mercredi 26 décembre 2018

Les Persans fétaient déjà Noël depuis 3500 ans avant J.C.


Hadji Firouz, équivalent du Père Noël chrétien, reflète les ressemblances saisissantes des cultures  iranienne et occidentale. Toutes deux ont des liens aux mondes grecs et romains.

A l’occasion du Nouvel an iranien, nous  entendons quelquefois l’œuvre des musiciens résonner dans les rues de Téhéran. La figure noircie de suie, jouant d’un instrument de musique et dansant, le personnage de Hadji Firouz entraine sur son chemin une liesse populaire parmi les Iraniens, qu’ils soient adultes ou enfants.

L’historien arabe Masoudi rapporte l’existence de cette tradition en Irak et en Iran.  Sinouhé, le médecin du pharaon, explique quant à lui que son origine remonte à 3500 avant J.-C.
Il annonce  la venue du printemps. Par conséquent, du retour de la lumière et de la vie, le Noël iranien est célébré en même temps que la fête de Norouz. Elle est considérée comme l’une des plus anciennes fêtes en Iran et dans plusieurs pays du Moyen-Orient.
KHANEH TARAHI KOUDAK (la Maison du dessin des enfants) célèbrent la fête de Hdji Firouz
KHANEH TARAHI KOUDAK (la Maison du dessin des enfants)
célèbrent la fête de Hadji Firouz
Père Noël Iranien, Hadji Firouz, apparait au nouvel an iranien
A l’occasion du Nouvel an iranien, on entend quelquefois le son des musiciens de rue résonner dans les rues de Téhéran pour rendre joyeux les Iraniens. Cette année, au seuil de la nouvelle année, les enfants de Khaneh Tarahi Koudak (la Maison du dessin des enfants), située à Ekbâtân, un quartier de l’ouest de Téhéran, ont rempli les rues de gaité. Ce centre éducatif et artistique, en collaboration avec des musiciens ambulants, a organisé le carnaval d’Hadji Firouz. Léquivalent du Père Noël dans certains pays européens, il annonce l’arrivée du printemps et de la nouvelle année en faisant de la musique et de la peinture.
Les musiciens de rue et KHANEH TARAHI KOUDAK (la Maison du dessin des enfants) célèbrent la fête de Hdji Firouz
Les musiciens de rue et KHANEH TARAHI KOUDAK
(la Maison du dessin des enfants) célèbrent la fête de Hadji Firouz
Considéré comme l’une des plus anciennes fêtes en Iran et dans plusieurs pays du Moyen-Orient, Norouz est fêté depuis longtemps à travers le monde, surtout par les Iraniens qui respectent les traditions. D’après Omar Khayyâm, dans son ouvrage intitulé Norouznameh (littéralement Lettre du Nouvel An), Gayumarth, l’un des rois mythiques de l’Iran, établit la date de Norouz au premier jour du mois de Farvardin (21 mars), jour de son couronnement.
Adultes et enfants lors de la fête de Hadji Firouz
Adultes et enfants lors de la fête de Hadji Firouz
Ce jour est devenu le premier de l’année dans le calendrier iranien. Il avait demandé qu’une fête soit célébrée à cette occasion chaque année. Ainsi, au fil du temps, les traditions autour de la célébration de Norouz se sont développées. Il est aussi relaté que Norouz correspond au jour de l’accession au trône de Djam ou Djamshid, l’empereur pishdadien d’Iran. D’autres sont d’avis que Norouz a sa racine dans le jour de l’avènement au trône de Kay Khosro durant le règne au cours duquel l’Iran est arrivé à son apogée.
Maître du Nouvel An ou Roi du Nouvel An
Parmi les anciennes traditions, la plus intéressante concernant Norouz est le choix du « Maître du Nouvel An » ou « Roi du Nouvel An ». Elle  ressemble à la fête babylonienne de Sacaea sans que l’on sache d’ailleurs qui a emprunté cette tradition à l’autre. Durant la fête organisée avant Norouz, on choisissait une personne comme le roi ou le maître. Pour ce faire, chaque région agissait à sa manière. Parfois c’était par tirage au sort, sous certaines conditions particulières. Quelques fois, le choix se faisait parmi les hommes ordinaires et quelquefois c’était une personne un peu folle qui était désignée.
La nouvelle année débute le jour de Norouz, fixé au 21 mars par le roi mythique Gayumarth. Cette fête s’étale sur treize jours, durant lequel de nombreux symboles sont alors célébré, à l’image du « Père Noël iranien » Hadji Firouz.
Considéré comme un vrai roi, ses ordres devaient être exécutés. Les serviteurs du roi l’accompagnaient dans les rues et les bazars du lever au coucher du soleil. Il pouvait prélever une somme d’argent aux marchands et aux commerçants. Mais à la nuit tombante, si on l’attrapait, on pouvait alors prendre sa revanche sur lui. A la fin du jour, son règne s’achevait.

Que disent les historiens?

Selon Masoudi, l’historien arabe, cette tradition existait en Irak ainsi qu’en Iran. Mais,Sinouhé, le célèbre médecin du pharaon, pensait   que son origine remonte au moins à 3500 ans avant J.-C. A cette époque, en Egypte, des célébrations comparables se déroulaient pendant une période de 13 jours.  Au cours de cette période la personne la plus idiote était choisie comme roi. Il y a, de fait, de nombreuses raisons pouvant expliquer cette tradition. La majorité des adultes considèrent que c’est un moyen de se changer les idées, de se divertir et par là même d’avoir meilleur moral.
Les musiciens de rue célèbrent la fête de Hdji Firouz
Les musiciens de rue célèbrent la fête de Hadji Firouz

Les adultes et les enfants célèbrent ensemble

C’est le moment où les adultes prennent part aux jeux des enfants. Ils peuvent se comporter librement et faire des activités qui ne sont plus de leur âge. La théorie la plus étrange est celle de l’anthropologue James George Frazer. Il affirme qu’autrefois les horoscopistes, les astrologues et les voyants pensaient que le roi terminerait son règne suite à un événement funeste. Donc, il n’était pas possible d’échapper à son destin, à moins que quelqu’un d’autre ne s’assoit sur son trône pendant ces jours précis pour que le malheur le frappe. Cela permettait ensuite, après une durée déterminée, au vrai roi de remonter sur le trône.
Hadji Firouz et le chanteur de Norouz
A la base, Hadji Firouz a la figure noircie avec de la suie, il joue seul en dansant et en chantant et il entraîne petits et grands dans sa liesse à l’occasion du Nouvel An. Il peut jouer d’un instrument de musique lui-même ou se faire accompagner par un musicien. Hadji Firouz peut réciter des poèmes seul ou avec une autre personne qui pose des questions auxquelles il répond.
Quoiqu’il en soit de l’origine de ce personnage, on peut affirmer que son visage teint en noir ne l’empêche pas d’être gai et victorieux, car il n’est pas noir de nature, il est en fait blanc de peau. Ce sont peut-être les vicissitudes de la vie qu’ils l’ont rendu noir. Cependant, il fait bonne contenance face au destin en dansant sur la scène de la vie, il surmonte les difficultés et gagne.
De nos jours, Hadji Firouz est aussi présent au théâtre où il joue plutôt le rôle d’un serviteur noir. Censé amuser son roi ou son maître en faisant des farces subtiles, il critique son maître pour ses erreurs. Ça l’irrite bien sûr. Ce personnage noir de peau apparait aussi dans les spectacles de marionnettes sous le nom de Mobarak et les enfants l’aiment beaucoup.
Son principal compétiteur est le « chanteur de Norouz » qui entonne des chants simples, en dialectes différents selon les régions, dans les quartiers et qui reçoit des cadeaux des habitants. A la nuit tombée, ils cherchent le printemps de tous côtés et ils chantent. Autrefois, les « chanteurs de Norouz » fréquentaient beaucoup les villages situés au nord de l’Iran, mais actuellement ces coutumes disparaissent et tombent dans l’oubli.
La présentation de Hadji Firouz
La présentation de Hadji Firouz
Le festival de Kusa
Les Azéris, eux aussi, à l’occasion du départ de l’hiver et de l’arrivée du printemps, organisent des festivals populaires riches de traditions. Ces festivals sont la preuve que la fête de Norouz n’appartient pas uniquement aux Perses et aux Aryens, bien que son origine soit ancrée dans ces communautés. L’un des spectacles s’intitule « Kusa ». Ce groupe est constitué de musiciens et d’acteurs dont le nombre varie selon les quartiers. Ce sont plutôt les bergers de diverses parties de l’Azerbaïdjan qui dirigent ces représentations.
Le personnage principal, vêtu d’un vêtement de laine et de peau et portant un chapeau sur lequel deux cornes sont dressées, ressemble à un ogre, symbole de l’hiver. L’ogre est en compagnie d’un musicien et d’une autre personne qui dirige le groupe vers les maisons. Ce dernier est chargé d’intercéder en faveur des familles auprès de Kusa et il reçoit des cadeaux. Si les cadeaux ne sont pas suffisants, le personnage principal fait semblant de tomber évanoui et l’entremetteur demande aux familles d’offrir plus de cadeaux. Il les montre à Kusa.
Bien que son origine soit perse et aryenne, la fête de Norouz trouve cependant son écho parmi les nombreux peuples les côtoyant. Par exemple, les Azéris célèbrent eux aussi le départ de l’hiver et la venue du printemps lors des festivals de Kusa.
Le personnage de Kusa
Celui-ci, excité par les cadeaux, s’éveille, vérifie qu’ils lui conviennent et si tel n’est pas le cas, il s’évanouit à nouveau. Enfin, les grands et les petits lancent des boules de neige à Kusa, qui symbolise l’hiver et l’obscurité, afin de l’éloigner pour accueillir le printemps. La raison pour laquelle les gens offrent des cadeaux à Kusa n’est pas très claire. Soit ils les lui offrent comme récompense de la représentation, soit c’est pour se débarrasser de l’ogre de l’hiver ou peut-être les deux ! Certains festivals de Kusa sont plus complexes et ce sont cinq acteurs ou plus qui jouent. Le premier, tenant un bâton à la main, dirige le groupe en dansant.
Deux personnages présente Kusa. Il s’habille en noir et  a des cornes, et symbolise l’ogre de l’hiver. L’autre, vêtu d’un habit blanc, vainc l’ogre, présente  le symbole du printemps. Il y a deux musiciens régionaux et parfois d’autres acteurs les accompagnent. L’acteur le plus important est plutôt un berger qui se déguise en femme en portant des vêtements féminins. Parfois, on casse de la vaisselle usée pour éloigner l’hiver et chasser la mauvaise fortune. On frappe Kusa qui symbolise la neige et le froid, on lui lance des boules de neige et des cailloux. Kusa leur fait des grimaces et il se met en chemin vers les montagnes couvertes de neige pour que Norouz arrive avec le retour du printemps.

Les ressemblances du Père Noël avec Hadji Firouz

Lors d’une interview, un professeur de littérature et iranologue, Mir Jalaleddin Kazzazi, a comparé le Père Noël, symbole important de la fête de Noël, avec Hadji Firouz, l’icône de Norouz. Il en a conclu que Hadji Firouz est l’équivalent du Père Noël dans la culture persane. On sait que les Iraniens et les Européens, ou plus précisément les Grecs et les Romains ont une même culture et une histoire commune.
Issus d’une histoire commune et d’une culture en découlant, les Iraniens et les Européens entretiennent des mythes et des croyances dont les ressemblances sont bien souvent étonnantes. Dans le cas du Père Noël et de Hadji Firouz, la couleur rouge peut représenter le soleil, la chaleur, la lumière et la vie.
D’après le Livre des Rois  de Ferdousi, Fereydoun, un roi iranien mythique, avait partagé son royaume entre ses trois fils, Salm, Tur et Iradj. La partie occidentale fut donnée à Salm, l’est et le nord à Tur et la partie centrale à Iraj. Ce partage suscita l’envie des frères d’Iraj, le fils le plus jeune qui avait hérité de la partie préférée du royaume. En suite ils le tuèrent. Selon la mythologie persane, les Touraniens qui habitaient en Transoxiane sont de la lignée de Tur, les Romains et les Grecs sont issus de Salm et les Iraniens d’Iraj.

Hadji Firouz et Père Noël

C’est pourquoi, dans cette optique, on peut trouver des ressemblances et des liens entre les croyances et les mythes persans et ceux des Européens. Ainsi, dans cette perspective, on peut mettre en balance Hadji Firouz et le Père Noël. Le Père Noël porte un habit rouge et parfois un bonnet blanc, de même Hadji Firouz qu’on peut voir dans les rues en Iran durant les derniers jours de l’année et qui se promène et chante vêtu d’un habit rouge. Mais ce qui le distingue du Père Noël, c’est la teinte noire de son visage.
La couleur rouge est un point commun entre ces deux personnages. Cette couleur peut représenter le soleil, la chaleur, la lumière et la vie. Hadji Firouz se manifeste lorsque les jours sombres et froids se terminent et que les jours lumineux et plus chauds arrivent. Le visage noir d’Hadji Firouz peut être le signe de la nuit. En d’autres termes, la nuit représente l’effacement et la mise en veilleuse du monde, alors que le jour symbolise la résurrection du monde. Le monde qui est plongé dans l’obscurité et le froid est privé de vie, il vit au ralenti. Avec l’arrivée du printemps, le monde s’anime car le soleil brille d’un vif éclat.

Le symbolisme de Noël et de la lumière

D’ailleurs, on peut imaginer que la couleur blanche du visage et du bonnet du Père Noël évoquent la clarté et la lumière. Mais ce qui différencie également ces deux personnages, c’est le moment où ils se manifestent. Comme on l’a déjà mentionné, Hadji Firouz se montre les derniers jours du mois d’Esfand et les premiers jours du mois de Farvardin, alors que le Père Noël se présente au moment de la commémoration de la naissance du Christ. Voici le pourquoi de cette dualité temporelle. C’est la raison pour laquelle le Père Noël se révèle les premiers jours de l’hiver. Il est une figure symbolique qui trouve son origine dans la nuit de Yalda. On considère cette nuit comme le jour de la naissance du soleil.

La fête de Yalda

Car du point de vue sémiotique et mythologique, au cours de cette nuit qui est la nuit la plus longue de l’année, on ressent plus que jamais la nécessité du soleil, de la lumière, du jour et de la chaleur. On dirait que, au cours de cette nuit, le soleil se dévoile. Il naît pour la première fois, il embellit le monde de son éclat et de sa chaleur. Cette nuit la plus longue ressemble à un utérus étroit et sombre dans lequel le soleil se développe.
Célébrée depuis longtemps chez les Iraniens, la nuit de Yalda était la nuit de la naissance du soleil. Autrefois, les Chrétiens l’ont reprise pour la relier à la naissance du Christ. Cela est dû au fait que lorsque les Romains se sont convertis au christianisme. Ils ne parvinrent pas à oublier le mithraïsme auquel ils s’étaient convertis auparavant. Le mithraïsme apparut en Iran à l’époque des Arsacides et s’y répandit.
Le mithraïsme, apparu en Iran à l’époque des Arsacides, s’était rapidement répandu en Occident. Il a connut une grande diffusion dans l’Empire romain. Se révélant durant les premiers jours de l’hiver, le Père Noël devient une figure symbolique. Il trouve son origine dans la nuit de Yalda.

Hadji Firouz en Occident

En peu de temps, il pénétra en Occident. Tout de suite, il a connut une grande diffusion dans l’Empire romain, ce qui étonna les historiens. Certains des empereurs romains s’y convertirent. Un historien et anthropologue français, Joseph Ernest Renan écrit que s’il y avait eu des obstacles à la diffusion du christianisme, actuellement, tous les Chrétiens auraient le mithraïsme comme religion.
Les prêtres chrétiens s’efforcèrent d’éviter que les Romains organisent la fête de la naissance du soleil. Leurs efforts furent vains. Les Romains qui venaient de se convertir organisaient cette célébration dans toute sa splendeur. C’est la raison, en plus du symbolisme chrétien du retour de la lumière lorsque naît Jésus-Christ, pour laquelle les prêtres décidèrent d’allier la fête de la naissance du soleil avec celle de Christ.
 
La fête de la naissance du soleil, appelée aussi la nuit de Yalda en Iran, se déroulait le 21 décembre en Rome antique. Mais à cause de certaines erreurs dans le décompte de l’année bissextile, l’anniversaire de Mithra se trouva déplacé au 25 décembre. Les Chrétiens commémorent désormais la naissance du Christ le 25 décembre.
Dans cette optique, le Père Noël qui se manifeste pendant Noël en Occident, pourrait symboliser le soleil. C’est le  reliquat de cette ancienne fête païenne du soleil, au moment où les Chrétiens célèbrent la naissance de Jésus. L’homologue iranien du Père Noël pourrait donc être Hadji Firouz. L’un des symboles de la fête de Norouz et une fête qui célèbre le soleil et la lumière comme la nuit de Yalda. Norouz a lieu à l’équinoxe de printemps. Le premier jour du mois de Farvardin, au moment où le jour et la nuit sont de même longueur. C’est un jour de bon augure chez les Iraniens.

Mehryar Hakhamanesh



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