Préoccupée par l'instabilité sécuritaire en Tunisie, l'Algérie
voisine a lancé un véritable plan de guerre. Au programme : renforcer la
sécurité aux frontières et traquer les complices de Daech au sein des
services tunisiens.
Déploiement militaire
Un cas qui fait vraiment peur aux autorités Algériennes.
L’extraordinaire attaque de Sousse où 39 personnes ont été exécutées
sauvagement sur une plage a troublé le jeu de cartes d’Alger. «Les
autorités militaires ont été vraiment surprises et choquées par la
facilité déconcertante avec laquelle un jeune étudiant a pu commettre un
tel carnage», confie d’emblée une source militaire algérienne qui nous
certifie qu’au lendemain de cet attentat terroriste, une secrète réunion
a regroupé plusieurs généraux-majors en présence de leur chef
hiérarchique Ahmed Gaïd Salah de l’armée à Algérienne à Ain Naadja, dans
la banlieue d’Alger, où se trouve le commandement des forces terrestres
de l’armée algérienne.
« C’est un lieu plus sûr, à l’abri d’une quelconque fuite ou d’une
tentative d’espionnage», relate notre source selon laquelle de nombreux
chefs militaires algériens ont proposé à Gaïd Salah d’adopter une
nouvelle feuille de route car la situation a dégénéré dangereusement en
Tunisie. Lors de cette réunion, les deux Généraux Noureddine Haddad,
chef d’Etat-Major de la 1ère région militaire, et Khelifa Ghaouar, chef
d’Etat-Major de la 5ème région militaire, ont dressé un tableau noir de
l’incapacité de la Tunisie à lutter toute seule contre la menace de
Daech, rapportent nos informations. «Ces deux hauts gradés très
influents et qui bénéficient de la confiance de Bouteflika ont suggéré
de passer à l’action et de renforcer le déploiement militaire à nos
frontières. Ils ont même appelé à faire des exercices en cas d’attaques
contre des cibles algériennes. Gaïd Salah a acquiescé», nous expliquent
plusieurs militaires algériennes qui nous explicitent le contexte dans
lequel a été prise la décision de déployer 12.000 soldats algériens des
différentes unités de l’armée nationale et populaire (ANP). Ces
militaires algériens se sont positionnés au niveau de la Wilaya de
Annaba, jusqu'aux limites sud de la frontière commune aux trois pays,
dans la Wilaya de Oued Souf.
Leur mission est simple : se préparer à traquer les éventuels
éléments de Daech. Mais pas seulement, car ils devront contrôler le flux des
voyageurs tunisiens qui vont transiter par la frontière tunisienne.
«Oui, l’armée algérienne sait très bien que Daech finira tôt ou tard à
se rapprocher de ses frontières. Jusque-là, Gaïd Salah et ses généraux
ont cru que le danger viendra des frontières libyennes. Mais,
aujourd’hui, ils découvrent que la frontière tunisienne est encore plus
fragile», détaille un ancien colonel à la retraite qui a gardé de très
bonne relations dans l’establishment militaire algérien.
Défaillances des renseignements tunisiens
Comment est-ce possible ? «Les services de sécurité tunisiens ne
rassurent pas les Algériens», explique notre source. Preuve en est, 24
heures après l’attaque de Sousse, le général Bachir Tartag, le très
bien informé et influent général du DRS devenu depuis 2014 conseiller à
la Présidence sous l’égide de Bouteflika, rédige un rapport sur les
défaillances des services de sécurité tunisiens sont pointés du doigt.
Dans ce rapport, «le scénario de la tuerie perpétrée uniquement par un
seul étudiant est très contesté. Un seul jeune homme n’aurait jamais pu
réussir à assassiner en quelques minutes 39 personnes à l’aide d’une
Kalachnikov», nous révèlent des sources proches de Tartag, l’ex numéro 2
du DRS.
Ce dernier soupçonne tout simplement une complicité au sein des
services de sécurité tunisiens. Le conseiller de Bouteflika craint la
constitution d’un noyau fort de Daech au sein de l’appareil sécuritaire
tunisien. [ Note d'Hannibal GENSERIC : c'est ce que j'ai toujours affirmé. Ennahdaesh a gangrené l'armée et la police]. Pour vérifier cette menace, Tartag a proposé que le DRS
multiplie les missions de renseignement pour identifier les relais de
Daech au sein des services tunisiens. Une note a été pondue dans ce sens
et adressée au chef du patron de la Direction de la Documentation et de
la Sécurité Extérieure (DDSE), le général Mohamed Bouzit dit Yacef. Les
informations recueillies par les services algériens seront, par la
suite, utilisés pour les transmettre aux décideurs tunisiens afin qu’ils
puissent prendre les bonnes décisions.
Entre un Gaïd Salah qui veut verrouiller la frontière tunisienne et
un Bachir Tartag qui soupçonne une infiltration terroriste au sein des
services de sécurité tunisiens, Alger a développé ses derniers jours une
véritable paranoïa. Une paranoïa qui ne l'a pas empêché de lancer un
plan de guerre.