« Je pense qu’une malédiction devrait reposer sur moi — parce que
j’adore cette guerre. Je sais qu’elle détruit les vies de milliers de personnes
à chaque moment — et malgré tout — je n’y peux rien — j’en aime chaque
seconde » — Winston Churchill, lettre à un ami (1916).
En ce
moment, une pluie d’articles salue la sortie du film Les heures sombres
sur Winston Churchill, une hagiographie qui n’a qu’un très lointain
rapport avec la réalité.
Que voici.
L’Afrique
était un terrain de jeu fascinant pour le jeune Winston. Né au sein de l’élite
britannique en 1847, éduqué à Harrow et Sandhurst, élevé dans la foi dans la
supériorité des blancs et leur droit à conquérir des peuples primitifs à peau
sombre pour leur apporter les bénéfices de la civilisation, il est parti dès
que possible pour prendre part à « tout plein de joyeuses petites
guerres contre des barbares », dont la violence s’expliquait par « une
forte tendance des aborigènes à tuer ».
Au Soudan,
il s’était vanté d’avoir personnellement tué au moins « trois
sauvages ».
En Afrique
du Sud, où « il était très amusant de galoper », il avait
défendu la construction de camps de concentration pour les Boers blancs, disant
qu’ils produisaient « un minimum de souffrances ». Le décompte
des morts s’élève à presque 28.000.
Quand au
moins 115.000 Africains ont été également enfermés dans les camps britanniques,
il a seulement noté son irritation, « parce que les Kaffirs sont
autorisés à tirer sur des blancs ».
Sur son
attitude envers les autres races, le médecin de Churchill, Lord Moran, a dit « Winston ne pense qu’à leur
couleur de peau ».
Churchill
s’était ensuite trouvé dans d’autres dominions britanniques. En tant que jeune
officier dans la Vallée Swat, aujourd’hui intégrée au Pakistan, Churchill avait
parlé d’une révélation passagère. La population locale, avait-il écrit dans une
lettre, combattait à cause de la « présence de troupes britanniques sur
des terres que les locaux considèrent comme leur appartenant » – tout
comme la Grande-Bretagne le ferait si la situation était inversée.
Cette pensée
oiseuse avait toutefois rapidement été oubliée, et il avait pris part à des
raids qui dévastaient des
vallées entières, détruisant des maisons et brûlant des champs, en
pensant que les « natifs » étaient des enfants sans défense qui
allaient « s’inclure naturellement, volontairement, avec reconnaissance
dans le cercle doré d’une ancienne couronne ».
Mais les rebelles devaient être écrasés avec une force
extrême. En tant que Secrétaire aux colonies en 1920, Churchill avait lancé les
voyous Black and Tans contre les civils irlandais catholiques, ce
qui démontrait l’hypocrisie de l’un de ses commentaires :
« Il
est évident que le christianisme, même dégradé et dévoyé par la cruauté et
l’intolérance, doit toujours exercer une influence modificatrice sur les
passions de l’humain et les protéger de fièvres de fanatisme encore plus
violentes, comme nous sommes protégés de la variole par la vaccination ».
Sa
vision paranoïaque de l’islam est étrangement familière (et
nous rappelle l’inénarrable Trump) :
« Mais
la religion mahométane augmente, au lieu de la diminuer, la furie de l’intolérance.
Elle a été originellement propagée par l’épée, et depuis, ses adhérents ont été
sujets, par-dessus tous les peuples des autres croyances, à cette forme de
folie. »
« Sur
le sujet de l’Inde », avait dit le Secrétaire d’Etat aux Indes, « Winston n’est pas tout à fait
sain d’esprit… Je
ne vois pas tellement de différence entre sa vision et celle d’Hitler. »
Quand le Mahatma
Gandhi a lancé sa campagne de résistance pacifique contre l’autorité
britannique en Inde, Churchill s’est emporté contre lui :
« Gandhi devrait être enchaîné à la
porte de Delhi, puis piétiné par un énorme éléphant monté par le nouveau
vice-roi. Le Gandhisme et tout ce qu’il représente devra être combattu et
écrasé. »
En 1913, il
ricanait, « Il est alarmant et également répugnant de voir Mr Gandhi,
un avocat séditieux d’une espèce bien connue dans l’Orient, posant aujourd’hui
au fakir et montant à moitié nu les marches du palais du vice-roi pour
parlementer d’égal à égal avec le représentant du roi-empereur. »
Quand le
soutien à Gandhi a augmenté, Churchill a annoncé :
« Je hais les Indiens. C’est un peuple bestial
avec une religion bestiale ».
En 1943, une
famine s’était déclarée au Bengale à la suite des politiques impériales des
Britanniques. En réponse au télégramme du Secrétaire d’État pour l’Inde
demandant des stocks de nourriture pour soulager la population, Churchill avait
répondu sur le ton de la plaisanterie,
« Si la
nourriture est rare, comment se fait-il que Gandhi ne soit pas encore
mort ? »
Le
décompte des morts de cette famine s’élève à trois millions. Quand on lui a demandé, en 1944,
d’expliquer les raisons de son refus d’aide humanitaire, Churchill a ricané :
« L’aide
ne servirait à rien. Les Indiens se reproduisent comme des lapins et excéderaient
les capacités de tous les stocks alimentaires accessibles ».
Après la
Première Guerre mondiale, presque un quart de la planète tombait dans la sphère
d’influence de l’empire britannique. L’Empire avait augmenté sa superficie avec
l’ajout de territoires arrachés à ses ennemis vaincus.
En tant que
Secrétaire aux colonies, le pouvoir de Churchill sur le Moyen-Orient était
immense. Comme il l’avait dit lui-même, il avait « créé la Jordanie d’un trait de plume
un dimanche après-midi », dessinant la carte de ses
frontières après un repas généreux. Le grand zigzag de la frontière est avec
l’Arabie Saoudite a été appelé « le hoquet de Winston » ou
« l’éternuement de Churchill ».
C’est le
personnage qui a inventé l’Irak, une autre étendue désertique arbitraire, qui a
été offerte à un prince hachémite sans trône, Fayçal, dont le frère Abdallah
a reçu le contrôle de la Jordanie. Ces deux fils du roi Hussein,
Fayçal et Abdallah avait été compagnons de guerre d’un ami de Churchill, le
célèbre Lawrence d’Arabie.
Mais les
lignes dessinées dans le sable par l’impérialisme britannique, qui enfermaient
des peuples en conflit derrière des frontières arbitraires étaient loin d’être
stables, et de nombreux Jordaniens, Irakiens, Kurdes et Palestiniens allaient
se voir refuser tout apparence de démocratie.
En 1920, Churchill a recommandé l’usage d’armes chimiques contre les
« Arabes non-coopératifs » impliqués dans la révolte
irakienne contre l’autorité britannique.
« Je
ne comprends pas les réticences à propos de l’usage de gaz », avait-il déclaré. « Je
suis très favorable à l’usage de gaz empoisonnés contre des tribus de sauvages.
Cela créerait une allègre terreur. »
En tant que
Secrétaire aux colonies, c’était
Churchill qui avait offert aux juifs leur ticket pour leur terre promise
d’Israël, bien qu’il ait pensé qu’ils ne « doivent pas
s’imaginer que la population locale va être évacuée pour leur
convenance ». Il avait écarté la question des Palestiniens qui
vivaient dans le pays en les traitant de « hordes barbares qui ne
mangent pas grand-chose d’autre que des crottes de chameau ».
Dans une
explication des justifications britanniques à décider du sort de la Palestine
adressée à la Commission Peel (1937), Churchill a clairement exposé son idéologie suprématiste blanche (cela aussi nous rappelle le Trump qui ordonne à son
armée de tirer à balles réelles sur les immigrés bronzés sud américains)
pour justifier l’un des génocides les plus brutaux et l’une des pires
déportations de masse de l’histoire, fondée sur sa croyance selon laquelle « la race aryenne est destinée à triompher ».
« Je
ne pense pas que le chien dans sa niche ait un droit à la niche, même s’il y
est depuis longtemps. Je n’admets pas ce droit. Je n’admets pas, par exemple,
qu’un grand tort ait été causé aux Indiens d’Amérique ou aux populations noires
de l’Australie. Je n’admets pas qu’un tort ait été causé à ces peuples parce
qu’une race plus forte, une race de plus haut grade, une race plus consciente
des réalités pour ainsi dire, est venue et a pris sa place ».
De fait, nombre des
opinions de Churchill étaient réellement nazies. A part son
soutien au racialisme, en tant que ministre de l’Intérieur, il avait recommandé
d’euthanasier et de stériliser les handicapés.
En 1927,
après une visite à Rome, il a applaudi le dictateur Mussolini.
« Quel
homme ! De tout mon cœur !… Le fascisme a rendu un service au
monde entier… Si j’avais été Italien, je suis sûr que j’aurais été à ses
côtés depuis le tout début de votre combat victorieux contre les appétits
bestiaux et les passions du léninisme. »
(« Les
Appétits Bestiaux et Les Passions du Léninisme », quel titre ! Je
peux en avoir un exemplaire ?)
Mais des
années après, dans son récit écrit de la Deuxième Guerre mondiale (Vol.III), le
capricieux Winston applaudissait la chute de son ex-héros.
« Le
sort d’Hitler était scellé. Le sort de Mussolini était scellé. Quant aux
Japonais, ils allaient être réduits en poudre. »
Les alliés
américains de la Grande-Bretagne allaient concrétiser ses paroles à Hiroshima
et Nagasaki en larguant leurs bombes atomiques et en incinérant des centaines
de milliers de civils japonais.
Pendant ce
temps, le Premier ministre
Churchill avait ordonné un bombardement de masse à Dresde où, le 13 février
1945, plus de 500.000 civils et réfugiés allemands, pour la plupart des femmes
et des enfants, ont été massacrés en une seule journée par la Royal Air Force
(RAF) britannique et les forces aériennes des USA (USAAF), qui ont largué plus
de 700.000 bombes au phosphore sur la ville. [1]
Le Premier
ministre Churchill avait auparavant dit :
« Je ne
veux pas de suggestions sur la façon dont nous pouvons démanteler l’économie et
la machine de guerre, ce que je veux sont des suggestions sur la façon dont
nous pourrions rôtir les réfugiés allemands
échappés de Breslau. »
A Dresde, il
a eu ce qu’il voulait. Ceux qui sont morts au centre de la ville n’ont jamais
été retrouvés, parce que la température de la zone atteignait les 1600 degrés
centigrades. Les citoyens de Dresde ont eu à peine le temps de rejoindre les
abris, et nombre de ceux qui avaient trouvé refuge dans les abris souterrains
ont suffoqué parce que l’oxygène était aspiré par les flammes. D’autres sont
morts dans une explosion de chaleur blanche assez forte pour faire fondre la
chair humaine. [En plus de bombarder l’Allemagne, Churchill avait également
lancé les bombardiers de la RAF contre des villes françaises. Les historiens
pensent que les bombardements alliés ont tué autant de Français que les
bombes allemandes avaient tué de Britanniques au cours du Blitz. Entre 1940 et
1945, les forces aériennes alliées ont largué presque 600.000 tonnes de
bombes en France. Voir le livre Les
Français sous les bombes alliées. 1940-1945 d’Andrew Knapp, Ndt]
Au lieu d’être
poursuivi pour avoir ordonné l’un des plus effroyables crimes de guerre de
l’histoire récente, dans laquelle un demi-million de civils de Dresde sont
morts en hurlant dans ses tempêtes de feu, Churchill a émergé de la guerre en
héros. Lui qui avait toujours été un ardent soutien de la monarchie britannique
a été fait chevalier de l’Ordre de la jarretière, le plus haut degré de la
chevalerie britannique, par la reine Elizabeth II en 1953.
« La
monarchie est extraordinairement utile. Quand la Grande-Bretagne gagne une
guerre, elle crie « Dieu sauve la reine » ; quand elle perd, son
premier ministre est éjecté par les votes », avait-il dit en une occasion.
Peu après la
victoire dans la Deuxième Guerre mondiale, le gouvernement conservateur de
Churchill a précisément été éjecté par les votes d’une population lassée des
guerres, de l’austérité, et qui voulait du nouveau.
« L’histoire
sera bonne envers moi, parce que je compte l’écrire », avait dit Churchill, et il y est
arrivé jusqu’à un certain point. Avec son éternel cigare, son signe V,
« Winnie » est devenu la grande icône nationale britannique restée
dans les mémoires pour avoir mené la Grande-Bretagne dans son heure de gloire
(nous ne parlerons pas de son habitude excentrique de marcher de long en large
dans son bureau, totalement nu, pendant qu’il dictait ses propos à ses
secrétaires masculins). Avec son gros cigare planté dans sa bouche en manière
de symbole de l’effronterie britannique, Churchill était vu comme un grand
frère courageux et débonnaire, et révéré par les médias. Son discours exaltant
de la période de guerre :
« Nous
les combattrons sur les plages ! Nous ne nous rendrons
jamais ! » ne
mentionnait pas « Nous les bombarderons dans leurs villes ! Nous
les ferons souffrir ! »
La brutalité
grossière de Churchill a été ignorée, mais il n’aurait jamais imaginé
l’invention d’Internet ou a fortiori sa capacité à permettre que des auteurs,
historiens, etc., remettent sa vision de l’histoire en question et exposent la
cruauté et le racisme de ce personnage.
Quand George
W. Bush est parti de la Maison-Blanche, il a laissé un buste de Churchill
dans le Bureau ovale. Il s’en inspirait pour sa « guerre contre la
terreur ». Barack Obama l’a fait enlever à son arrivée. Je me
demande s’il trouvait le buste offensant ? Était-ce par respect pour la
peine et la détresse que son grand-père kényan, Hussein Onyango Obama,
avait enduré à cause de Churchill ? [Le grand-père d’Obama, un soldat de l’armée coloniale
britannique, avait été emprisonné au Kenya en 1949 et atrocement torturé
par les Britanniques pour avoir rejoint la révolte des Mau Mau, NdT]
Retirer un
buste est une affaire assez simple, mais renverser une statue est une autre
histoire. Dans Westminster Square, devant le Parlement londonien,
il y a plusieurs statues de politiciens décédés et de dignitaires, dont une que
je trouve particulièrement répugnante. Les mains jointes derrière le dos, ce
personnage en jodphur qui marche résolument en avant est Jan Christian Smuts,
le parrain de l’Apartheid en Afrique du Sud.
« Je
propose que 100.000 Britanniques dégénérés soient stérilisés de force et que
d’autres soit placés dans des camps de travail pour juguler le déclin de la
race britannique. »
Sa statue
lourdaude, avec ses allures de crapaud sur son socle de granite, tient une
canne et porte un regard fixe de bulldog sur le Parlement où il a régné par
deux fois comme Premier ministre conservateur.
Si j’étais
Premier ministre de la Grande-Bretagne, une des premières choses sur ma liste
serait le retrait de mémoriaux dédiés à des impérialistes (et à des racistes de choc). Les statues de
Smuts et Churchill (deux infâmes salopards)
de Parliament Square seraient les premières à tomber.
Par Michael Dickinson
Traduction
et note d’introduction Entelekheia
[1]
C’est pour se venger du Manifeste
anti-juif de Dresde, que Churchill, sous l’injonction de ses
maîtres illuminatis, a décidé d’effacer Dresde de la carte.
VOIR AUSSI :
Les
annotations dans cette couleur sont d’Hannibal GENSÉRIC
Né en 1878 .
RépondreSupprimerNé le 30 novembre 1874, décédé le 24 janvier 1965 . Que le diable ait son âme !
SupprimerAussi bestial que hitler !
RépondreSupprimerUn fils de putes parmi tant d'autre !
RépondreSupprimerBatards
RépondreSupprimerImmonde dechet qui a fini comme tant d'autres dans les chiottes de l'histoire.
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