La présente interview confirme ce que nous écrivions le 13 juin 2012 dans l'article intitulé : Moyen Orient : Le plan américano-israélien.
En effet, l'ancien
patron du renseignement extérieur allemand (BND, l'équivalent de la CIA américaine), August Hanning, a
affirmé que la division du Moyen Orient selon de nouvelles frontières
n’est pas une simple spéculation, mais c’est plutôt un projet mûr.
Dans une interview accordée au journal libanais Assafir depuis Bruxelles où il participe à un congrès sur la sécurité, Hanning s’est demandé :
« A quel point le Moyen-Orient constitue une région stable ? Qu’en
est-il de la situation régionale depuis l’accord de Sykes-Picot ? Cette
région est-elle stable ou non depuis la Première guerre mondiale ? ».
« A mon avis, cette région n’est pas stable effectivement, et nous devons repenser une nouvelle structure sécuritaire », a-t-il répondu.
Interrogé sur la nature de cette nouvelle structure, Hanning a dit : «
C’est une question très compliquée. Depuis la Première guerre mondiale,
des frontières très factices ont été mises en place. Regardez l’Irak,
c’est un pays factice. La Syrie, je pense qu’elle est différente. Mais
maintenant, en Irak, des combats ont eu lieu entre sunnites, chiites et
kurdes. Je pense qu’il est difficile de se figurer que ces communautés
puissent cohabiter en fin de compte ».
Faisant le jeu de
l’Occident, cet ancien responsable de renseignement allemand défend
l’idée selon laquelle le conflit en Irak est sectaire, et omet de
mentionner le rôle occidental et américain dans l’aiguisement des haines
confessionnelles et dans le soutien aux groupes terroristes qui suivent
une politique ségrégationniste.
Lui-même partisan du projet de la division du Moyen-Orient, ce responsable allemand tente de justifier sa position : «
Citons l’exemple des Balkans, là où nous avons obligé les différents
groupes ethniques à bâtir un pays unique, à coexister et à être
tolérants. J’ai quelques doutes à ce sujet. Je pense que les frontières
actuelles peuvent ramener la paix en quelque sorte mais nous devons
envisager de tracer de nouvelles frontières au Moyen-Orient. La
chancellerie allemande n’est pas prête pour soutenir ces nouvelles
idées, mais en fin de compte, ceci nous aidera à aller de l’avant vers
une solution pacifique. Nous devons retracer de nouvelles frontières
dans la région ».
Grand connaisseur de la situation politique
et sociale libanaise, August Hanning, a dirigé le dossier du premier
échange de détenus entre l’Entité sioniste et le Hezbollah en 2004.
Interrogé sur la place du Liban sur l’échiquier international, celui-ci a répondu: «
Le Liban peut se mettre à l’abri bien que le feu de la région
l’atteigne. La question libanaise est très délicate. Dans les années 90,
il y avait un équilibre entre les différents groupes religieux et
ethniques. Aujourd’hui, un grand nombre de réfugiés y ont afflué. Je
pense que la plupart d’entre eux resteront au Liban. Tout le système
libanais est sous pression, compte tenu des différents poids des groupes
ethniques. J’espère que les dirigeants de ces groupes ethniques au
Liban pourront aboutir à un consensus pour garder la structure libanaise
spéciale. Cette structure a permis au pays de vivre en paix par le
passé. J’espère que ce système fragile actuellement puisse vaincre les
difficultés en provenance du voisinage ».
S’exprimant sur la
Syrie, le dirigeant sécuritaire allemand déplore que ce pays ait été
jadis très tolérant sur les questions religieuses, « mais non politiques
».
« Nous nous demandons quelle serait la meilleure
alternative en Syrie. Nous avons cru que l’opposition laïque pourra être
une bonne solution. Il s’est avéré que c’était de l’imagination pure.
Actuellement, nous sommes déçus. La meilleure solution passe par l’arrêt
des combats et la relance d’un véritable processus de paix regroupant
toutes les parties. L’opposition laïque n’est pas réaliste pour
l’instant ».
Bref, l’Occident est déçu, contrarié et acculé
au mur sur le conflit en Syrie. Celui-ci a révélé que le groupe du G7
réuni en Allemagne a débattu d’une transaction stipulant la destitution
du président syrien et l’entente avec son régime, sans fournir de
détails supplémentaires.
Partant toujours de la logique du
sectarisme, ce responsable allemand avait considéré en 2005 que le
groupe d’Abou Mossab Zarqaoui, dirigeant de la branche d’al-Qaïda en
Irak à l’époque de l’occupation américaine du pays, constituait un « exemple à suivre pour les groupes sunnites qui se disent avoir l’honneur de commettre des attentats sous sa bannière ».
August Hanning |
Au sujet de la fin imminente de la milice wahhabite takfiriste Daech, Hanning doute fort d’un sort pareil à court terme. «
Je ne trouve aucun groupe sur le terrain, capable ou désireux de mettre
fin à ce phénomène. J’ai même posé la même question au ministre turc
des Affaires étrangères sans obtenir de réponse ».
Quel est le rôle de l’Iran dans les combats contre Daech ? Hanning insiste sur le refus du camp adverse de soutenir la lutte iranienne. « Ils ont peur de la puissance iranienne. La Turquie fait certes partie des pays sunnites dans la région. Et en quelque sorte, Daech défend les intérêts sunnites dans la région, et certains pays sunnites éprouvent de la sympathie envers lui. Nous devons réaliser ce fait parce que ça fait partie du problème », a-t-il avancé.
August Hanning a présidé le BND (Bundesnachrichtendienst), le service secret allemand, de 1998 à 2005.Quel est le rôle de l’Iran dans les combats contre Daech ? Hanning insiste sur le refus du camp adverse de soutenir la lutte iranienne. « Ils ont peur de la puissance iranienne. La Turquie fait certes partie des pays sunnites dans la région. Et en quelque sorte, Daech défend les intérêts sunnites dans la région, et certains pays sunnites éprouvent de la sympathie envers lui. Nous devons réaliser ce fait parce que ça fait partie du problème », a-t-il avancé.
Traduit du site Assafir
Source et titre original : Ex-chef des renseignements allemands: le projet de "re division" du MO est mûr