Depuis quelques mois, le bruit courrait que Seif el-Islam Kadhafi – fils ainé de l’ancien Guide libyen
- avait été libéré par les tribus berbères qui l’ont capturé en
novembre 2011, et qu’il se déplace librement dans Zenten, une ville
dépendant du « gouvernement» dit de Tobrouk.
Selon le site bien informé Mondafrique, il est non seulement libre de ses mouvements, mais a été élu le 14 septembre dernier représentant officiel du Conseil suprême des tribus libyennes.
Seif el-Islam Kadhafi |
Mauvaises nouvelles, si c'est confirmé, pour les gouvernements fantômes libyens (Tripoli et Tobrouk)…
et pour Nicolas Sarkozy, toujours soupçonné d’avoir financé sa campagne
électorale présidentielle de 2007 avec de l’argent libyen !
Le Forum national des tribus libyennes qui existait du temps de Mouammar Kadhafi – et qui s’est opposé avec force à l’intervention militaire lancée par Sarkozy - était composé de représentants d’environ 2000 tribus et clans, ainsi que de notables. Même si le Conseil suprême des tribus actuel compte moins de membres, cela donne une idée du poids politique des tribus en Libye, ignoré à dessein et à tort par la "communauté internationale".
Seif el-Islam a été condamné à mort par contumace en juillet dernier lors d’un procès spectacle fabriqué par le régime de Tripoli. La Cour pénale internationale (CPI) le soupçonne de « crimes contre l'humanité » et veut le juger à La Haye, alors qu'elle devrait juger Sarkozy et BHL ... Elle peut toujours attendre...
Aïcha Kadhafi, sa sœur, réfugiée à Oman – après avoir été priée de quitter l’Algérie
– envisage de s’installer en Afrique du sud ou au Zimbabwe, où elle
espère être mieux traitée et avoir plus de libertés de mouvements. Encore une fois, on voit que la notion d'arabo-musulman couvrant un "monde arabe" est un concept fantasmagorique : les réfugiés "arabo-musulmans" ne sont jamais accueilli par d'autres "arabo-musulmans", parce que ces derniers n'existent qu'en Arabie et au Golfe, qui n'acceptent chez eux des esclaves. Le reste des musulmans, soit 95% n'ont rien à voir avec des Arabes.
Source : http://www.france-irak-actualite.com/2015/09/seif-el-islam-kadhafi-elu-representant-du-conseil-supreme-des-tribus-libyennes.html?utm_source=flux&utm_medium=flux-rss&utm_campaign=politics
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En analysant la situation en Libye, déchirée entre deux
gouvernements rivaux luttant pour le pouvoir, Lionel (Michael Lebron),
personnalité de la radio et de la télévision new-yorkaise, explique
qu’il est un peu tard pour s’étonner.
RT : Sur le blog officiel du département d’Etat américain, Jonathan Winer, émissaire spécial des Etats-Unis pour la Libye, a écrit mercredi la chose suivante : «Il y a quatre ans que les Libyens se sont réunis pour saisir le moment et renverser leur dictateur». Que pensez-vous de cette déclaration ?
Lionel:
Quand cela s’est-il passé? Mon souvenir est totalement différent. Je me
souviens de séries d’actions militaires de l’OTAN et d’autres forces,
qui ont simplement éliminé un dirigeant souverain qui serait supposément
devenu «despotique». Et c’est pour cette raison qu’il a été rayé de la
carte. Mon souvenir diffère donc de celui d’une vague de combattants
révolutionnaires épris de liberté renversant leur dirigeant tyrannique.
RT : «Des
Libyens travaillent ensemble pour surmonter leurs différends et
réaliser leur aspiration démocratique de la révolution, pour vivre dans
un état démocratique basé sur les droits de l’homme», lit-on aussi dans ce blog. Etes-vous d’accord ?
Lionel:
De quelle aspiration à la démocratie parlons-nous ? Il suffit de jeter
un coup d’œil sur ce qui s’est passé du temps de la Libye italienne sous
Mussolini. Il s’agissait de la Cyrénaïque, de la Tripolitaine et du
Fezzan, trois régions différentes, trois groupes de gens qui ont été
assemblées, liées, collées les unes aux autres. Ce que beaucoup en
Europe ne peuvent pas comprendre, c’est que parfois afin de maintenir
ces gens ensemble, il faut parfois utiliser des forces que nous
n’acceptons pas nécessairement. Je ne cautionne pas la brutalité. Mais
il est à noter que nous ne comprenons pas qu’on ne peut maintenir un tel
groupe ensemble sans un leader strict et fort. Ainsi, lorsqu’on retire
ce contrôle, on a le chaos, de nouvelles forces apparaissent pour
combler le vide. Auparavant, on avait quelque chose qui marchait, mais
une fois les règles, les barrières et les limitations disparaissent, on
se retrouve dans le chaos.
RT : Cependant, le même rapport
dit qu’«Aujourd’hui les Libyens ont fait de véritables progrès dans les
négociations vers la formation d’un gouvernement national unifié.
Qu’est-ce qui a fait dire une chose pareille à Jonathan Winer ?
Lionel:
Quand j’ai lu ça, j’étais presque mort de rire, je me suis même demandé
«de quel pays s’agit-il ?». Cela sonne comme une version hollywoodienne
de la réalité.
Je me souviens avoir évoqué le cas de Benghazi durant un de mes programmes, un endroit dont personne n’avait jamais entendu parler. Et quand ils ont montré une image du tribunal des rebelles, c’est le drapeau d’Al-Qaïda qui flottait à son sommet ! Les rebelles, les combattants de la liberté sont en fait des combattants d’Al-Qaïda !
Je me souviens avoir évoqué le cas de Benghazi durant un de mes programmes, un endroit dont personne n’avait jamais entendu parler. Et quand ils ont montré une image du tribunal des rebelles, c’est le drapeau d’Al-Qaïda qui flottait à son sommet ! Les rebelles, les combattants de la liberté sont en fait des combattants d’Al-Qaïda !
Sur
place tout le monde le savait, mais nos grands médias occidentaux nous
ont donné une toute autre image, ne sélectionnant qu’une partie de
l’information en omettant tout le reste. Ils ont ainsi créé une fiction,
un conte de fées pour nous montrer à quel point la situation en Libye
est similaire à notre révolution américaine. Et ces courageux patriotes
qui se battent pour leur pays afin de vivre librement, sans les
contraintes de leur dirigeant devenu fou. Cette idée a été propagée sans
être vérifiée, et tout le monde a cru cette histoire sans y réfléchir.
Et je me pose la question pourquoi est-ce que tout le monde est surpris
maintenant ? Où avez-vous été ces quatre dernières années ?
Gilles Munier
Bernard Lugan – Le 24 septembre 2015 – Source bernardlugan
Analyse par Bernard Logan
Le 14
septembre 2015, un coup de tonnerre a retenti dans le ciel serein des
certitudes démocratiques européocentrées quand le Conseil suprême des tribus de
Libye a désigné Seif al-Islam Kadhafi comme son représentant légal. Désormais,
voilà donc un fils du défunt colonel seul habilité à parler au nom des vraies
forces vives de Libye…
Les abonnés
à l’Afrique Réelle et les lecteurs de ce blog ne seront pas surpris par cette
nouvelle puisque, depuis 2012, je ne cesse d’écrire :
1) Que la
pacification de la Libye ne pourra se faire qu’à partir des réalités tribales.
2) Que le
seul à pouvoir reconstituer l’alchimie tribale pulvérisée par l’intervention
militaire de 2011, est Seif al-Islam que son père, le colonel Kadhafi, avait
pressenti pour lui succéder, et qui est actuellement détenu par les
milices de Zenten.
Mes analyses
ne procédaient pas du fantasme, mais du seul réel que voici :
1) En Libye,
la grande constante historique est la faiblesse du pouvoir par rapport aux
tribus. Au nombre de plusieurs dizaines, si toutefois nous ne comptons que les
principales, mais de plusieurs centaines si nous prenons en compte toutes
leurs subdivisions, ces tribus sont groupées en çoff (alliances ou
confédérations).
2) L’allégeance
des tribus au pouvoir central n’est jamais acquise.
3) Les bases
démographiques des groupes tribaux ont glissé vers les villes, mais les liens
tribaux ne se sont pas distendus pour autant.
Le colonel
Kadhafi a fondé son pouvoir sur l’équilibre entre les trois grands çoff libyens,
à savoir la confédération Sa’adi de Cyrénaïque, la confédération Saff
al-Bahar du nord de la Tripolitaine et la confédération Awlad Sulayman de
Tripolitaine orientale et du Fezzan, à laquelle appartiennent les Kadhafda, sa
tribu. De plus, à travers sa personne, étaient associées par le sang la
confédération Sa’adi et celle des Awlad Sulayman car il avait épousé une Firkèche,
un sous clan de la tribu royale des Barassa. Son fils Seif al-Islam se
rattachant à la fois aux Awlad Sulayman par son père et aux Sa’adi par sa mère,
il peut donc, à travers sa personne, reconstituer l’ordre institutionnel libyen
démantelé par la guerre franco-otanienne. Mais pour comprendre cela, encore
faut-il se rattacher à la tradition du maréchal Lyautey concernant les affaires
indigènes et répudier l’approche universaliste des cerveaux à nœud du quai
d’Orsay.
Aujourd’hui,
les alliances tribales constituées par le colonel Kadhafi ont explosé ; là
est l’explication principale de la situation chaotique que connaît le pays. En
conséquence de quoi, soit l’anarchie actuelle perdure et les islamistes
prendront le pouvoir en Libye, soit les trois confédérations renouent des liens
entre elles. Or, c’est ce qu’elles viennent de réaliser en tentant de
faire comprendre à la communauté internationale que la solution passe par
les tribus… Certes, mais la Turquie et le Qatar veulent la constitution d’un
État islamique et la justice internationale a émis un mandat d’arrêt contre
Seif al-Islam…