Jusqu’à ce jour très sombre où les soldats du califat ont frappé la
capitale de l’abomination et des perversions, pour reprendre les termes du
communiqué de Daesh en référence aux attentats de Paris, François Hollande, le
président français, et Laurent Fabius, son pédant insupportable et
fat, néanmoins ministre des Affaires étrangères, restaient
inflexibles : Assad doit partir.
Pour l’Élysée, Assad et Daesh, c’était du pareil au même.
Pour illustrer toute l’incongruité
du gouvernement Hollande, personne parmi ses conseillers formés à l’ENA ne lui
a dit qu’il était plus que jamais à côté de la plaque.
La Russie et
l’Iran ont fait valoir leur point avec les 4 + 1 (Russie, Syrie, Iran, Irak ainsi
que le Hezbollah), qui sont engagés dans des combats terrestres et aériens en
Syrie contre les salafo-djihadistes de tout acabit, rebelles modérés ou autres.
Même
l’administration Obama a corrigé son tir, après maintes réunions entre le
secrétaire d’État Kerry et le ministre des Affaires étrangères Lavrov. Le tout
a culminé par ce face à face de 35 minutes rempli d’une signification profonde
entre Obama et Poutine autour d’une petite table en marge du sommet du G-20 à
Antalya dimanche.
Devinez qui
est resté sur la même longueur d’onde que Hollande jusqu’à la toute dernière
minute tragique ? La matrice idéologique englobant les divers courants
salafo-djihadistes, l’Arabie saoudite wahhabite et les larbins du CCG (Conseil
de coopération du Golfe). La récompense du gouvernement français :
l’obtention de juteux contrats de vente d’armes dont voici une liste partielle, à laquelle il faut
ajouter toutes les armes françaises destinées aux rebelles modérés.
C’est ainsi
que la France socialiste (le terme le plus honni à l’intérieur de la rocade à
Washington) mène sa propre Guerre mondiale contre le terrorisme : en
livrant des Rafales à Doha, ce pourvoyeur de rebelles modérés, et à Riyad, son
meilleur client, qui arme les salafo-djihadistes. Sans surprise, les affaires
sont fructueuses.
Il a fallu
un carnage sans précédent à Paris pour que Hollande, Fabius et le premier
ministre Valls sortent de leur torpeur et voient dans quelle direction souffle
le vent (mortel). C’est maintenant la guerre. Elle est sans merci. Elle est
contre Daesh.
Déjà à
Vienne samedi, Lavrov et Kerry, avec l’assentiment des laquais habituels (à
contrecœur dans certains cas), ont fini par s’entendre pour désigner le front
al-Nosra, alias Al-Qaïda en Syrie, comme un groupe terroriste et non comme des rebelles
modérés.
Bien peu en
Occident se rappelleront qu’il y a quelques semaines à peine, ce
plastronneur de Fabius a chanté les louanges du front al-Nosra en disant
qu’il faisait «du bon boulot».
Après avoir
annoncé la version française remixée de la guerre contre la terreur déclarée
par Bush en 2001, Hollande a aussitôt commencé à bombarder Raqqa, la capitale
du faux califat. À Antalya, Fabius a dit qu’il s’agissait d’une décision
politique, en annonçant que les Français devaient être présents et actifs après
le massacre de Paris.
Le terme
actifs devrait être interprété au mieux comme la preuve d’une absence
d’engagement jusque-là. Mais est-ce une décision politique ? Pas vraiment.
Elle frôle davantage l’illégalité. Daesh n’est pas un État, même s’il se désigne
lui-même comme un califat. En supposant que le droit international s’applique,
plaider la légitime défense comme le fait la France est illégal. Paris n’a pas
été invitée non plus par Damas à frapper à l’intérieur du territoire syrien,
contrairement à l’armée de l’air russe.
À peine
sorti de son incroyable torpeur, le gouvernement français se devait de frapper
Raqqa, car après tout, l’attention du monde entier était tournée vers lui. Des
raids coordonnés ont eu lieu partout en France, à Toulouse et Grenoble, et
aussi à Calais. Le seul porte-avions à propulsion nucléaire français et chien
de garde (naval) numéro un de l’Europe, le Charles-de-Gaulle, quittera Toulon
jeudi pour le golfe Persique. Hollande a vanté fièrement la mission, en disant
qu’elle donne un élan à la force de frappe de Paris.
On passe de
la torpeur à la fermeté. Mais pourquoi avoir attendu jusqu’à maintenant ?
C’est le pétrole, idiot !
Le djihad à
Paris a fait ressortir l’existence d’un spectre conceptuel calibré, savamment
cartographié par des initiés français – le quartier où j’habite, le 10e,
a été visé. Ma première réaction, publiée sur ma page Facebook, a été de me
tourner vers les rapatriés de Syrak. Je ne parle pas ici des kamikazes
habituels d’al-Zawahiri qui cachent leurs bombes dans leurs slips. Nous avons
affaire ici à des blancs, ultra-pros, vêtus de noir de la tête aux pieds, AK-47
à la main, super bien entraînés et qui tuent avec précision, comme l’ont décrit des témoins.
Après les
horribles faits, les services secrets français ont juré qu’ils surveillaient au
moins 200 titulaires d’un passeport français qui revenaient de Syrak. Pourtant,
la preuve qui se dégage – ou son absence – fait ressortir l’échec
monumental des services secrets et du ministère de l’Intérieur de la France.
Tellement de
raisons pouvaient expliquer ce retour de flamme. On n’a qu’à penser au
ressentiment que partagent des tas de jeunes musulmans qui ont l’impression
d’être traités comme des citoyens de troisième zone ; aux rebelles modérés
que dorlote la France ; aux guerres de Sarko 1er et du général
Hollande en Libye et au Mali ; à l’homme de main de l’Otan qu’est devenue
la France ; aux bombardements feutrés en Syrie ; sans oublier les
3 000 musulmans français ultras radicaux ayant retrouvé la foi qui
combattent en Syrie pour le faux califat.
Depuis août
dernier au moins, les services secrets français savaient que Daesh planifiait
un grand coup. Les services secrets de Bagdad les avaient avertis récemment et
il y avait même des rumeurs de 11 septembre français imminent. La France
frappait Daesh à l’occasion. Des étranges camps de formation la plupart du
temps, mais aussi des infrastructures pétrolières syriennes au hasard.
Daesh est
pratiquement devenu un État pétrolier. La province de Deir Ezzor produit
jusqu’à 40.000 barils de pétrole par jour, auxquels s’ajoutent 17 000
barils provenant d’autres puits. Daesh vend ce pétrole à des commerçants
indépendants (des trafiquants en fait), à un prix pouvant atteindre $45 le
baril. Bien que le pompage du pétrole demeure une source importante de revenu
dans le budget de Daesh, le faux califat profite encore, techniquement, d’une
infrastructure (vieillissante) qui appartient en définitive à l’État syrien.
Pour frapper Daesh où ça fait le plus mal, au lieu de se contenter de frappes
aériennes, la France (ainsi que les USA et la GB) devrait pouvoir se fier à ce
qu’elle ne possède pas, à savoir des services de renseignement hors pair sur le
terrain.
Ce qui nous
ramène à Raqqa. La capitale du faux califat est la plaque tournante de toute
cette contrebande de pétrole. Elle pourrait aussi devenir la future plaque
tournante du grand jeu autour du Pipelineistan, sous la forme de l’oléoduc
Iran-Irak-Syrie ou de son concurrent qatari.
Il ne faut
pas se leurrer. Les USA et la France surveillent Raqqa de très près. Cette
guerre prendrait fin en quelques jours si tous ces trafiquants, qui financent
en fait Daesh, étaient repérés et arrêtés (on revient aux services de
renseignement sur le terrain). Le flux monétaire pourrait être intercepté
facilement.
Mais
savez-vous qui empêche l’adoption de cette solution ? Les services secrets
turcs, parce que l’obsession d’Ankara demeure qu’Assad doit partir, pas Daesh.
Il est absolument impossible de défaire Daesh à partir du ciel tant et aussi
longtemps que les suspects habituels, notamment les intérêts pétromonarchiques
du Golfe et les néo-ottomans d’Erdogan, continuent de soutenir Daesh directement
sur le terrain, au moyen de subterfuges infinis, ou en ignorant tout simplement
ses opérations.
La bonne
nouvelle, dans l’état actuel des choses, c’est que l’Armée arabe syrienne
(AAS), avec le soutien des frappes aériennes russes, a libéré la base aérienne
de Kuweires pas loin d’Alep, tandis que les Peshmergas kurdes, avec le soutien
des frappes aériennes des USA, ont libéré Sinjar en Irak, à l’ouest de Mossoul.
Daesh aura donc bien du mal à se déplacer entre Mossoul et Raqqa et dans ces
villes. Cela pourrait être le signal que Daesh va perdre peu à peu le contrôle
des champs pétrolifères du nord-est de la Syrie.
Ce qui est
certain pour l’instant, c’est que lorsque Daesh est passé à la vitesse
supérieure, aucun service secret ne l’a vu venir.
Ils ont
attaqué la Russie en faisant tomber l’Airbus de Metrojet (par l’entremise
de leur rejeton au Sinaï).
Ils ont
attaqué le Liban, tous les chiites et le Hezbollah – et indirectement l’Iran –
avec l’attentat dans le quartier chiite de Burj el-Barajneh à Beyrouth.
Autrement dit, une attaque contre les 4 + 1 (la Russie, la Syrie, l’Iran,
l’Irak ainsi que Hezbollah).
Ils ont
attaqué l’Otan au cœur de Paris (l’acte de guerre de Hollande implique une
attaque contre tous les membres de l’Otan y compris, aussi incroyable que cela
puisse paraître, ce pourvoyeur de rebelles modérés qu’est la Turquie).
L’avantage
stratégique d’ouvrir une guerre sur trois fronts (et d’attaquer la Russie et
l’Otan presque simultanément) est plus que douteux. Bien que Daesh soit blindé
de pognon, grâce aux bénéfices provenant largement de l’extorsion, du pillage
systématique et de la contrebande de pétrole, en plus des billets que font
pleuvoir de généreux donateurs des pays du CCG, on peut dire qu’il dépasse un
peu les bornes.
La connexion belge
Pour revenir
à Paris, mon hypothèse de travail initiale a été immédiatement confirmée. Les
services français ont commencé à se concentrer sur une seule cellule formée de
rapatriés de Syrie comme auteurs de l’attentat, jusqu’à ce que l’enquête
s’étende (par accident) vers la connexion belge et trois équipes de terroristes
coordonnées, selon le procureur de Paris.
Tout cela
après la découverte d’un ticket de stationnement dans une VW Polo, qui a amené
les services français vers Molenbeek, alias le petit Maroc, au nord-ouest du
centre-ville de Bruxelles. Ce quartier est une plaque tournante notoire de
rapatriés de la Syrie, où pullulent de nombreuses cellules salafistes et
salafo-djihadistes clandestines et suspectes. Au moment d’écrire ces lignes, au
moins sept personnes ont été prises au filet de l’enquête pan-européenne à
Molenbeek, là où la Polo a été louée. Dans les années suivant le 11 septembre,
je blaguais auprès de mes amis et de mes sources sur
place, disant à mon retour du Golfe, que je m’étais senti à la maison
en me baladant dans le secteur.
Les services
belges savent tout ce qu’il faut savoir sur l’état des choses. Le problème,
c’est qu’ils ne peuvent absolument rien faire, même si la Belgique abrite
la proportion la plus élevée de djihadistes de Syrak par habitant. Selon
les chiffres officiels, 494 djihadistes ont été identifiés, 272 sont toujours
en Syrak, 75 sont présumés morts, 134 sont revenus et 13 ont pris le chemin du
Levant.
Les
enquêteurs français seraient donc tombés sur la piste belge par hasard. Quel
échec retentissant des services de sécurité et du renseignement
intra-européen ! Ce qu’ils savaient au mieux, c’est qu’une bande de
djihadistes locaux (les rapatriés) préparait un coup, dont faisaient partie des
spécialistes des munitions capables de fabriquer des vestes suicide Made in
Europe, et des fantassins capables de se procurer des Kalachnikovs au marché
noir à 300 euros pièce dans les Balkans, comme Europol le sait très bien.
Ce sont les
soldats de l’armée européenne du calife Ibrahim. Ils sont jeunes. Ils sont nés
et ont grandi dans l’UE. Ils ont habituellement une double nationalité. Ils
sont statistiquement invisibles. Ils sont totalement intégrés à la vie locale.
Ce qui m’a d’abord frappé à Paris, c’est que leurs cibles dans le 10e
et le 11e ont été soigneusement choisies.
Leur loyauté
va à un État virtuel déterritorialisé (si seulement Deleuze et Guattari 1 étaient vivants pour le conceptualiser),
ainsi qu’à la version XXIe siècle remixée de ce grand classique de
1574 d’Étienne de la Boétie qu’est le Discours de la servitude volontaire. Ce
sont des musulmans qui ont retrouvé la foi, qui sont nés et qui ont grandi dans
l’Occident développé, que le djihadisme wahhabo-salafiste a troublés et qui ont
choisi de devenir les esclaves d’une entité nébuleuse assurant le commandement
et le contrôle qui est la personnification même de la barbarie.
Ils
apprennent à utiliser des armes, la technologie, le camouflage et les
techniques de communication juste pour devenir des soldats esclaves, en se
soumettant de leur plein gré à la servitude. Le mécanisme infernal est simple.
Une fois rapatrié de Syrie, tu reçois ton diplôme local, fin prêt à t’en
prendre à la république laïque qui t’a délivré ton passeport.
Quant à la
notion voulant que cette petite armée invisible bénéficie du soutien de
millions de gens, elle ne tient pas la route. Les musulmans de France, qui sont
presque cinq millions, sont pour la plupart laïcs, à des années-lumière du
salafo-djihadisme.
Dites bonjour au djihadiste des réseaux sociaux
Ayons une
petite pensée pour la BRI (Brigade de recherche et d’intervention) en France,
qui cherche désespérément à dresser le profil de cette armée invisible à
l’idéologie tordue inspirée de « Né pour tuer ». Mais la BRI n’intervient qu’à la
dernière minute, comme lorsqu’elle a investi le Bataclan et abattu l’équipe
formée de trois tueurs.
C’est la
DGSI (les services internes français) qui est sur la sellette, car nous avons
appris qu’au moins un des tueurs français identifiés était placé sous
surveillance depuis 2010 et qu’il était considéré comme un radical. Une
rationalisation des services s’impose sérieusement en France, avec la DGSI, la
section antiterroriste de la préfecture de police et la SDAT (la Sous-direction
antiterroriste) qui se font concurrence.
Il pourrait
s’agir soit d’un manquement majeur de la part des services secrets, soit d’une
impuissance de l’administration française à agir à partir des renseignements
obtenus. Mais l’échec est bien réel. Daesh a de facto déjoué ce qui est
considéré comme un des meilleurs dispositifs de renseignement de l’Occident.
Mais est-ce bien le cas ?
La vedette
du spectacle semble être cet homme souriant, Abdelhamid Abaaoud,
alias Abou Omar Al-Baljiki, que les services français
soupçonnent maintenant d’être le cerveau présumé du massacre de Paris.
Tu parles
d’une superstar djihadiste ! Il adore les médias sociaux, donne des
interviews aux organes de presse djihadistes, organise des attentats (le plus
récent, en janvier dernier, a échoué), humilie les services de sécurité belges
avec ses allers-retours entre l’Europe et la Syrie, et parvient toujours à
concocter une évasion spectaculaire. Comme personnage, il bat sans peine Ben
Whishaw dans le rôle de « Q ».
D’autres
différences ressortent lorsqu’on compare les trois équipes qui ont pris part au
carnage à Paris.
L’équipe
affectée au Stade de France était composée de pigeons à deux sous qui ont tenté
d’entrer dans un stade au moment d’un match de football jouissant d’une grande
visibilité avec une forte présence policière, en portant leur veste de suicide.
De simples martyrs considérés comme quantité négligeable, avec passeport syrien
et tout.
L’équipe du
Bataclan était formée de tireurs calmes et relativement expérimentés, mais des
martyrs quand même. Ils savaient qu’une prise d’otages en France ne pouvait
finir qu’avec leur martyr. Une quantité moins négligeable, mais négligeable
quand même.
Le cœur du
problème, c’est l’équipe voiturée. Ou plutôt les équipes. L’enquête ne semble
rien savoir à ce sujet. D’après les témoins, les tueurs à La Belle Équipe sont
arrivés en Mercedes noire. On ne parle de cette Mercedes nulle part. Les tueurs
étaient ultra-pros, musclés, méthodiques… et blancs.
Ceux-là ne
sont pas considérés comme quantité négligeable. Ce sont des mercenaires payés
au prix fort. Pendant que tout le cirque médiatique s’étend de Grenoble et
Toulouse à Bruxelles et même à Raqqa, ils ont tout simplement disparu sans
laisser de trace. Personne ne sait qui les a embauchés. Ce serait étonnant que
ce soit le djihadiste des réseaux sociaux al-Baljiki.
Examinons
maintenant de près cette réunion tenue dans le
D.C. (Washington District of Columbia, USA), il y a un peu plus de deux
semaines avant la tragédie de Paris. On y trouve John Brennan de la CIA, le
directeur de la DGSE (sécurité extérieure) Bernard Bajolet, l’ancien chef du
M16 John Sawers (appelons le l’ex « M ») et l’ancien conseiller à la
sécurité nationale israélienne Yaacov Amidror.
Bajolet nous
apprend qu’au moins 500 djihadistes français provenant de Syrak pourraient
présenter une menace, comparativement à 4.000 dans le cas de la Russie
(c’est ce qui explique la détermination de Poutine à combattre le djihadisme
sous toutes ses formes). Bajolet précise qu’une coopération entre tous les
services doit être parfaite, pour éviter tout angle mort. Ce ne sont pas les
angles morts qui ont manqué dans la tragédie parisienne. Cette coopération,
elle doit être panoccidentale. Ce qui comprendrait la saisie par la NSA de
l’ensemble des bavardages de la planète.
Sans
surprise, Brennan a parlé en novlangue-CIA (sécurité opérationnelle poussée,
etc.). Il a au moins admis l’existence d’un problème logistique ahurissant
associé au traitement, à la conservation et à la communication de tant
d’informations.
Ce qui est
remarquable, c’est que Bajolet préjuge l’échec des services du renseignement à
Paris en disant que les Français ont prévenu un certain nombre d’attaques en
collaboration avec la CIA et la NSA. Comment se fait-il alors que la NSA n’ait
saisi aucun bavardage avant les attentats de Paris du 13 novembre ?
Bajolet préjuge encore, en disant que de tels attentats sont difficiles à
détecter lorsqu’ils proviennent de notre propre territoire. Dans les faits,
l’enquête sur les attentats de Paris du 13 novembre nous apprend qu’ils ont été
en bonne partie conçus à Bruxelles.
La stratégie de la peur
Alors que
veut Daesh ?
Il est assurément
justifié de soutenir qu’il est dans l’intérêt de Daesh de provoquer une forte
réaction négative à l’endroit des réfugiés et de faire en sorte que les portes
de la forteresse Europe soient hermétiquement fermées. C’est ce qui semble être
la feuille de route. Les frontières de la France sont fermées jusqu’à nouvel
ordre. Schengen se dissout déjà. Le front politique de droite, anti-immigration
véhément, qui s’étend dans toute l’Europe ne peut que se réjouir. C’est
pourtant l’establishment de l’UE qui s’approprie un programme anti-immigration.
C’est qu’on est en train d’inclure insidieusement dans le discours des
accusations contre les réfugiés, à partir du (faux) passeport syrien découvert
au Stade de France.
La stratégie
de Daesh, c’est de semer la peur et le chaos. Ils veulent que les capitales
occidentales (Paris, Londres, New York) vivent dans la crainte. Ils veulent
aussi attirer les bottes occidentales sur le terrain en Syrie. Ce serait un
cadeau du ciel : les croisés nous envahissent une fois de plus. Vous
pouvez imaginer le recrutement pour Jihad & Cie battant tous les records.
La seule
façon réaliste d’écraser Daesh, lentement mais sûrement, est une étroite
collaboration entre le 4 + 1 (l’armée syrienne et les combattants iraniens et
du Hezbollah avec la couverture aérienne de la Russie), les Kurdes (du PKK et
du YPG et même les Peshmergas) et, s’ils le souhaitent vraiment cette fois-ci,
les membres responsables de la Coalition des opportunistes tordus (COT) dirigée
par les USA.
Une
coalition internationale globale pour lutter contre Daesh est très bien. Mais
garder la Turquie, l’Arabie saoudite et le Qatar à la table de négociation de
la mascarade de Vienne est une plaisanterie. Surtout quand nous vient en tête
l’image de Paris qui dorlote servilement tous ces pourvoyeurs, sponsors,
argentiers et armuriers des salafo-djihadistes à Riyad et Doha.
Les brutes
du faux califat ont prévenu que ce n’était que le début de la tempête. Pour
braver la tempête en luttant contre cette armée très petite, extrêmement mobile
et invisible, il faudra trouver un nouveau concept d’Europe fédérale, avec une
politique commune en matière de défense et de politique étrangère radicalement
différente. Mais ça, ce n’est pas prêt d’arriver !
Ce qui
reste, c’est la lutte qui s’impose contre le califat sur place. Les frappes
aériennes ne suffiront pas. Seule une véritable alliance politique de grande
envergure fera l’affaire (c’est ce que Poutine a tenté d’imprimer dans la tête
d’Obama à Antalya). Le problème sera de rallier le sultan Erdogan et le roi
Salmane à la cause.
Voyons
maintenant combien de temps s’écoulera avant que des bottes de l’Otan ne
foulent le sol syrien. Car c’est sur cela que mise Daesh.
- Auteurs de l’Anti-Oedipe – Capitalisme et Schizophrénie, livre difficile mais à lire absolument pour comprendre l’époque actuelle, NdT