L'État islamique (ou Daech), qui contrôle un territoire à cheval entre la Syrie et l'Irak grand comme la moitié de la France,
a mis la main sur une dizaine de champs de pétrole, et produit, selon
les estimations de plusieurs instituts de recherche sur le terrorisme et
des reportages sur le terrain, entre 20.000 et 40.000 barils de pétrole
par jour (à titre de comparaison, la Syrie produisait 385.000 barils
par jour en 2010, avant la guerre civile). Daech engrangerait entre 1 et
1,5 million de dollars par jour de son activité pétrolière, soit entre
350 et 600 millions de dollars par an.
Même s'il faut rester prudents sur ces chiffres en réalité invérifiables, il fait globalement consensus que les recettes tirées de l'or noir par Daech représentent entre un quart et un tiers de ses ressources financières globales, le reste étant le «fruit» de taxes usurières imposées aux 10 millions d'habitants sous contrôle de Daech, d'extorsions, de trafics en tout genre (art, armes, organes, esclavage humain, etc.) et de donations.
Même s'il faut rester prudents sur ces chiffres en réalité invérifiables, il fait globalement consensus que les recettes tirées de l'or noir par Daech représentent entre un quart et un tiers de ses ressources financières globales, le reste étant le «fruit» de taxes usurières imposées aux 10 millions d'habitants sous contrôle de Daech, d'extorsions, de trafics en tout genre (art, armes, organes, esclavage humain, etc.) et de donations.
L'affaiblissement pétrolier de Daech
Sans entrer dans la bataille des chiffres sur les recettes pétrolières et gazières de l'État islamique, il est évident que ses revenus en hydrocarbures ont fortement diminué ces derniers mois. Depuis la prise de Mossoul, deuxième ville d'Irak, par Daech le 6 juin 2014 - date qui a signé l'auto-proclamation du «Califat» État islamique - la coalition internationale (États-Unis, France, Royaume-Uni, canada, Australie, Allemagne, Italie) a ciblé le réseau pétrolier de Daech, pour affaiblir financièrement le groupe terroriste considéré comme le plus puissant et le mieux organisé de l'Histoire. Depuis lors, plus de 11.000 frappes aériennes ont été menées par la coalition occidentale, visant particulièrement les raffineries, les sites de stockages, les oléoducs et, depuis tout récemment les camions de transports.En octobre 2015, les Américains ont lancé une opération baptisée «Tidal Wave II» qui visait expressément les camions-citernes. Début novembre, la France bombardait un centre d'approvisionnement vers Deir ez-Zor, particulièrement gros. Depuis les attentats de Paris du 13 novembre dernier, les frappes se sont intensifiées: le Pentagone a annoncé avoir détruit 400 camions-citernes tandis que les Russes en revendiquaient la destruction de 1000.
Pourquoi ne pas détruire les puits de pétrole directement?
Ainsi
la puissance pétrolière de Daech est-elle affaiblie, mais pas anéantie.
À dessein: la coalition refuse de détruire directement les puits de
pétrole contrôlés par Deach. «Certes, militairement, priver l'accès au
pétrole à Daech serait efficace, explique Francis Perrin, président de
Stratégies et Politiques Energétiques. Mais sur le plan idéologique,
attaquer le pétrole à sa source pourrait s'avérer contre-productif. Car
ce serait prendre le risque de se mettre à dos la population civile,
dont le patrimoine serait attaqué». Anéantir la production de pétrole
sur le territoire de Daech, reviendrait à priver de ressources les
civils qui se déplacent, travaillent, se nourrissent, s'éclairent, et se
soignent «grâce» au pétrole de Daech. Dans son enquête édifiante, le Financial Times
rapporte les propos d'un rebelle syrien à Alep: «C'est une situation
qui fait rire et pleurer à la fois, mais nous n'avons pas d'autre choix,
nous sommes de pauvres révolutionnaires, et personne d'autre (que
Daech, NDLR) ne nous fournit du pétrole».
«L'objectif de la
coalition est d'éviter au maximum que la population ne souffre
davantage. Mais cela ne veut pas dire que cela ne devra pas arriver»,
commente encore Francis Perrin.
Comment Daech produit-il du pétrole ?
On
estime aujoud'hui que Deech ne contrôle plus qu'une dizaine de champs
pétroliers, principalement dans la région de Deir ez-Zor (voir la carte
ci-dessus). D'un point de vue opérationnel, le groupe terroriste compte
sur la collaboration, forcée ou volontaire, de professionnels qui
étaient sur place au moment de la prise de contrôle des sites de
production ou de raffinage. Par ailleurs, Daech recrute - au prix fort -
des personnes de grande expérience et compétences (techniciens,
ingénieurs, traders...), en Syrie et en Irak mais aussi à l'étranger,
pour améliorer la productivité de ses sites vieillissants.
Daech
produit donc encore du pétrole: entre 30.000 et 45.000 barils par jour,
contre au moins 70.000 barils par jour l'année dernière. Pour rappel,
dans le monde chaque jour, plus de 90 millions de barils sont produits.
Comment Daech écoule-t-il sa production de pétrole?
Contrairement au reste de ses activités, le pétrole est géré de manière très centralisée.
Une fois extrait, le pétrole est vendu à des commerçants indépendants :
des acheteurs (de Daech ou des contrebandiers) qui font la queue
parfois plusieurs semaines dans leur camion, avant de pouvoir s'en
procurer. Lorsqu'ils ont chargé le pétrole, soit ils vont le revendre
directement à des raffineries alentours, soit ils le vendent directement
aux populations locales qui vont le raffiner artisanalement, avant de
retourner... faire la queue. Entre temps, Daech aura appliqué des péages
à tous les camions.
Daech raffine peu lui-même, car beaucoup de
ses raffineries ont été détruites par la coalition. Mais le groupe
terroriste a trouvé des arrangements - financiers bien sûr - avec les
propriétaires de raffineries en fonctionnement. Une fois le raffinage effectué, des marchands revendent le pétrole raffiné sur des «marchés du pétrole»
(signalés en vert avec le signe «$» sur la carte ci-dessus), présents
dans la plupart des villes proches des raffineries. Ces marchés sont
contrôlés directement ou indirectement par Daech: pour chaque baril
acheté, l'organisation terroriste touche un billet.
Les prix
estimés de vente du pétrole de Daech varient entre 15 et 45 dollars le
baril selon la qualité du pétrole. Sur le marché officiel du pétrole, le
baril de Brent, principale référence mondiale, s'échange ces jours-ci
autour de 45 dollars.
Comment Daech exporte-t-il son pétrole?
Avec
son pétrole, Daech s'auto-suffit. Environ la moitié des ressources
pétrolières sont utilisés pour ses propres équipements militaires et
pour les besoins de la population contrôlée (transports, centrales
électriques, groupes électrogènes. Puis il reste une partie de la
production pour l'exportation, via des réseaux de contrebande terrestre
déjà bien établis dans la région, puisqu'ils existent et prospèrent
depuis qu'un embargo a été établi contre le régime de Saddam Hussein...
il y a 25 ans. Ces réseaux clandestins permettent au pétrole «made in
Daech» de passer les «frontières» , par petites quantités transportées
parfois à dos d'âne ou de cheval ou acheminées via des mini-oléoducs de
contrebande. Ainsi le pétrole des islamistes parvient en Syrie, en Irak,
en Jordanie, mais surtout en Turquie. Même le gouvernement syrien de
Bachar el-Assad achète du pétrole à l'État islamique. Ce mercredi, les
États-Unis ont annoncé des sanctions financières contre un intermédiaire
du gouvernement Assad «pour l'achat de pétrole en provenance de l'EI».
Pour
effectuer les transactions, Daech a mis en place un réseau de «bureaux
de change» où les transactions s'effectuent de la main à la main, comme le montre un documentaire d'Arte.
Pourquoi la Turquie ne ferme pas ses frontières?
Lorsque la population s'est soulevée contre Bachar el-Assad
en Syrie en 2011, le gouvernement turc s'est désolidarisé de Damas,
s'estimant «du bon côté de l'Histoire». La Turquie apporte alors un
soutien logistique et matériel à l'opposition syrienne. Mais à partir de
2013, cette opposition - éclatée - se radicalise. Des groupes
extrémistes se forment, dont l'État islamique en Irak et au Levant
(ISIL), désormais couramment appelé État islamique ou Daech, son
acronyme arabe. Dès lors, la Turquie joue un double-jeu qui consiste à
afficher sa position «modérée» auprès de l'Occident, sans jamais perdre
le cap de sa lutte contre Assad... quitte à épauler Daech. En juillet
dernier, quand les Américains ont tué Abou Sayyaf, un des dirigeants
financiers de Daech, des documents ont été retrouvés, qui, rapportait le Guardian, établissaient des liens directs entre la Turquie et Daech. Pour se «racheter», la Turquie avait lancé des attaques sur les zones de combat, qui ont finalement plutôt ciblé... les Kurdes. Face à l'évidence, la Turquie se retrouve prise dans son propre piège. Et ses frontières avec la Syrie sont toujours poreuses.
La famille Erdogan éclaboussée par le pétrole de Daech
En commentant la tragédie du SU24 abattu par les Turcs sur le territoire syrien, le
président russe Vladimir Poutine a ouvertement accusé la Turquie
d'implication dans le financement de Daech via l'achat de pétrole
illégal auprès de l'organisation.
La participation de certains membres du G20 au financement de Daech a
été également évoquée lors du dernier sommet de l'organisation à
Antalya. Quelque temps après, le public a pu également prendre
connaissance de l'envergure du trafic créé par les djihadistes. Suite à
cet avertissement lancé à Antalya, les forces aériennes russes ont lancé
une chasse aux colonnes de camions-citernes transportant du pétrole de
Daech.
Jusqu'à récemment, ces actions étaient un secret de polichinelle. Les
alliés occidentaux de la Turquie taisaient pudiquement l'implication
d'Ankara dans le trafic pétrolier de Daech, mais la presse a tout de
même pu publier certaines informations. De jour en jour, les preuves se
sont accumulées et il est désormais absolument clair que Daech est une
sorte d'entreprise familiale pour le président turc et ses enfants — son
fils Bilal et sa fille Sümeyye.
Népotisme, favoritisme, corruption, polygamie et tutti quanti sont des spécificités islamistes. Nous les voyons partout où cette secte gouverne ou a gouverné : Tunisie, Égypte, Pays du Golfe (Arabie, Qatar, EAU, Koweït). Le sultan Erdogan ne déroge pas à la règle.
D'après la presse turque, Bilal Erdogan possède la société de transport maritime BMZ Group qui a des amarrages spéciaux dans les ports de Beyrouth et de Ceyhan, depuis lesquels le pétrole de contrebande est transporté vers les consommateurs japonais.
L'opposition
turque est aux trousses du fils du président et rêve de le voir un
jour derrière les barreaux. Mais bien que Bilal Erdogan soit mouillé
dans l'activité des terroristes, il sera protégé contre toute poursuite
judiciaire tant que son père sera chef de l'État.
La fille du président, Sümeyye, mène une activité aussi intense que
son père et son frère. Selon les médias, elle parraine un hôpital
militaire dans le sud-est de la Turquie qui soigne des combattants de
Daech transportés depuis la Syrie. Global Research News a obtenu ces informations d'une employée de l'hôpital sous couvert
d'anonymat.
Ainsi, les intérêts commerciaux et politiques des Erdogan sont liés à Daech de manière assez particulière. Le soutien politique de la Turquie a longtemps permis à l'organisation terroriste d'élargir son influence et d'occuper des territoires des pays voisins, alors que les revenus "blanchis" par les Erdogan revenaient dans le budget des djihadistes, les aidant à poursuivre leur expansion.
Il est évident que l'intérêt du président turc ne réside pas que dans le banal enrichissement. L'agent n'est ici qu'un moyen d'atteindre un objectif majeur qui est, selon les experts, rien d'autre que la reconstruction de l'Empire ottoman. Erdogan rêve de détrôner l'héritage de Kemal Ataturk pour lever sur la Turquie le drapeau vert de l'islam. C'est pourquoi il a besoin de Daech et du pétrole. Et la Russie a perturbé ses plans, ce qui explique sa colère.
Népotisme, favoritisme, corruption, polygamie et tutti quanti sont des spécificités islamistes. Nous les voyons partout où cette secte gouverne ou a gouverné : Tunisie, Égypte, Pays du Golfe (Arabie, Qatar, EAU, Koweït). Le sultan Erdogan ne déroge pas à la règle.
D'après la presse turque, Bilal Erdogan possède la société de transport maritime BMZ Group qui a des amarrages spéciaux dans les ports de Beyrouth et de Ceyhan, depuis lesquels le pétrole de contrebande est transporté vers les consommateurs japonais.
Ainsi, les intérêts commerciaux et politiques des Erdogan sont liés à Daech de manière assez particulière. Le soutien politique de la Turquie a longtemps permis à l'organisation terroriste d'élargir son influence et d'occuper des territoires des pays voisins, alors que les revenus "blanchis" par les Erdogan revenaient dans le budget des djihadistes, les aidant à poursuivre leur expansion.
Il est évident que l'intérêt du président turc ne réside pas que dans le banal enrichissement. L'agent n'est ici qu'un moyen d'atteindre un objectif majeur qui est, selon les experts, rien d'autre que la reconstruction de l'Empire ottoman. Erdogan rêve de détrôner l'héritage de Kemal Ataturk pour lever sur la Turquie le drapeau vert de l'islam. C'est pourquoi il a besoin de Daech et du pétrole. Et la Russie a perturbé ses plans, ce qui explique sa colère.