mercredi 20 novembre 2019

Une guerre avec l’Iran serait désastreuse et extrêmement coûteuse – Par William Hartung


Dans un nouvel article paru dans le New York Times, les auteurs Ronen Bergman et Mark Mazzetti ont exposé un effort de longue date du gouvernement Netanyahou en Israël et de ses alliés à Washington pour encourager une guerre contre l’Iran. L’article est un rappel du fait qu’une telle guerre reste une possibilité réelle et que cela devrait susciter un débat plus poussé sur le caractère désastreux d’un tel conflit.

La politique affichée de l’administration Trump à l’égard de l’Iran est celle d’une « pression maximale », centrée sur les efforts visant à étrangler l’économie iranienne par des sanctions économiques agressives. Mais les responsables de l’administration, en particulier le secrétaire d’État Mike Pompeo et le conseiller à la sécurité nationale John Bolton, ont menacé d’engager une action militaire en réponse à toute attaque qui aurait des répercussions sur les forces américaines, qu’elle soit menée par l’Iran ou l’un de ses mandataires présumés dans la région – une menace fondée sur le postulat erroné qui veut que l’Iran contrôle fermement toutes les actions entreprises par des forces qu’il a aidées d’une manière ou d’une autre, des milices chiites en Irak aux rebelles Houthi au Yémen. La position de Pompeo fournit un large mandat qui pourrait facilement conduire les États-Unis à entrer en guerre contre l’Iran, même en cas d’incident mineur.
Comme c’est souvent le cas, le président Trump a été plus erratique dans ses déclarations sur le sujet, qu’il s’agisse de menacer de recourir à la force ou d’appeler à des négociations avec les dirigeants iraniens. La perception générale en est que Trump est moins enthousiaste à l’idée d’attaquer l’Iran, en partie parce qu’il ne veut pas être tenu responsable d’avoir déclenché une nouvelle guerre au Moyen-Orient à l’approche des élections de 2020. Après tout, c’est la même personne qui a fait campagne en affirmant que la guerre en Irak est un désastre et que les milliards de dollars que les États-Unis ont dépensés pour leurs guerres après le 11 septembre auraient pu être mieux utilisés pour reconstruire les États-Unis.
Mais Trump pourrait facilement passer en mode attaque, soit en réponse à l’insistance de ses conseillers plus faucons que lui ou à une réaction excessive aux développements dans la région.
La campagne de pression maximale est déjà assez nocive – elle ne changera probablement pas le comportement iranien, et elle fait monter des tensions qui pourraient facilement devenir incontrôlables. Comme l’a fait remarquer Suzanne Maloney, spécialiste de l’Iran à la Brookings Institution, « les tactiques belliqueuses et va-t-en-guerre de l’administration pour traiter avec l’Iran vont fondamentalement à l’encontre de l’insistance du président à sortir les États-Unis de conflits militaires coûteux et prolongés ».
Une meilleure solution serait de revenir à l’accord nucléaire iranien et de rechercher une détente qui diminuerait la probabilité de la poursuite du conflit dans la région plutôt que de l’amplifier. Mais il se peut que cette option doive attendre une nouvelle administration. En attendant, comme l’a affirmé Ali Vaez de l’International Crisis Group, une guerre avec l’Iran « ferait passer les conflits afghan et irakien pour une promenade de santé ».
Les conséquences stratégiques plus larges d’un conflit avec l’Iran ont été bien détaillées ailleurs. Mais il convient de noter qu’une nouvelle guerre aurait aussi d’immenses conséquences économiques et humaines. Les administrations sous-estiment régulièrement le prix des conflits, comme l’a démontré en détail le projet Costs of War de l’Université Brown [Voir USA. Le coût de la guerre planétaire "contre le terrorisme" ]. Leurs études sur les coûts des guerres américaines de l’après-11 septembre ont révélé que les fonds dépensés ou engagés pour ces conflits s’élèvent à 5,9 billions (mille milliards) de dollars, et ce chiffre ne cesse de croître. Pourtant, avant l’invasion de l’Irak par les États-Unis en 2003, les responsables de l’administration Bush prétendaient que cela coûterait entre 50 et 100 milliards de dollars, et non les billions de dollars qu’il a générés en coûts directs et indirects jusqu’ici. Nous pouvons nous attendre à ce que des arguments tout aussi erronés soient présentés si l’administration Trump décide de prendre des mesures militaires contre l’Iran. Les analystes Neta Crawford, Linda Bilmes et Rosella Zeilinsks ont laissé entendre qu’un conflit à grande échelle avec l’Iran pourrait coûter des billions de dollars, un engagement énorme de fonds publics à un moment où les déficits augmentent, où l’économie est en danger et où les investissements publics nécessaires dans les infrastructures, les emplois verts, les soins de santé et l’éducation sont en retard.
Les partisans de la guerre avec l’Iran soutiendront sans aucun doute qu’une action militaire contre l’Iran pourrait entraîner des frappes limitées plutôt qu’un conflit coûteux et à grande échelle. Mais les risques d’escalade par des bombardements ou d’autres attaques contre l’Iran seraient élevés. La guerre est une entreprise incertaine, et l’idée qu’elle peut être facilement contenue une fois qu’un conflit commence est au mieux naïve, et au pire insensée. Il existe de bien meilleures façons de promouvoir la sécurité au Moyen-Orient qu’en risquant un nouveau conflit – il est temps que l’administration Trump s’en rende compte, sous la pression du Congrès et du public.
Source : Forbes, William Hartung, 05-09-2019
Traduit par les lecteurs du site www.les-crises.fr. Traduction librement reproductible en intégralité, en citant la source.
Source : Forbes, William Hartung, 05-09-2019
Je suis analyste pour la défense et je m’occupe de l’économie budgétaire du Pentagone.

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Hannibal GENSÉRIC

 


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