dimanche 23 mars 2025

Un peu de géographie

Si les États-Unis sont assez stupides pour déclencher une grande guerre contre l'Iran... la géographie restera le dieu invincible de la guerre.

Les États-Unis envoient donc le Carrier Strike Group One (CVN-70 USS Carl Vinson) au Moyen-Orient, laissant le CSG-5 (CVN-73 USS George Washington) “monter la garde” dans le Pacifique occidental depuis les abords relativement sûrs de son port d'attache quasi permanent à Yokosuka, au Japon.

Tout ce que fait le USS GeorgeWashington, c'est naviguer entre San Diego et Yokosuka de temps en temps pour donner l'impression qu'il fait quelque chose d'utile. Sinon, je n'ai vu aucun signe depuis plusieurs années qu'il soit autre chose qu'un navire d'entraînement et de parade.

Quoi qu'il en soit, le USS Carl Vinson se dirige vers la mer d'Oman, et peut-être au-delà. (Cela reste à voir.)

Pendant ce temps, le déploiement du CSG-8 (CVN-75 USS Trembling Puppy) a été prolongé, alors même qu'il est bloqué dans les confins septentrionaux de la mer Rouge, lançant des frappes aériennes sur le Yémen à environ 1 000 km de distance, avec des avions ravitailleurs de l'USAF prêts à intervenir si nécessaire.

Les Yéménites ont lancé quelques modestes séries de drones et de missiles de croisière antinavires en direction du Trembling Puppy, proies relativement faciles pour le croiseur, les destroyers et la patrouille aérienne de combat.

Mais, gardez à l'esprit que même si ces drones et missiles yéménites, même lents et vieillots, ont peu de chances de faire mouche à 1 000 km de distance, les navires et les avions du groupe aéronaval doivent tout de même tirer sur chacun d'entre eux !

Ainsi, chaque série de frappes yéménites d'une vingtaine de missiles épuisera les stocks de munitions du CSG-8 d'au moins l'équivalent en missiles de défense aérienne, voire bientôt le double, selon la pratique standard consistant à tirer deux missiles intercepteurs à chaque menace.

Les stocks du CSG-8 ont déjà été considérablement réduits au cours des deux dernières semaines - sans oublier que la marine américaine ne peut pas réapprovisionner ses systèmes de lancement vertical en mer.

Et, bien sûr, si les opérations militaires contre l'Iran sont l'objectif ultime, alors à un moment donné, l’USS Trembling Puppy et toute son escorte devront quitter les eaux tranquilles entre Djeddah et le golfe de Suez, et affronter les dangers de la Porte des Lamentations (Bab el-Mandeb).



La Porte des Lamentations (Bab el-Mandeb)

C'est là que les choses peuvent devenir intéressantes. Parce que le passage est assez étroit. Un gros porte-avions à grand tirant d'eau ne peut pas simplement foncer à toute vitesse en zigzaguant. Il doit rester dans le chenal navigable.



Canaux de navigation navigables dans le détroit de Bab el-Mandeb

Dans les eaux relativement dégagées au nord de Djeddah, les manœuvres sont assez simples. Mais dans le détroit, on est confiné dans cette étroite bande et, surtout, les sites de lancement de missiles yéménites potentiels ne sont plus qu'à environ 200 km. Des frappes plus massives, avec une cinquantaine de drones, des missiles de croisière antinavires, des missiles balistiques antinavires, des attaques de bateaux rapides et de drones de surface, atteindraient leur cible beaucoup plus vite et auraient de bien meilleures chances de faire mouche.

Ainsi, même si les chances de l’USS Trembling Puppy de traverser indemne restent probablement assez bonnes, le risque est incontestablement beaucoup plus élevé que s'il se cachait à l'embouchure du golfe de Suez.

Mais supposons qu'ils traversent le détroit de Bab el-Mandeb sans trop de difficultés... Et ensuite ? Ils rejoignent l’USS Carl Vinson en mer d'Oman et tentent des frappes longue portée dans le sud de l'Iran, frappes qui nécessiteraient tout de même un ravitaillement en vol pour avoir une portée significative ?

Parce que la marine américaine n'enverra certainement pas deux groupes aéronavals dans le golfe Persique. Et quiconque croit le contraire se berce d'illusions. Il suffit de regarder cette bonne vieille carte ! Les Iraniens contrôlent parfaitement le passage du golfe d'Oman, du détroit d'Ormuz et de tout le golfe Persique.



Détroit d'Ormuz / Golfe Persique

Je me demande vraiment ce que deux escadrons de porte-avions de la marine américaine vont bien pouvoir faire dans le contexte d'une guerre sans merci contre l'Iran.

Pour moi, le concept tout entier illustre bien l'arrogance de ceux qui foncent tête baissée vers la catastrophe.

Si les États-Unis sont assez imprudents pour déclencher une grande guerre contre l'Iran, alors 2025 démontrera sans doute une fois de plus que, combinée à la puissance de feu, la géographie reste bien le dieu indomptable de la guerre.

Par William Schryver pour imetatronink, le 22 mars 2025

 

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