mardi 2 juillet 2019

LIBYE. La lutte du Qatar contre l'axe Émirati-Saoudien perpétue la guerre


Pour un petit pays péninsulaire entouré de voisins hostiles, le Qatar résiste contre un axe économique, militaire et diplomatique dirigé par l'Arabie saoudite et les Émirats arabes unis.
Cette lutte à coup de milliards de dollars s’étend un peu partout : au Moyen-Orient, en Europe, au Soudan et surtout en Libye.

Initialement, le Qatar était autrefois un membre estimé du Conseil de coopération du Golfe (CCG), une organisation composée de monarchies du golfe Persique créées en 1981 comme  rempart contre la République islamique d’Iran. Le CCG est une alliance exclusivement arabe composée de l'Arabie saoudite, des Émirats Arabes Unis, du Bahreïn, du Koweït, du Qatar et d'Oman. De ce fait, l'Iran non arabe n'était pas le bienvenu en tant que membre.
Cependant, des fissures entre le Qatar et les Saoudiens ont commencé à apparaître en 1995, lorsque le nouvel émir du Qatar, Cheikh Hamad bin Khalifa al-Thani, a décidé que le Qatar devrait avoir une politique étrangère indépendante de celle des Saoudiens. Une première rupture des relations a eu lieu en 2002, lorsque les Saoudiens ont retiré leur ambassadeur de Doha, la capitale du Qatar, afin de punir le Qatar pour son indépendance. Le Qatar a pu se défendre des Saoudiens en brandissant sa base aérienne Al-Odeid, la plus grande base militaire des États-Unis au Moyen-Orient, abritant le siège régional du commandement central des États-Unis (CENTCOM).
En 2014, une fissure majeure s'est développée au sein du CCG. Le Qatar a été accusé par l'Arabie saoudite, les Émirats arabes unis et Bahreïn de soutenir des groupes tels que les Frères musulmans, le Hamas et le Hezbollah libanais. Après l’investiture du président Donald Trump à Washington, les Saoudiens et les Émiratis, sentant que leurs contributions illégales à la campagne Trump et à l’investiture présidentielle devraient porter leurs fruits, ont décidé de mener une guerre économique et politique drastique contre le Qatar. Au nom des Émirats arabes unis et des Saoudiens, une coalition de lobbyistes dirigée par le coprésident du Comité des finances du parti républicain et ami de Trump, Elliott Broidy, et le conseiller du prince héritier d’Abou Dhabi, George Nader. On a découvert par la suite que l'ambassadeur des Émirats arabes unis à Washington, Yousef Al-Otaïba, travaillait de concert avec la fondation néo-con et la Fondation israélienne liée au lobby juif pour « la défense des démocraties », autrefois connue sous le nom de Projet du nouveau siècle américain (PNAC). – pour susciter la ferveur anti-Qatar au sein du Congrès et de l’administration Trump. Rappelons que le PNAC était le lobby judéo- néocon qui a poussé les États-Unis à faire la guerre à l’Irak.
La seule frontière terrestre du Qatar, sa frontière avec l’Arabie saoudite, a été fermée. Les banques saoudiennes ont refusé de gérer les riyals qataris et les EAU ont coupé le service postal avec le Qatar.
Ironiquement, les Saoudiens et les Émiratis ont accusé le Qatar de soutenir l'État islamique en Irak et au Levant (EIIL ou ISIS), alors qu'en réalité, ISIS recevait davantage de soutien de la part des Saoudiens et des Émiratis que du Qatar.
Sur le front diplomatique, le Qatar continue de soutenir le gouvernement de Fayez al-Sarraj, président du Conseil des présidents libyens, basé à Tripoli, contre les forces du gouvernement Haftar, basé à Tobrouk. Un conflit similaire existe à Khartoum entre le gouvernement militaire soutenu par l'Arabie saoudite qui a succédé au président soudanais Omar al-Bashir après son éviction récente et un bloc d'opposition anti-saoudien/émirati soutenu par le Qatar. Le Qatar mène également une bataille diplomatique d'influence contre les Émirats arabes unis à Madagascar, en Algérie, en Tunisie (le Qatar y finance sans retenue, Ennahdha, les frères musulmans qui y font la pluie et le mauvais temps), au Kenya et en Éthiopie.
En novembre 2017, les Émirats arabes unis ont été largement ridiculisés après que leur chef de la sécurité a demandé à l’axe saoudien-EAU de bombarder le siège d’Al Jazeera à Doha. La dernière personne à avoir appelé à un tel bombardement était le criminel de guerre George W. Bush.
La guerre multi-fronts opposant l’axe Arabie/É.A.U contre le Qatar est en panne depuis 2017. La Turquie, l’Iran et Oman ont contribué à limiter les effets du blocus maritime, terrestre et aérien de cet Axe. Les interdictions saoudienne et émirienne de recevoir des émissions d'Al Jazeera sont inutiles grâce aux antennes paraboliques. Les banques HSBC et Goldman Sachs ont défié les avertissements saoudiens et émiratis de restreindre leurs services financiers avec le Qatar.
De son côté, la Turquie a établi une base militaire au Qatar, ce qui a été interprété comme un avertissement direct aux Saoudiens et aux Émiratis de ne pas penser à une action militaire contre le Qatar. La France a livré 26 avions de chasse Rafale au Qatar malgré les avertissements des Saoudiens à Paris.
Pour souligner le fait que le Qatar est loin d'être vaincu par les Saoudiens, ses lobbyistes à Paris ont fait pression sur la mairie de Paris pour qu'elle nomme une rue de la capitale française du nom de l’éditorialiste du Washington Post, Jamal Khashoggi, qui a été  assassiné et démembrée au consulat général d'Arabie saoudite à Istanbul en octobre 2018. Pour les Qataris, ce serait « un coup de grâce » porté à l'axe saoudien/EAU.
Libye. La Turquie et le Qatar contre l’Axe émirati-Saoudien
"Lorsque le vent et la mer se battent, ce sont les bateaux qui trinquent" Proverbe tunisien
Outre la Syrie, le sinistre «Printemps arabe» d’origine américano-islamiste a entraîné un chaos permanent en Libye, un État riche en pétrole, disputé entre le GNA de Sarraj soutenu par les Frères Musulmans (Turquie Qatar) et l’Armée nationale libyenne (ANL)  de Haftar, soutenu par les Wahhabites, une autre secte islamiste  (Arabie, Saoudite, EAU).
Voulant occuper Tripoli depuis des mois,  l'ancien lieutenant de Kadhafi, le général Haftar, a subi un revers majeur le 27 juin lorsque la Force de protection de Tripoli du GNA s'est emparée du siège de Haftar à Gharyane, forçant l’ANL à adopter une posture défensive.
L’ANL de Haftar tente maintenant de reprendre son ancien siège à Gharyane. Or, le revers de Haftar à Gharyane vient juste après que la Turquie ait fourni des armes de renforcement au GNA de Sarraj, par bateau et par air.
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En vert ; régions contrôlées par Haftar
En jaune : régions contrôlées par Tripoli
La Turquie soutient le GNA en raison de ses transactions pétrolières illégales à Misrata (pétrole offshore). La Turquie achète du pétrole à Misrata avec un rabais important par rapport au prix standard de la compagnie libyenne nationale du pétrole (NOC). Ceci est particulièrement important pour la Turquie, puisque les USA menacent de sanctions la Turquie si elle achète du pétrole iranien.
Alors que Haftar contrôle militairement une grande partie de l’Est, y compris les principaux gisements pétroliers d’El Sharara et d’El-Fil, il est obligé de laisser le produit de la production à la société nationale National Oil Company (NOC). Le produit de ces ventes de pétrole revient toujours à la Banque centrale de Tripoli, qui prétend distribuer équitablement les revenus de pétrole aux deux parties. Mais Haftar n’est pas d’accord avec cette déclaration équitable et a donc tenté de créer une NOC rivale. Il a rencontré peu de succès.
Par conséquent, il est certain que la Turquie sera forcée de payer beaucoup plus cher le pétrole de la NOC, au tarif standard, que le pétrole qu’elle achète illégalement chez les terroristes islamistes (Frères Musulmans)  qui tiennent et rackettent  Misrata. La Turquie a donc tout intérêt à voir le départ de Haftar et de l’ANL loin de Misrata et de Tripoli.
Pour la Turquie, c’est cela le cœur du conflit libyen : acheter du pétrole à prix cassé tout en renforçant les Frères Musulmans. C’est exactement le même jeu qu’elle pratique depuis des années en Syrie.
Contrairement à la Syrie, où les États-Unis ont un allié-chair-à-canons au sein des Kurdes YPG, les États-Unis n’ont aucune présence politique réelle en Libye ni aucun allié préférentiel (puisque les deux forces islamistes en présence sont des alliées des USA). Les USA fournissent donc du matériel militaire aux deux parties, s’assurant ainsi de se ranger de côté du vainqueur le moment venu. Nul doute que la Fédération de Russie considère le vide de pouvoir en Libye comme une opportunité, tandis que les dirigeants des États-Unis se tiennent debout ailleurs.
Bien entendu, la Libye possède d’importantes réserves de pétrole et si la Fédération de Russie parvient à se stabiliser et à soutenir la faction la plus puissante en vue d’une victoire en Libye, ce serait certainement un gouffre géopolitique.
Alors que les dirigeants russes ont soutenu Haftar jusqu'à présent contre Sarraj et le GNA, Haftar est un homme assez âgé et contre lequel la méfiance est grande dans l'ouest de la Libye. Cet article vieux de sept mois postule un soutien potentiel de la Russie à Saïf al Islam dans le cadre d'une candidature au pouvoir libyen.
Personnage controversé, recherché pour être jugé en Libye et par la CPI, Saif al Islam est néanmoins une personnalité charismatique, avec une faction nombreuse - en particulier dans l'ouest de la Libye - qui est disposé à soutenir son parti. Saif al Islam a appelé à des élections nationales depuis le début de 2019, mais les élections ont été retardées en raison de graves affrontements entre les factions politiques libyennes.
Maintenant, avec la perte de Gharayan par l’ANL, la guerre civile en Libye inspirée initialement par les États-Unis et la France, et entretenue  ensuite par les émirs du Golfe, va continuer à faire rage. 

Ce que les pays arabes du golfe Persique devraient apprendre du leader nord-coréen

Source Press.tv
La façon dont le leader nord-coréen traite Donald Trump devrait servir de leçon aux pays arabes du golfe Persique surtout l’Arabie saoudite, écrit le journal Ral ai-Youm.
À la demande du président américain, Donald Trump et Kim Jong-un se sont rencontrés le dimanche 30 juin dans la zone démilitarisée séparant les deux Corées. Le nom de Donald Trump est donc enregistré dans les annales de l’histoire en tant que le premier président des États-Unis à avoir mis les pieds sur le territoire nord-coréen, en franchissant la ligne frontalière qui relie la Corée du Sud à son voisin du Nord. Cette rencontre a eu lieu alors que les deux précédentes rencontres des dirigeants américain et nord-coréen n’ont donné aucun résultat tangible en raison des revendications maximalistes de Donald Trump.
D’après le journal Rai al-Youm, « le fait que le président US a proposé que cette rencontre ait lieu montre que Donald Trump ne respecte que ceux qui l’ont humilié et qui n’ont aucune peur de ses menaces de guerre."
« Ce ne serait pas pour obtenir un désarmement nucléaire de la Corée du Nord que le nom de Donald Trump sera marqué dans l’histoire ; c’est juste parce qu’il est le premier président des États-Unis à avoir mis le pied sur le sol nord-coréen. Il paraît que le leader nord-coréen maîtrise l’art de profiter des points faibles de Donald Trump. Kim sait comment faire : organiser deux sommets avec le président US, sans donner la moindre concession au sujet des revendications de Washington qui exige de Pyongyang qu’il accepte le désarmement nucléaire et mette fin à ses essais de missiles balistiques. »
« Sans abandonner sa vision stratégique reposant sur la dissuasion nucléaire, le leader nord-coréen sait bien choisir ses mots, lorsqu’il parle avec Donald Trump qui est d’ailleurs réputé pour avoir une faible connaissance des relations internationales surtout la donne de l’Asie de l’Est. »
D’après le journal arabophone, le leader nord-coréen Kim Jong-un fournit le modèle idéal à l’Arabie saoudite et à d’autres pays arabes du golfe Persique, pour apprendre comment il faudrait traiter Donald Trump, « celui même qui ne cesse de se moquer des pays arabes, qui leur propose des chantages humiliants afin de leur extorquer des centaines de milliards de dollars, en échange d’une promesse de les protéger face à de prétendus ennemis ».
« Nous savons bien que cette comparaison n’est pas tout à fait exacte ; puisque la Corée du Nord dispose d’armes atomiques et de missiles balistiques malgré les sanctions US, contrairement aux pays arabes du golfe Persique qui malgré leurs immenses revenus dus aux pétrodollars, n’ont obtenu aucun progrès tangible sur le plan défensif, militaire ou scientifique et ne disposent d’aucune arme dissuasive. »
Le leader nord-coréen est comme un « rocher solide » dans son pays, écrit le journal.
« C’est le président américain qui se déplace pour rendre visite au leader nord-coréen et l’inviter à venir à la Maison-Blanche. Trump a l’habitude d’humilier de faibles pays se montrant intéressés par des liens d’amitié avec lui. Par contre, face aux pays puissants qui le méprisent et qui refusent d’accepter ses diktats, Trump finit par plier l’échine », conclut l’article.
Hannibal GENSÉRIC

1 commentaire:

  1. Trump se comporte avec peu de responsabilité , en n'acceptant que de faire plier ses interlocuteurs amis (UE et Japon) ou ennemis potentiels ( Russie-Chine- Iran , et même un peu la Turquie d'Erdogan!). Qui peut vraiment le prendre au sérieux alors qu'il vient de dénoncer tous les accords signés par ses prédécesseurs!?Il est clair qu'il ne croit qu'à la loi du + fort, celle de la jungle , qui , croit il, lui permettait " d'encaisser le beurre , l'argent du beurre et le c.. de la fermière"! S'il recherchait vraiment la paix , qu'il commence à œuvrer pour un désarmement général , à entreprendre au MO, incluant Israël, seule menace pour la paix mondiale!

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