Sur fond de crise politique autour du cinquième mandat du
président Bouteflika, âgé et très malade (et dont le sort est scellé), se joue
une lutte à mort entre deux grandes factions du pouvoir réel Algérien :
D’un côté, les partisans de l’ancien
patron des renseignements de 1990 à 2015, le Général Mediène plus connu sous le
nom de Toufik, débarqué en 2015 dans une première joute où tous les coups
étaient et sont toujours permis.
De
l’autre, les partisans du Clan Bouteflika, ramené et propulsé par le Général
Toufik avant de s’en affranchir mais qui dispose actuellement de la loyauté du
très puissant Chef d’état-Major des Armées, le Général Ahmed Gaid Salah.
La lutte est celle de deux généraux, l’un issu du monde
opaque des renseignements et l’autre, du terrain.
La signature de Toufik dans les
appels anonymes à manifester est un fait indéniable pour les connaisseurs des
méthodes de l’ex-DRS.
L’appel à une manifestation féminine à l’occasion du 8
mars porte l’empreinte génétique du système Toufik. Ce dernier s’inspire des
Démocrates pro-féministes US contre Trump.
Le
Général Major Ali Ghediri, candidat aux présidentielles d’avril 2019 en tant
qu’indépendant est la créature du Général Toufik et du richissime oligarque
Yssad Rebrab qui doit son ascension fulgurante dans le monde très fermé des
affaires à l’ex-patron des renseignements. La mise à l’écart de Toufik en 2015
a provoqué la disgrâce de Rebrab aux yeux du régime, lequel ne cesse depuis de
saboter ses investissements.
Les
partis politiques idéologiques c’est encore l’ex-patron, créés, infiltrés ou
manipulés par les renseignements depuis les années 90 comme le RCD ou
Rassemblement pour la Culture et la Démocratie ou encore certains partis
Islamistes dits modérés nés d’une implosion manipulée par les services qui
soutiennent cette faction.
L’autre
faction, plus pragmatique et moins idéologique, dispose de sa faune
d’oligarques issus de la petite délinquance ou des réseaux criminels et a
réussi à se débarrasser de l’ex-DRS en « achetant » ses éléments et
l’ensemble de son écosystème socio-économique, opération grandement facilitée
par la corruption généralisée d’une partie non négligeable de la population.
Il
s’agit également d’une lutte entre deux clientèles, deux écosystèmes rentiers
autour du contrôle du pouvoir et par conséquent de la rente des hydrocarbures.
Dans ce
jeu en cours, le seul disposant de la puissance de feu absolue est le Général Gaid Salah. Ce
dernier se déclare loyal à la présidence actuelle mais le rôle de ses enfants
dans le monde des affaires semble peser sur ses choix.
C’est
le soldat le plus ancien encore en activité dans le monde, le seul haut
responsable Algérien à avoir systématiquement refusé de rencontrer les
ambassadeurs étrangers et sa posture est susceptible de lourdement déterminer
le sort de la crise politique algérienne.
Ironie
du sort, le Général Ghediri, le poulain de Toufik, est un adversaire de longue
date du Général Gaid Salah. Ce dernier a toujours soupçonné celui qui fut le
DRH des forces armées d’être les yeux de Toufik au sein de son département avec
mission de surveiller Gaid Salah. L’animosité entre les deux hommes est telle
que lorsque le pouvoir réel algérien voulut imposer Ghediri comme alternative
de compromis, c’est Gaid Salah qui mit son veto net et catégorique,
« quitte à provoquer une guerre ! « . D’ailleurs, le Chef
d’état-major des Armées accuse ses adversaires de vouloir déstabiliser la paix
civile. Entre les lignes, le conflit est grave.
Les
États-Unis font mine de ne rien voir. L’Europe, après avoir couvert le régime
algérien en échange de très grandes concessions économiques et commerciales,
fait semblant de découvrir une crise et en tremble pour ses intérêts et
l’existence même de son Union qui risque d’éclater en mille morceaux si la
crise algérienne dérape vers l’inconnu.
Numidianus
source:https://strategika51.org/2019/03/05/que-se-passe-t-il-reellement-en-algerie/
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Comment
les réseaux du général Toufik noyautent les manifestations contre le 5e mandat
Depuis le début de cette semaine,
l’Algérie assiste à des soubresauts politiques impressionnants qui remettent en
cause tous les rapports de force au sein du sérail algérien. Après deux
immenses marches dans toutes les villes du pays contre le 5e mandat d’Abdelaziz
Bouteflika, les organisations de masse et de nombreux partis politiques sont
noyées dans les divisions à la suite de plusieurs démissions proclamés par des
acteurs et des personnalités qui ont décidé de rejoindre la « rue »
dans l’espoir de renforcer la contestation contre le clan présidentiel des
Bouteflika.
Et derrière ces divisions brutales et surprenantes, un seul nom apparaît :
celui du général Toufik ! En effet, les réseaux de l’ex-puissant patron du DRS, l’homme qui a régné
sur les services secrets pendant pas moins de 30 longues années, ont été
réactivées depuis fin février pour porter un coup de grâce aux membres du
clan présidentiel. Ainsi, tout a commencé par cette fuite surprenante d’un
enregistrement audio entre Sellal, l’ex-directeur de campagne du 5e
mandat, l’un des proches et fidèles soldats d’Abdelaziz Bouteflika, avec Ali
Haddad, l’un des principaux financiers de la campagne électorale des
Bouteflika. Nos sources sont unanimes à affirmer que l’homme qui a fait fuiter
cet enregistrement est un homme d’affaires, un ancien proche du général Toufik,
qui a manipulé Ali Haddad pour se retrouver avec lui dans le bureau de Sellal.
Aujourd’hui en fuite à Londres, cet « agent double » du général
Toufik a réussi son coup : mettre de l’huile sur le feu en révélant cet
enregistrement à la veille des marches du vendredi 1 mars.
Le deuxième acte de la stratégie du
clan du général Toufik fut, par la suite, d’utiliser la colère populaire pour
semer la zizanie au sein de plusieurs organisations et institutions. Ainsi, au
sein du FCE, le patron algérien présidé par Ali Haddad, une dissidence a
été rapidement organisée et plusieurs hommes d’affaires, tous des anciens
entrepreneurs proches des décideurs militaires des années 90, ont annoncé leur
soutien aux manifestations contre le 5e mandat. Ali Haddad, désavoué, est plus
que jamais isolé et les Bouteflika sont en train de perdre la main sur le FCE,
l’un des plus puissants patronats dans toute l’Afrique.
L’acte 3 du clan du général Toufik est de
lancer une grande offensive dans toutes les organisations de masse comme
l’UGTA, la centrale syndicale longtemps acquise au régime de Bouteflika. En 48
heures, plusieurs sections locales comme celle de la zone industrielle de
Rouiba, la principale zone industrielle du pays, ont fait dissidence et
annoncent leur soutien ou leur participation aux manifestations dans les
rues contre le 5e mandat. Après l’UGTA, les syndicats autonomes du secteur de
l’éducation et de la santé adhèrent à cette démarche et annoncent leur
participation aux manifestations de rue. Les réseaux du général Toufik
s’emparent, par la suite, de l’organisation nationale des Moudjahidine,
plusieurs associations des enfants des Chouhadas et des anciens agents des
services de renseignement, le fameux MALG. Toutes ces organisations ont affirmé
qu’elles soutiennent la rue contre… Bouteflika.
De nombreux avocats, réputés pour
leur proximité historique avec le général Toufik, ont exercé un très fort
lobyying pour organiser des marches à travers tout le pays. Petit à petit, les réseaux du
général Toufik réussissent l’improbable : créer un climat de désobéissance
nationale ! Des parlementaires démissionnent, des partis comme le
FLN ou le RND connaissent de vives tensions, etc. Et dans les rues, au sein des
marches, les cellules dormantes de l’ex-DRS s’activent brillamment. D’un coup,
des actions de protestation harmonieusement synchronisées voient leur jour à la
surprise générale et prennent de court les hauts responsables du clan
présidentiel
Source : Maghreb IntelligenceHocine Benhadid, général à la retraite: Les Algériens ne doivent pas croire aux affabulations de Gaïd Salah
Extraits de l’interview du général Benhadid (revue de presse : El Watan – Algérie - 8/3/19)*
…(…)…
Vous qualifiez de prédateurs et d’Apaches les gens qui, selon vous,
font tout pour maintenir Bouteflika au pouvoir. Qui sont ces gens-là ?
Le
principal, c’est son frère Saïd. Même s’il a commencé bien avant à
s’intéresser au pouvoir, il a réussi à s’imposer en profitant de l’état
de santé compliqué de Bouteflika en 2005. Gaïd Salah, en place depuis
2004, en a fait de même.
Depuis,
ce sont ces deux hommes qui gèrent le pays. Gaïd a consolidé les
positions de Saïd. Ce dernier a fait pareil et c’est ainsi qu’il est
devenu le patron de la présidence.
Tout
le monde lui obéit, y compris Gaïd Salah. Saïd a continué jusqu’à
modifier la Constitution de 2008 pour permettre à son frère de briguer
un 3e mandat, puis un 4e. C’est lui le principal ordonnateur et c’est
lui qui commande ces Apaches dont les oligarques, comme les qualifie
Louisa Hanoun. Je cite ici Ali Haddad, Tahkout, Kouninef et d’autres.
Ouyahia
aussi. C’est ce dernier qui a créé l’empire Tahkout en lui octroyant
des terrains et des usines prêtes au dinar symbolique, comme celle de
Tiaret. C’est Ouyahia qui lui a donné 3000 ou 4000 bus d’étudiants.
En
tant que Premier ministre, il a profité lui aussi de cette situation
pour devenir un réel oligarque. C’est un bon exécutant discipliné. Il a
étudié le personnage du frère du président, Saïd. Il l’a bien cerné, au
point de le manipuler.
C’est
la raison pour laquelle Ouyahia est resté au pouvoir jusqu’à ce jour.
Le pouvoir connaît aussi son histoire. Ils ont trouvé un terrain
d’entente pour rallonger le règne de Bouteflika. Mais il n’y a pas
qu’Ouyahia, il y a aussi tous les gouvernements successifs du temps de
Bouteflika. Ces derniers ont profité aussi de la situation. Ils sont
devenus, en quelque sorte, les esclaves des Bouteflika.
Puis,
il y a aussi les partis politiques créés par le pouvoir, dont celui du
dissident du MSP, Amar Ghoul, de Amara Benyounes, et d’autres dont El
Karama de Benhamou et bien évidemment le FLN et le RND.
Ils
sont devenus des porte- parole du gouvernement, ou plutôt de Saïd
Bouteflika. Tout le monde est nommé sur ordre de Saïd, y compris les
militaires ! Saïd interfère même dans les grandes décisions de l’armée.
Cela
veut dire que même le chef d’état-major n’est pas libre. On lui impose
les chefs militaires pour les besoins et les intérêts de la présidence,
comme par exemple certains chefs des Régions militaires, le poste du
chef de la Garde républicaine et certains postes des renseignements. Ils
sont tous imposés par lui.
…(…)…
Les Algériens doivent continuer leur combat pacifique et ne doivent pas croire ce genre de fabulations. Gaïd Salah attend juste la mort de Bouteflika pour prendre sa place. Il est sûr que si ce dernier décède, c’est lui qui reprendra les rênes du pays.
Vous parlez d’une solution à la situation actuelle. Pouvons-nous en connaître le contenu ?
Première
étape. Il faut appliquer l’article 102 de la Constitution et annoncer
la vacation du poste du président. Nous savons tous que l’actuel
président de l’APN a été placé par effraction et par la force du cadenas
et que c’est Saïd Bouteflika qui a placé les différents gouvernements,
le Conseil constitutionnel ainsi que le chef d’état-major. Ils sont donc
tous illégitimes. Il faut les destituer.
Gaïd Salah reçoit même des ordres des Émirats. Trouvez-vous cela normal ?
Imaginez-vous un chef d’état-major de l’armée qui parle de paix et de
stabilité alors qu’il reçoit des ordres de l’étranger ? Il n’est qu’un
pion. Il n’y a pas d’État. Nous sommes dans l’illégalité la plus totale.
Je propose un comité des sages. Il sera composé de Ali Yahia Abdennour,
d’Ahmed Taleb Ibrahimi et de Boualem Benhamouda.
Ces
derniers auront des conseillers, dont l’avocat Mustapha Bouchachi, le
journaliste Fodil Boumala et le colonel Chafik Mesbah. Ce comité aura un
coordinateur qui sera le Dr Lounes Oukaci. Ce comité des sages doit
être installé par le président du Sénat Abdelkader Bensalah.
Ce
comité aura pour mission de nommer un gouvernement provisoire dans une
période de trois mois ou peut-être plus afin de préparer la transition.
Il doit aussi aider le président du Conseil de la nation à préparer
l’intérim de la présidence. Il aura, donc, trois mois pour installer le
gouvernement et trois autres pour préparer les élections. Ce sont eux
qui décideront s’ils gardent l’APN ou non.
Tous
les membres des gouvernements successifs doivent rendre des comptes.
Ils doivent déposer leurs bilans et rendre publics leurs biens
immobiliers depuis la prise de leurs fonctions. Ils doivent être
interdits de sortie du territoire jusqu’à ce qu’ils prennent le quitus
de la Cour des comptes.
Tout
haut fonctionnaire doit le faire dont, je cite pour l’exemple, Mohamed
Raouraoua ou l’empereur de la résidence d’Etat Hamid Melzi. Il faut
aussi assurer la sécurité des membres du comité qui doivent être à
l’abri. Pour cela, il faut nommer un nouveau directeur de la sécurité militaire. Ce ne sera pas Tartag.
…(…)…
(Les passages sont soulignés par nous)
*Source et version intégrale : El Watan (photo Souhil B)
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