J'avais
23 ans lorsque nous avons envahi l’Irak, et je n’étais pas sûr que
c’était fondé sur des mensonges, mais quelque chose dans mon for
intérieur – une vague impression — me disait que c’était fondé sur des
mensonges. Un peu comme vous, si votre nouveau rendez-vous trouvé sur un
site de rencontre arrivait avec un téléphone portable à rabat de 2004.
Cela semblerait vaguement inquiétant, et aucune explication qu’il ou
elle pourrait donner ne vous mettrait à l’aise. De plus, toute autre
personne qui agirait comme si c’était normal deviendrait également
suspecte.
L’invasion de l’Irak m’a semblé être fondée sur un mensonge. Et il
s’est avéré que j’avais raison, que c’était un mensonge et que
l’ensemble des médias grand public et notre gouvernement avaient tort,
mentaient ou, la plupart du temps, les deux.
Aujourd’hui, notre gouvernement et nos médias tentent par tous les
moyens de nous plonger dans une autre guerre, cette fois avec le
Venezuela. Ils nous disent que le peuple vénézuélien est désespérément à
la recherche de produits de première nécessité comme du dentifrice,
alors que des journalistes indépendants montrent des étals pleins de tubes de dentifrice abordable à Caracas.
Et même s’ils n’avaient pas de dentifrice, cela ne semble pas être
une bonne raison pour que l’Amérique commence à laisser tomber ses
mauvaises décisions de longue portée sur la tête d’innocents.
Transformer une ville en cratère au nom d’une bataille contre la
gingivite semble un peu extrême.
Les médias grand public et la quasi-totalité du gouvernement
américain nous disent que Juan Guaido est le « président par intérim »,
même s’il n’a jamais été élu à ce poste et que le président actuel
dirige toujours le gouvernement et l’armée vénézuéliens. Donc, je
suppose que ce terme « d’intérim » désigne le laps de temps situé entre
le moment où Guaido n’était personne et le moment où il retournera à
l’anonymat. Au moins, il pourra dire aux femmes, dans les soirées :
« Vous savez, j’ai été président par intérim ».
Les médias grand public nous informent également que l’armée
vénézuélienne a mis le feu à des camions d’aide américains, alors que
des vidéos prouvent
que c’était l’opposition qui incendiait les camions. [Le New York Times
a effectivement été obligé de publier une correction, NdT]. De plus,
l’idée selon laquelle le Venezuela devait prendre « l’aide humanitaire »
du pays dont les sanctions les écrasent équivaudrait à demander aux
Sioux de Standing Rock d’accepter des menus cadeaux de la part des
équipes de construction qui transforment leurs terres en gruyère pour
poser le pipeline Dakota Access [dont les Sioux ne veulent de toutes
façons pas parce qu’en plus de passer sur leurs terres ancestrales, il
est beaucoup trop polluant pour la terre et les rivières d’où ils tirent
leur eau potable, NdT].
À moins que les paquets cadeaux ne soient remplies d’essuie-tout
industriels pour les aider à nettoyer les flaques de pétrole, je ne vois
pas en quoi ce serait bénéfique. Parfois, il faut en effet regarder la
denture d’un cheval de Troie (ou devrais-je dire « chien de Troie » ?)
[La compagnie responsable de la pose du pipe-line Dakota Access lance des chiens d’attaque contre les Sioux qui tentent de protester contre sa construction, NdT].
Ce n’est pas la première fois que notre gouvernement et nos médias
conspirent pour entraîner le peuple américain dans une guerre contre un
autre pays — ou aider à perpétrer un coup d’État aux effets forcément
désastreux. J’ai donc pensé que c’était le moment idéal pour passer en
revue les quatre principales productions US.
Numéro 4 : La guerre hispano-américaine
Elle est largement considérée comme le point de départ de la
propagande médiatique moderne, parce que c’était la première guerre
réellement déclenchée par les médias. Les journaux avaient inventé des atrocités dans une quête incessante de lectorat.
Et comme l’avait noté le New York Times,
« Le reportage sensationnaliste sur le naufrage du cuirassé américain
Maine dans le port de La Havane le 15 février 1898… et tous les autres
reportages grotesques qui ont mené à la guerre hispano-américaine
auraient pu être considérés comme des caricatures s’ils n’avaient pas
mené à un conflit international majeur ».
Dommage que le NYT ne s’en soit pas tenu à cette éthique et se soit lui-même fait un avocat des guerres.
Numéro 3 : La guerre du Vietnam
Bien sûr, presque tout le monde sait que la guerre catastrophique du
Vietnam a été précipitée par l’Incident du golfe du Tonkin : des navires
de la marine américaine avaient été attaqués sans aucune raison par des
torpilleurs nord-vietnamiens. Après cette escarmouche, le ministre de
la Défense Robert McNamara avait recommandé au président Johnson de
riposter, et l’horrible guerre du Vietnam a commencé. Mais la plupart
des Américains ne savent toujours pas qu’il n’y a jamais eu d’incident
dans le golfe du Tonkin, à part des navires de la marine américaine qui
avaient tiré des salves,
littéralement, contre des phénomènes météorologiques qu’ils avaient vus
sur leur radar. Le documentaire de 2003 « The Fog of War » a finalement
révélé la vérité. L’ancien secrétaire à la Défense Robert McNamara a avoué que l’attaque du Golfe du Tonkin n’avait pas eu lieu.
C’est comme ça. Ça ne s’était pas produit. Tout comme les lutins, les
dragons ou le talent de certaines célébrités, c’était imaginaire.
Les mensonges de notre gouvernement, soutenus par les reportages
serviles de nos médias, ont entraîné la mort de 3,8 millions de
Vietnamiens et de 58 000 militaires américains.
Le gouvernement des États-Unis possède l’un des départements de
désinformation les plus puissants jamais créés. C’est une merveille
moderne qui n’a d’égale que la Grande Pyramide de Gizeh et le coup droit
de Rafael Nadal.
Numéro 2 : La guerre d’Irak
Bien sûr, il y a le mensonge le plus évident au sujet de l’Irak, à
savoir que Saddam Hussein avait tellement d’armes de destruction massive
qu’il en utilisait comme gratte-dos dans sa baignoire. Mais ce n’est
pas la seule intox qui a conduit à l’anéantissement complet de la nation
souveraine gouvernée par Saddam Hussein. Il y en a eu d’autres, par
exemple que Saddam était lié à Al-Qaïda et qu’il avait peut-être joué un
rôle dans les attentats du 11 septembre. William Safire du New York Times, en mai 2002, écrivait
: « Selon le service de renseignements tchèque, Mohamed Atta, qui
allait être le principal pirate de l’air suicidaire du 11 septembre,
aurait rencontré au moins une fois l’automne dernier le chef de
l’espionnage de Saddam Hussein à l’ambassade d’Irak ».
Oui, Safire a été capable de briquer tout un tas de conneries avec
tant de soin qu’il brillait comme un saphir. Et cette chronique est
toujours en ligne sur le site Web du NYT, sans correction ni
rétractation. Je dirais que le Times n’est utile que pour
couvrir le fond d’une cage à oiseaux, mais je craindrais que le papier
n’entraîne même votre cacatoès domestique dans une invasion malavisée
qui tuerait des millions de personnes.
Mais la propagande ne s’est même pas arrêtée là. Il y a eu aussi les
attaques à l’anthrax, à la suite du 11 septembre 2001. De l’anthrax
avait été envoyé par la poste aux médias et aux bureaux des politiciens.
À ce jour, beaucoup de gens croient encore que cela avait quelque chose
à voir avec l’Irak ou Al-Qaïda à cause de hontes nationales primées
comme le « journaliste » Brian Ross.
Brian Ross, d’ABC News, avait écrit : « Le bacille du charbon contenu
dans la lettre envoyée au leader de la majorité au Sénat, Tom Daschle,
contenait de la bentonite, et la bentonite est une marque du programme
d’armes biologiques du leader irakien Saddam Hussein ». Comme l’a
clairement dit Salon, « toutes ces affirmations censément factuelles […]
étaient complètement fausses, de façon démontrable et incontestable …
Pourtant, ni ABC ni Ross n’ont jamais rétracté, corrigé, clarifié ou
expliqué ces articles frauduleux. »
Et, comme on pouvait s’y attendre, Brian Ross n’a pas perdu son
emploi à la suite de ces faux reportages. En fait, il n’a été mis au
vert par ABC News que l’an dernier,
quand il a rapporté que « Michael Flynn, conseiller à la sécurité
nationale, était prêt à témoigner que Trump lui avait dit de contacter
les Russes pendant la campagne ».
Cette information, tout comme les affirmations d’intégrité journalistique de Brian Ross, s’est avérée absolument mensongère.
(À mon avis de professionnel, quiconque a eu quelque chose à voir
avec la vente, la perpétration ou la planification de la guerre en Irak
ne devrait pas occuper de poste plus élevé que celui
d’assistant-stagiaire d’un préposé au ramassage des crottes d’un chien
qui n’appartiendrait à personne de particulièrement en vue. Si cette
position n’existe pas, nous, en tant que nation, devrions la créer juste
pour ces personnages. Pourtant, malgré mes objections, Robert Mueller
(chef du FBI au moment de l’invasion et grand partisan de celle-ci)
conduit la plus grande enquête du pays, le Russiagate. John Bolton, qui
avait préconisé l’invasion de l’Irak dès les années 1990, est maintenant
Conseiller à la sécurité nationale. Bill Kristol, qui avait insisté
pour faire la guerre en prédisant qu’elle serait finie en deux mois, est
toujours régulièrement invité sur MSNBC. Et la liste continue.)
Contrairement au ministre de la défense McNamara, qui a admis que
l’incident du Golfe du Tonkin ne s’était jamais produit, nous n’avons
pas de preuve irréfutable que l’administration Bush ait délibérément
raconté ces mensonges pour nous amener en Irak. … Oh, mais si ! Il
s’avère que la déchiqueteuse du bureau ovale de Bush était en grève pour
une augmentation de salaire en 2002, et qu’en fait, nous ayons une note de service
écrite par le secrétaire à la Défense de Bush, Donald Rumsfeld, un an
avant que les forces américaines ne déclenchent une ère de terreur pour
le peuple irakien.
Sa note de service sur la guerre contre l’Irak disait : » Par où
commencer ? Les États-Unis découvrent le lien de Saddam avec le 11
septembre ou les attaques à l’anthrax ? Ou peut-être un différend sur
les inspections d’ADM ? »
Je ne sais pas ce qui est le plus frappant – que cette note de
service existe, ou qu’il semble que les gars de Bush aient planifié une
invasion internationale massive de la même façon qu’un jeune homme de 35
ans fauché écrirait le brouillon du plan d’un mauvais roman dont il
pense que ce sera son passeport pour la réussite.
« Comment commencer guerre horrible ? Peut-être découvrir que Saddam a un deuxième job comme star de porno ? »
Le fait est que de multiples intox complètement farfelues ont jeté les bases d’une invasion de l’Irak qui a fait plus d’un million de morts.
Numéro 1 : Le bombardement de la Syrie
Le président Bachar Assad aurait gazé son propre peuple, garantissant
ainsi une extension de l’intervention américaine, et il l’aurait fait
quelques jours seulement après que Donald Trump eut dit au Pentagone de
commencer à retirer ses troupes de Syrie. Du moins, c’est l’histoire que
les médias grand public ont répétée en boucle pendant au moins un mois,
ne s’autorisant une pause que toutes les 10 minutes pour essayer de
nous vendre des hamburgers ou des appareils pour augmenter la taille du
pénis. [aux USA, les infos sont entrecoupées de publicités, NdT].
On s’attendait donc à ce que nous avalions qu’Assad ait fait la seule
chose qui garantirait un durcissement de l’hostilité des États-Unis, et
ce au moment même où il était sur le point de gagner sa guerre ? C’est
un peu comme quand si moi, quand je suis sur le point de finir de donner
une bonne raclée à un adversaire, je me mettais à me taper la tête
contre un mur, juste pour que ça soit plus marrant.
Seymour Hersh et Robert Fisk,
deux journalistes célèbres, ont fait un excellent travail en démontrant
que les attaques chimiques n’ont jamais eu lieu, et il y a une nouvelle
mise à jour : il y a un peu plus de deux semaines, un producteur de la
BBC a déclaré que les images de l’attaque chimique de Douma, en Syrie,
avaient été mises en scène [Lien en français, NdT].
Son tweet dit qu’après six mois d’investigations, il peut prouver
qu’aucun décès n’est survenu à l’hôpital. Pourtant, nos médias grand
public incroyablement ineptes, avec peu ou pas d’indices à l’appui,
s’étaient précipités pour assurer : « Il y a eu une attaque chimique !
Ces pauvres gens ! Et ils n’ont pas de dentifrice non plus ! Nous devons
les bombarder pour les aider ! »
Le fait essentiel ici est que nous avons remplacé depuis longtemps
nos médias par des sténographes de l’élite dirigeante. La classe
dirigeante invente un mensonge pour emporter l’adhésion des Américains à
ses crimes de guerre-maison, et ce mensonge est ensuite passé par
couches successives, comme un vernis, sur tous les citoyens américains
lambda. Et cela continue jusqu’à ce que le citoyen moyen qui se pose
ouvertement des questions sur ce mensonge soit considéré comme une bête
de foire à deux têtes, dont une couverte d’excréments de rats.
Les « journalistes » qui arrosent le mieux le pays de mensonges
obtiennent des récompenses, et des jets privés, et des cocktails avec
des célébrités de seconde zone comme Chuck Norris. Nous en arrivons
aujourd’hui au point où les dirigeants actuels — l’administration Trump –
ne cachent même plus leur corruption. John Bolton a déclaré
à Fox News que le but des USA est de voler le pétrole du Venezuela.
Mais nos médias continuent de suivre la ligne de leur propagande. Même
après les propos de Bolton, vous ne verrez pas Anderson Cooper, de CNN,
ou l’un quelconque des hommes-troncs de Fox News dire : « Le Venezuela
subit un coup d’État soutenu par les États-Unis parce que nous voulons
voler leur pétrole. » C’est vraiment vertigineux que les médias grand
public maintiennent leur propagande, même après que les « leaders »
aient étalé leurs véritables intentions au grand jour.
« Défendez la matrice » clignote en rouge dans leurs yeux.
La ligne de propagande pour le Venezuela en ce moment est : « Nous
voulons aider les pauvres Vénézuéliens. » Si vous voulez les aider,
gardez les USA hors de leur vue. Ne les forcez pas à avoir quoi que ce
soit à voir avec le pays qui a inventé le poulet frit industriel servi
dans des seaux et les sprays nasaux aux opiacés. Personne, à aucun
moment, n’a regardé la présidence de Donald Trump en se disant: « wow,
ce pays a vraiment tout compris. J’espère qu’ils nous ferons profiter de
la justesse de leurs décisions ».
Par Lee Camp ,satiriste politique, écrivain, acteur et activiste américain. Il anime l’émission satirique hebdomadaire Redacted Tonight sur RT America. Il a écrit pour The Onion et le Huffington Post.
Traduction Entelekheia
Pour les anglophones, la vidéo de l’émission de Lee Camp dont cet article a été tiré.
Koko
RépondreSupprimerne pas ignorer de cite la population qui elise et soutient leurs governments respectifs depuis des decenies car sans elle ces crminels chefs d'etat et gouvernemnts n'existeront pas.
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