dimanche 17 février 2019

Israël craint la révélation de ses coups tordus contre BDS

Prenant la parole lors d’une conférence soutenue par le gouvernement israélien, aux États-Unis, un propagandiste pro-israélien parmi les plus actifs, qui appartient au parti Républicain, a présenté des slides destinées à expliquer à son auditoire quelques “trucs et ficelles” pour qu’ils adoptent le discours supposé, selon lui, le plus efficace pour combattre la campagne Boycott, Désinvestissement, Sanctions (BDS), qui ne cesse de prendre de l’ampleur, y compris dans certains milieux juifs.

Photo : Gili Getz.
Et manifestement Frank Luntz a peur que ses misérables subterfuges soient divulgués, car il a demandé à son auditoire de ne pas prendre de photos de sa présentation PowerPoint, ou en tous cas de ne pas les diffuser sur les réseaux sociaux.
Si vous le faites, ces photos finirons sur The Electronic Intifada et elles seront utilisées contre tous ceux qui sont dans cette salle”, leur a-t-il dit. 
Luntz faisait sans aucun doute allusion aux reportages de The Electronic Intifada sur une conférence similaire, en mai 2016, où il était déjà question des moyens de vaincre le mouvement BDS pour les droits des Palestiniens.
Il faut remarquer que même devant un auditoire supposé entièrement acquis à Israël, un propagandiste comme Luntz ne déborde pas de confiance en son propre discours, puisque qu’il a brusquement terminé sa présentation, craignant manifestement que ses diapositives soient publiées malgré sa mise en garde. Et il n’avait pas tort sur ce point…
Depuis 2016, les dirigeants du lobby israélien ont reconnu dans un rapport secret que tous leurs efforts pour arrêter la campagne BDS n’ont, en dépit d’un financement plus qu’abondant, pas réussi à endiguer les «succès significatifs» et la «croissance impressionnante» du mouvement.
Le mouvement a continué d’accumuler des victoires au sein d’une vague de solidarité mondiale avec les Palestiniens, stimulée par la révolte contre les massacres de civils non-armés participant aux rassemblements de la Grande marche du retour à Gaza.
Pourtant, Luntz est loin d’être le seul à vouloir dissimuler les efforts clandestins d’Israël pour faire taire les protestations contre son régime d’occupation, son colonialisme raciste et l’apartheid.
Israël a beaucoup à cacher
Dans un rapport détaillé, le rédacteur en chef fondateur du Times of Israel, David Horovitz, s’est penché sur la dernière arme d’Israël dans sa guerre contre le mouvement de solidarité avec la Palestine. C’est une organisation non gouvernementale, qui  se présente comme indépendante, appelée Kela Shlomo, ou la fronde de Salomon”.
Mais d’après la description de Horovitz, il semble que ce soit rien d’autre d’une façade derrière laquelle le gouvernement israélien dissimule une activité sournoise tente d’échapper aux lois d’autres pays lorsqu’il s’ingère dans leurs affaires politiques et leur société civile.
Le leadership de Kela Shlomo est celui du gouvernement israélien et de “l’élite” militaire, dont les anciens diplomates Dore Gold et Ron Prosor, l’ancien conseiller à la sécurité nationale Yaakov Amidror et l’ancien chef du renseignement militaire Amos Yadlin.
L’organisation travaille en collaboration avec le “ministère des affaires stratégiques”, dirigé par Gilad Erdan, dont la majeure partie de l’action est jalousement gardée secrète. Ce ministère est responsable des efforts secrets d’Israël pour contrer le mouvement BDS. Son directeur général, Sima Vaknin-Gil, a été un officier du renseignement militaire de haut rang. Un autre des fondateurs de Kela Shlomo est Yossi Kuperwasser, un ancien agent des renseignements militaires qui était le prédécesseur de Vaknin-Gil en tant que directeur général des affaires stratégiques.
Kela Shlomo est financé par des donateurs privés dont les noms sont gardés secrets, mais l’accord de coopération qu’ils ont passé avec le ministère prévoit que les efforts de l’organisation sera soutenue aussi par des fonds publics d’un montant équivalent, ce qui suggère que l’argent des contribuables israéliens est également impliqué, même s’il ne va pas directement dans les comptes de Kela Shlomo.
La nécessité pour le gouvernement israélien de créer une organisation de façade a été clairement établie le mois dernier lorsque The Jewish Daily Forward a révélé qu’un certain nombre de grands groupes de pression pro-israéliens et communautaires juifs aux États-Unis ont refusé de généreuses subventions en espèces du ministère israélien des Affaires stratégiques. Ces groupes craignaient en effet que cela ne les mette en infraction avec la loi américaine qui oblige les «agents étrangers» à s’inscrire auprès de la division de contre-espionnage du ministère de la Justice.
Selon le Times of Israel, l’utilisation de Kela Shlomo par le gouvernement israélien pour faire écran entre ces organisations et lui “pourrait signifier que les organisations pro-israéliennes qui refusaient jusqu’ici de prendre l’argent du ministère pourraient le faire désormais”.
Coups tordus
L’une des révélations les plus troublantes dans le rapport d’Horovitz pour The Times of Israel est que Kela Shlomo est peut-être déjà impliqué dans des coups tordus et des campagnes de dénigrement contre des militants palestiniens, qui ressemblent beaucoup aux opérations clandestines dans lesquelles le Ministère des Affaires stratégiques israélien est spécialisé.
Le cofondateur de Kela Shlomo, Kuperwasser, a souligné auprès du Times of Israel que son organisation n’avait aucun lien avec Black Cube et Psy-Group, deux firmes privées israéliennes spécialisées dans les activités secrètes de renseignement et d’influence, impliquées dans des campagnes menées par des moyens inavouables. Kuperwasser, tout en affirmant n’avoir pas de lien avec ces entreprises très spéciales, a laissé entendre qu’elles pourraient travailler directement pour le gouvernement.
L’année dernière, il a été révélé que le magnat hollywoodien Harvey Weinstein avait embauché Black Cube pour faire taire et intimider les victimes de ses agressions multiples sexuelles présumées. 
Plus récemment, il est apparu que Black Cube avait été chargé par un client non identifié proche de l’administration Trump d’essayer de recueillir des informations préjudiciables sur les hauts fonctionnaires de l’administration Obama impliqués dans la négociation de l’accord nucléaire de 2015 avec l’Iran (récemment dénoncé par Trump).
Selon The Times of Israel, Psy-Group a pour sa part été impliqué dans la création d’un site Web (maintenant supprimé) appelé outlawbds.com contenant les noms, adresses e-mail et des photos de personnes supposées soutenir BDS.
En septembre dernier, The Electronic Intifada a reçu un e-mail de outlawbds.com qui a été reproduit sur un certain nombre d’autres médias, proclamant que outlawbds.com avait déjà publié cent profils de militants. «Nous voulons que ces personnes sachent que leurs actions ne passent pas inaperçues et que quelqu’un agira légalement pour les arrêter», affirmait l’auteur de ce courriel.
Mais tout en niant un lien direct avec Black Cube et Psy-Group, Kuperwasser ne nierait pas que Kela Shlomo travaille avec une troisième entreprise mystérieuse, appelée Israel Cyber ​​Shield (Le cyber-bouclier d’Israël) [1].
Selon un rapport publié en mai par le journal Haaretz, Israel Cyber ​​Shield avait espionné l’éminente activiste arabo-américaine Linda Sarsour et sa famille dans le but de la discréditer et de l’empêcher de recevoir des invitations à parler sur les campus américains.
Le dossier sur Sarsour aurait été préparé pour Act.IL, l’organisation israélienne liée au gouvernement qui gère une application pour smartphone du même nom pour manipuler l’opinion publique, salir et intimider les militants de la solidarité palestinienne. Alors que Kuperwasser “a refusé tout commentaire” sur toute relation entre Kela Shlomo et Israel Cyber ​​Shield, le Times of Israel a fait état d’autres sources selon lesquelles “il existe ou existait une relation quelconque entre les deux entités”
Selon The Times of Israel, “Kela Shlomo est en fait issu d’Israel Cyber ​​Shield et la société d’espionnage continue de recueillir des informations pour Kela Shlomo. [1]
Moralité douteuse
David Horovitz, du Times of Israel, dissimule son inquiétude quant à la coopération entre le ministère des Affaires stratégiques et Kela Shlomo sous un discours moralisateur qui est bien résumée dans le titre de l’article : «BDS est une sale affaire. Ceux qui le combattent au nom d’Israël doivent rester propres».
Ce grand souci de moralité et de “propreté” ne s’applique pas, on le remarque, aux massacres de civils non armés à Gaza, que Horovitz cautionne puisque beaucoup de ceux qui les tireurs de précision israélien ont froidement abattus en tirant, à plusieurs centaines de mètres le plus souvent, par-dessus la limite entre le territoire israélien et le ghetto de Gaza étaient selon la propagande israélienne des militants de Hamas (ce qui mérite bien la peine de mort, bien entendu).
Comme l’a affirmé Human Rights Watch, entre autres, “l’encouragement et le soutien du Hamas aux manifes­tations et à la participation des membres du Hamas aux manifestations ne justifient pas l’utilisation de balles réelles contre des manifestants qui ne menacent pas la vie” de qui que ce soit.
La véritable préoccupation de Horovitz, est révélée quand il écrit que “le plaidoyer pro-israélien ne doit pas tomber dans l’égout” par crainte d’un “effet boomerang”. Ce qui le préoccupe ce n’est pas la rectitude morale ou le respect de la vérité en tant que tel, mais le fait que le mensonge grossier et la manipulation de l’opinion se retournent contre leurs auteurs. Le problème c’est selon lui, qu’en fin de compte, ça ne marche pas !
Les répercussions [négatives] lorsqu’une telle activité sera révélée – et elle sera révélée à coup sûr ! – l’emporteront certainement sur tout avantage”, ajoute-t-il.
Pour dire les choses clairement : de plus en plus de personnes à travers le monde comprennent qu’Israël est un État d’apartheid qui prive violemment des millions de Palestiniens de leurs droits les plus fondamentaux uniquement parce qu’ils ne sont pas juifs. Pour contrecarrer cela, Israël doit se vendre comme une démocratie amicale, ouverte et vibrante remplie de défilés de “gay pride”, de femmes high-tech et sexy sur les plages.
L’approche d’Israël n’est pas sans rappeler la «stratégie totale» adoptée par les dirigeants sud-africains dans les dernières années du régime d’apartheid.  Cela impliquait une répression interne sans précédent, accompagnée de promesses de «réforme» visant à présenter un côté plus doux de l’Afrique du Sud et à contrer l’isolement mondial croissant.
Tout comme les efforts d’Israël pour vaincre la lutte pour la liberté palestinienne, les dirigeants racistes de Pretoria ont tenté de convaincre leur population et le monde que le pays faisait face à une «attaque totale» des ennemis visant la destruction de l’Afrique du Sud. Mais alors que les ennemis désignés par le régime d’apartheid sud-africain étaient le communisme soviétique et les “terroristes” du mouvement de libération de Nelson Mandela, ceux d’Israël sont le Hamas, l’Iran et BDS.
Pour avoir une chance de réussir là où l’Afrique du Sud de l’apartheid a échoué, Israël doit représenter les véritables défenseurs des valeurs démocratiques – les Palestiniens et leurs alliés qui revendiquent des droits égaux et complets pour les Palestiniens – en tant que personnes perverses.
Pourtant, parce que ce n’est pas vrai, c’est une tâche impossible sans avoir recours à des coups tordus qui minent le message même de marketing qu’Israël espère vendre; les démocraties réelles et les sociétés ouvertes ne se livrent pas à des campagnes de dénigrement, de sabotage et peut-être à des activités illégales contre les défenseurs des droits de l’homme. Horovitz l’a bien compris.

Source : http://www.pourlapalestine.be/israel-craint-la-revelation-de-ses-coups-tordus-contre-bds/
[1]  USA. L'opération " Cyber bouclier d’Israël " contre les Noirs américains

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