Des articles annoncent régulièrement que telle ou telle entité a mis en
place LA CHARIA. L’usage du déterminant « la » démontre l’ignorance
des journalistes quant à la signification véritable de ce « mot magique
», car cet emploi donne de la légitimité à ces groupes et
États.
Une méconnaissance historique
Présent qu’une seule fois dans le Coran, le terme sharî’a renvoie à
l’idée de « chemin vers la Source », mais dans sa pratique courante,
depuis l’apparition des grands corpus juridiques au VIIIème siècle, il
désigne une « interprétation de la Loi divine ». Les interprétations
(comme les chemins) ne peuvent être uniques, puisque chaque théologien
diffère dans son approche des textes considérés comme sacrés. L’islam
étant une religion formée de nombreuses voies divergentes, les écoles
juridiques (madhhab) y sont légions. Il est même difficile de
s’accorder sur leur nombre exact.
Pour le sunnisme : on en compte
habituellement 4 (malikisme, shafi’isme, hanafisme et hanbalisme), mais
quid de leurs subdivisions et des approches modernes, les dites «
néo-hanbalisme » (le wahhabisme et les formes de salafisme) et «
néo-hanafisme » (le deobandisme des talibans).
Pour le chiisme, la
situation est aussi complexe. Chez les duodécimains, si l’école osuli
s’est imposée en Iran, ce n’est pas le cas ailleurs. Les autres formes
de chiisme (ismaïlisme, zaydisme, alaouisme, ibadisme, voire
druzisme) suivent chacune une ou plusieurs voies (madhhab).
Ces quelques
lignes, sans entrer dans des détails trop fastidieux pour le lecteur et
surtout, qui nécessitent plusieurs tomes d’encyclopédie juridique,
montrent la complexité du droit islamique.
D’ailleurs, lesquelles de ces
branches sont islamiques ?
Cette question reste sans réponse puisque
variant selon la définition de l’islam prise en compte (littéralement
islâm signifie « soumission »). Outre les définitions classiques autour du
respect des 5 piliers de l’islam, on peut considérer que seuls
quelques individus sont musulmans (les initiés ayant atteint un stade
ultime de soumission à Dieu) ou bien que tout humain l’est, car pour
le croyant, tout homme est soumis corporellement à Dieu et, pour ceux
qui croient à la Prédestination, tout acte suit un dessein divin.
De surcroît, le temps joue aussi un rôle, puisque nombre d’écoles
juridiques utilisent l’ijtihâd (ou un jugement personnel par analogie
pour
des situations nouvelles), donc se modifient progressivement. Ainsi,
Abu Yusuf, disciple direct d’Abu Hanifa au VIIIème siècle est déjà en
opposition avec son maître sur certains points, alors qu’il s’agit d’un
de ses continuateurs les plus proches ! Donc toutes ces écoles ayant
parfois plus d’un millénaire d’existence ne peuvent décemment être
réduites à un ensemble uni, appelé « la charia ».
Les discussions juridiques étaient très pointilleuses, car la finalité
du droit était différente du sens qu’elle a pris à partir de 1789,
c’est-à-dire une Loi toute puissante, non discutable qui doit être
appliquée. En effet, ceci aurait été vu comme une approche mécréante,
puisqu’un ou des individus niant la supériorité divine se seraient crus
capables de retranscrire parfaitement la Vérité. Ainsi, ces «
légistes » se prétendraient être Dieu. On retrouve chez le susnommé
fondateur de l’école hanafite, une attaque frontale contre tous ceux qui
se permettraient de poser un jugement définitif sur un autre humain.
Selon lui, prononcer le « takfîr » c’est-à-dire juger un individu en le
déclarant non musulman, ne pouvait être qu’un acte impie, puisqu’un
homme juge l’âme d’un autre, donc s’imagine être Omniscient. On comprend
donc l’usage péjoratif du terme « takfiriste » pour désigner ces
groupes ne respectant pas cette règle (à noter que le suffixe –isme ne
convient pas, puisque le reproche fait n’est pas d’utiliser le takfir à
excès mais de l’utiliser !).
Le but du droit aux époques médiévale
et moderne, dans les pays d’Islam, était de parvenir grâce à des
discussions intenses, à une compréhension des volontés divines, et non
de
servir de loi étatique. Une sharî’a d’un juriste (donc d’un humain)
était donc par essence imparfaite, ne pouvait s’appliquer à tous. Ainsi,
chaque individu pouvait (et peut) changer à sa guise de jurisconsulte
et d’école, et préférer la profondeur d’interprétation d’un juriste
sur un domaine et celle d’un autre (même d’une autre école, voire d’une
autre branche de l’islam) sur un autre sujet. Par conséquent, une
sharî’a n’était en aucun cas exclusive.
Détournement moderne de la notion de sharî’a et méprise médiatique
Cet aperçu montre que l’utilisation dans le langage courant de
l’expression « la charia » est au mieux erronée, au pire manipulatrice.
La
volonté d’incorporer ce mot arabe au français s’explique par l’absence
d’équivalent transcrivant ces idées. Mais, lorsqu’il quitte le champ
restreint des personnes comprenant cette notion, pour se retrouver dans
le langage médiatique, la puissance de ce concept n’est pas même
effleurée. Ceci principalement pour deux raisons.
La première venant de certains musulmans qui, à des fins rhétoriques,
utilisent le terme « al-sharî’a » sans donner de précisions
supplémentaires. Bien souvent, ils ne font que sous-entendre que c’est
selon leur interprétation de la Loi divine. Quand on analyse leurs
discours ou traités, on remarque l’importance des références. Ces
arguments d’autorité montrent qu’un choix s’est opéré et qu’il s’agit
bien
de l’interprétation de ces personnes souvent issues des voies
juridiques les plus récentes. Par ailleurs, on peut remarquer que
l’attirance
de ces nombreux réformateurs musulmans à partir du XXème siècle pour
l’Occident a produit une transformation de leur compréhension de la
notion de la sharî’a, perçue comme des textes de lois dans un sens
moderne. Cet anachronisme s’explique par l’héritage de la Révolution
française où les lois ont pris une proportion importante pour se
prémunir de l’arbitraire et donner des applications quotidiennes. Le
parcours de la plupart des têtes de ponte des mouvements dits «
salafites » montre que c’est au retour de leurs études ou de leurs
séjours
en Europe qu’ils ont souhaité modifier en profondeur les pays d’Islam.
Paradoxalement, ces théologiens officiellement réactionnaires (salafî
signifiant « personne prônant un retour à la pratique des pieux
ancêtres ») voulaient rattraper le retard de leurs pays d’origine sur
les
Européens, c’est-à-dire incorporer philosophiquement un Évolutionnisme
incompatible avec la Réaction. D’où cet amour-haine entre cette
mouvance salafiste et l’Occident. Pour rattraper ce « retard » tout en utilisant
l’islam, ils ont l’idée de marier l’encadrement de la population dans
l’obligation de suivre les codes de lois issus de l’empire napoléonien
avec les réflexions juridico-religieuses inhérentes à l’islam. Ils
ont ainsi centralisé le droit alors que par nature le jugement d’un
cadi n’avait qu’une valeur locale. Dans leur vision, une sharî’a devait
régir la société comme la loi en Europe, en incorporant une forte
proportion de moralisme.
La seconde raison est que cet art rhétorique est pris au pied de la
lettre par nombre de media qui vont y puiser quelques phrases en
s’imaginant que « la charia dit cela ». Cette propagande s’explique par
l’opportunisme de certains leaders d’opinion, qui dans un relent du
combat positiviste contre les religions exècrent la logique de
recherche de Lois divines, donc de connaissances irrationnelles (dans le
sens
« au-dessus de la raison humaine » de St Augustin). Ainsi, en
promouvant une image détestable de « LA charia », les musulmans n’osent
avouer
s’inspirer d’une sharî’a, s’ils ne veulent pas être soupçonnés de
comportements « barbares ». L’article défini « LA » en masquant la
complexité du concept interfère dans une lutte contre les religions.
Comme souvent, cette entreprise poursuivie par des désinformateurs
malintentionnés est reprise par des individus mésinformés qui
popularisent ce choix de conserver le mot arabe par exotisme et non pour
sa
pluralité de sens. Ainsi, il ne faut pas tomber dans le piège de leur
accoler le barbarisme « islamophobe », car ce serait méconnaître le
cheminement d’une désinformation, où bien souvent l’instigateur est
caché et le manipulé est de bonne foi.
Ismaël Malamati
Comme il n'existe aucune charia officiellement reconnue par l'ensemble des musulmans, et que chaque "ouléma" a créé une charia, il suffit de se créer sa propre charia, en interprétant le Coran comme l'exigent vos impératifs politiques ou militaires. C'est ainsi que les Ibn Saoud ont créé une charia débile, inspiré du Talmud juif [1] , et que leurs mercenaires de l’État Islamique, alias l’État Israélite [3] , ont inventé une charia les autorisant à commettre leurs crimes "impunément" selon cette charia.
Conclusion : toutes les charias sont bidon.
Les Catholiques ont inventé le "Pape" qui dicte et fait exécuter leur "charia".
Les Chiites ont leur Ayatollah suprême qui a la même fonction.
Les Sunnites n'ont rien du tout de ce genre.
Nous savons tous que les USA avaient promis à Ghannouchi de devenir le "pape" des sunnites, avec comme "Vatican Sunnite", le Hedjaz, et comme capitale La Mecque [2] .
Musulmans
sunnites : vous êtes libres d'interpréter le Coran à votre guise.
On
appelle cela la liberté individuelle.
Profitez-en !!
Hannibal GENSERIC
[1] Les racines talmudiques du sionisme
[2] Moyen Orient : Le plan américano-israélien
[3] EI = État Islamique ou État Israélite ?
VOIR AUSSI :
20 juin 2013