Les agressions
de la Chine déstabilisent ses voisins dans la mer de Chine méridionale. La
Chine ne cesse de tricher dans le commerce mondial. Le marché boursier de
la Chine est un piège pour les investisseurs. La dévaluation du yuan est un
sale tour. La Chine est en train d’imploser. Le Président Xi Jinping n’a plus
aucune crédibilité. Et la Chine est une menace majeure parce que le Pentagone
nous le dit.
Peu importe.
C’est le
moment pour donner la réplique et éclaircir le ciel bleu au-dessus de
Pékin – fabriqué avec une bonne dose de volonté politique. Beaucoup de
jouets étincelants – aériens et terrestres. Des invités venus de partout
dans le monde (en l’absence prévisible des habituels suspects occidentaux. Un
extraordinaire spectacle pour la télé éclipsant la cérémonie des Oscars
(pas de discours larmoyants!). Qu’est-ce qu’on pourrait ne pas aimer dans tout
cela?
Et puis, il
était là, pavanant avec sa substance létale sur le podium de Tiananmen :
le Dongfeng-21D. Un sensationnel missile balistique anti-navires basé sur
terre, capable de détruire, en une seule frappe, ces
imposants porte-avions valant plusieurs milliards de dollars.
Pas étonnant
que le défilé de la Chine pour célébrer la fin de la Seconde Guerre mondiale
doive être diabolisé dans l’oubli.
Les missiles balistiques DF-21D, capables de couler un
porte-avion américain de classe Nimitz avec une seule frappe, au cours du défilé commémorant le 70e anniversaire de la capitulation du Japon AP |
Le spectacle
de la Chine, intitulé Dites- bonjour à mes nouveaux joujoux avait beaucoup
d’autres stars. Le DF-5B – un ICBM [missile balistique intercontinental]
conçu pour transporter des ogives nucléaires. Le DF-26 gamme intermédiaire de
missile balistique (IRBM), alias le Guam Killer, capable de faire des ravages
sur les fameuses bases américaines dans l’océan Pacifique. Le HQ-9,
troisième génération de missiles sol-air du système chinois. Beaucoup de
drones cool. Voici
un aperçu des plus grands succès et de quelques manques tels que le
J-31, la génération de chasseur de combat furtif de la Chine.
Le scénario
inclut des dialogues inestimables.
Comme quand Xi Jinping zoome
vers les troupes, en criant «Bonjour camarades! Vous avez travaillé dur!»
– et la réponse ,à l’unisson: «Leader, bonjour! Nous servons
le peuple!»
Aucune
garde-robe ne manque, alors que la femme de Xi, la reine glamour Peng Liyuan
est une fois de plus brocardée, avec un tsunami d’acheteurs en ligne
instantanément capables de se jeter sur sa tenue rouge d’enfer –
spéciale défilé – sur le site internet Taobao, la réponse de la
Chine à eBay.
Et puis il y
avait des rangées et des rangées de soldats impeccablement alignés saluant
Xi d’un : «Suivez le Parti! Battez-vous pour gagner! Montrez
une conduite exemplaire!» Le genre de conduite exemplaire qui sera
appliquée à 300.000 de leurs collègues qui seront bientôt démobilisés, car Xi réorganise
l’armée populaire.
La réduction
des effectifs au profit de l’allocation égale des ressources à l’armée de
terre, la marine et la force aérienne fait partie de la manière
centralisée de gouverner propre à Xi; de même qu’il conduit pas moins de huit
comités d’élaboration des politiques à très haut niveau, de la réforme
militaire à la cyber-sécurité, en passant par la politique financière à
court terme et la planification macro-économique.
Xi contre Reuters
La parade
V-Day de la Chine a célébré «le 70e anniversaire de la victoire de la Chine
dans la guerre de Résistance à l’agression japonaise».
On pouvait
s’y attendre: aucun des réseaux de télévision du Japon – NHK inclus – n’a
montré la parade en direct. Le premier ministre japonais, Shinzo Abe,
a snobé l’invitation officielle – en ligne avec la Maison Blanche et
ce que le Département d’État a ordonné aux laquais européens. J’ai
déjà examiné ailleurs comment
les bouderies puériles de l’Ouest essaient de se faire passer
pour de la diplomatie.
Le Quotidien
du Peuple n’était pas loin du compte quand il a souligné que la parade «donnera
au peuple chinois l’occasion de se remémorer les leçons inestimables que
l’histoire enseigne et servira de formidable coup de fouet à la confiance
de 1,3 milliard de personnes dans l’avenir du pays».
Ce fut une
manière tout à fait chinoise de laisser entendre que ce qui est arrivé il y a
quelques décennies, dans le cadre du siècle de l’humiliation, quand la Chine
était faible et divisée, ne se reproduira pas. Et ces brillants jouets existent
à cet effet.
Ce que Xi a
déclaré est encore plus crucial : «Cette guerre a fait plus de 100
millions de victimes militaires et civiles. La Chine a subi plus de 35 millions
de victimes et l’Union soviétique a perdu plus de 27 millions de vies. La
guerre est comme un miroir. En regardant, cela nous aide à mieux comprendre la
valeur de la paix.»
Une fois de
plus, d’une manière très chinoise, Xi n’a pas eu à insister sur le fait que
seuls les atlantistes sont autorisés à célébrer la victoire sur le fascisme et
le nazisme. Lorsque la Russie organise une parade – comme celle du 9 mai
dernier à Moscou – ou que la Chine fait la même chose ce jeudi à Pékin,
ils sont stigmatisés comme militaristes, nationalistes, ou simplement une
menace.
Xi a
également déclaré que le monde d’aujourd’hui a grand besoin d’un sens de la
communauté mondiale, de respect mutuel et de prospérité. Allez dire cela aux exceptionnalistes.
Il a souligné que la Chine restera engagée dans un développement
pacifique – c’était la devise officielle de celle-ci avant que Xi ne vienne
avec son propre Chinese Dream. Et une fois de plus, il a précisé: «La
Chine ne cherchera jamais l’hégémonie ou l’expansion. Elle n’infligera
jamais, à aucune nation, les souffrances qu’elle a subies dans
le passé.»
Peut-être
que le dirigeant du pays-qui-sera-bientôt-au-top de l’économie mondiale a…
menti ? Ces douces paroles masquaient-elles une menace? À ce propos,
laissez à Reuters le soin d’éclairer l’ensemble de la planète : «Pour Xi,
la parade est une distraction bienvenue après la plongée des marchés
boursiers du pays, le ralentissement de l’économie et les explosions récentes
dans un entrepôt de produits chimiques qui ont tué au moins 160
personnes.»
Les chiens
de la peur, de l’envie et du ressentiment aboyaient, sans surprise,
lorsque passait la glorieuse parade de la victoire chinoise.
Par Pepe Escobar
– Le 3 septembre 2015 – Source AsiaTimes
Titre original : Dites bonjour aux nouveaux joujoux de la Chine
Traduit par jj, relu par Diane pour Le
Saker francophone