Syrie (djihad) puis vers l’Allemagne et l’Autriche (dans les flots de réfugiés)… ah voilà Tijéni.
Tijéni a un pied bot mais n’a pas de
béquilles. Portant un survêtement gris et un bonnet, il se dirige vers
Omar et sans que j’insiste, il commence à raconter son histoire.
« J’ai travaillé dans ce secteur
pendant plus de 20 ans. J’ai fermé mon échoppe, elle est vide.
Maintenant, je suis gardien de parking. Voici ma carte d’handicapé
numéro 116536262. J’habite à la zawouia (le mausolée) de Sidi Bou Said. C’est
l’association Basma qui nous y a logés, moi et ma femme. En voyant les
premières images des attentats de Sousse, j’ai pleuré sans m’en rendre
compte. J’avais compris que c’était le coup qui allait nous être fatal.»
Omar : « La situation de Tijéni est
beaucoup plus alarmante que la mienne parce qu’il n’a pas de maison et
qu’il est malade. Aux premières élections, des membres du parti Nahdha (Frères Musulmans)
sont venus le chercher en voiture. Ils l’ont emmené prendre un café,
l’ont convaincu de voter pour eux. Il y a cru. Ensuite, il a voté Nidaa (pseudo laïque, mais proche des Frères Musulmans avec lesquels il partage aujourd'hui le pouvoir et ses prébendes)
parce qu’il y a cru aussi. Il n’y a pas un responsable à qui il ne s’est
pas adressé pour sortir du gouffre. »
Tijéni : « Même Béji Caïd Essebsi
(ex Président de Nidaa et actuel président de la République) est venu. Tout le monde est venu. Le seul qui ne vient plus c’est
Mohamed Ennaceur (Ministre des Affaires Sociales). Avant, c'était par ici, son trajet quotidien. Il a peur qu’on l’embête
avec nos problèmes. Que voulez-vous ? Tout change dans ce pays, même
entre commerçants c’est tendu. Chacun fait ce qu’il peut. »
Un homme descend de sa BMW immatriculée en Italie, bague en or au petit doigt, costume, cheveux gominés, lunettes fumées. [Note d'H.G. : le portrait du trafiquant classique, et éventuellement agent des Frérots].
Omar : « Lui, c’est un ami qui vit en Suisse. Il vient nous donner de l’argent pour nous aider– sourire gêné- il y a des gens qui sont très généreux avec nous. »
Qui est cet homme, qui propose à Omar
d’aller boire un verre dans un endroit huppé de Gammarth ? On ne le
saura jamais. Tout comme on ne saura jamais qui est Omar, ce jeune homme
qui cherche à se distinguer du rang des démunis mais avoue tout de même
ne pas avoir de quoi manger. Il souligne sans cesse qu’il n’est pas
comme eux. Eux, les pauvres du coin.
Nous allons chez Tijéni. Il grimpe la
pente de Sidi Bou une énième fois en pestant, usé par le trajet. Puis
l’escalier de la Zaouia. Des chats le suivent. Il ouvre une petite porte
bleue au milieu de la cour. On découvre une chambre minuscule et à
l’intérieur, Souad, sa femme.
Souad est née en 1984, à Kasserine. Elle
n’a connu que la pauvreté. Cette pauvreté qui l’a dissuadée d’avoir des
enfants. Comment les nourrir? Comment les loger et les éduquer?
Souad, c’est aussi un regard triste et des larmes prêtes à jaillir à tout moment.
“Ce qui me rend malade, c’est le
manque d’espace, l’éttouffement. Je ne supporte plus ces murs. Je ne
veux plus ranger cette chambre. Est-ce que on décore une prison ? Non.”
Sur les murs, des cadres avec le mot
Allah sont accrochés ici et là. Le salut ultime en l’absence de
solutions tangibles. Il ne reste qu’a souhaiter, prier.
“Tijéni vous a dit qu’il voulait
partir en France clandestinement ? Vu son état, il risque de mourir . Et
moi je ne veux pas le suivre, je ne veux pas mourir en mer et je ne
veux pas qu’il m’abandonne ici. Qui va me protéger s’il part? J’essaye
de le dissuader mais il ne veut rien entendre. Il dit qu’il n’est pas
mieux que ceux qui sont morts et qui avaient toute la vie devant eux.”
Tijéni: “ Je le pense encore. Si je trouve comment, je pars. J’ai une cousine à Marseille qui pourra m’aider. ”
Souad l’interrompt: “L’avenir est
sombre, certes, mais à deux il est plus supportable. On doit patienter,
rester forts. On étouffe mais on n’est pas morts non plus. Une maison,
un travail, et c’est réglé. Je suis femme de ménage, mais souvent, il
n’y a pas vraiment de travail. ”
Souad est désespérée malgré sa sagesse.
Elle subit sa situation sans se révolter contre le courant de la vie qui
l’emporte depuis son enfance. Tijéni se bat avec les moyens du bord:
des papiers, des plaintes, des demandes au maire, des opinions
politiques mal structurées, des accusations et la nostalgie d’un commerce florissant.
Tout se mélange dans ce monde de commerçants : politique, voyages clandestins, mensonges, discours rodés
pour raconter son histoire et celle de Sidi Bou Said.
Hannibal GENSERIC