dimanche 30 juin 2019

USA. La belle et la bête


Si le nom de Tulsi Gabbard est, depuis des années, très familier aux fidèles lecteurs de nos Chroniques, il ne l'était pas pour l'électeur moyen états-unien. Dame Tulsi ne dépassait pas 1% des intentions de vote aux primaires Démocrates. Ce, jusqu'au mercredi 26 juin, jour du premier débat télévisé entre candidats.

 
Paniquée par son discours anti-impérial, la journaloperie institutionnelle a immédiatement fait ce qu'elle sait faire de mieux : désinformer, mentir et cacher [1]. Le Washington Post l'a placée dans la catégorie des perdants du débat, le New York Times ne l'a mentionnée qu'une fois dans son long article de 45 paragraphes et CNN l'a carrément ignorée. Les vassaux français ont suivi l'exemple de leurs maîtres à penser, la palme revenant sans doute au véreux Philippe Gélie du Figaro (celui-là même qui s'était fait démonter par les lecteurs après la conclusion du rapport Mueller innocentant Trump) ; il ne la cite que pour mentionner sa... veste rouge !
Comme souvent, si la presstituée va aussi unanimement dans un sens, il y a de bonnes chances que la réalité soit à 180°. C'est le cas. Non seulement Tulsi sort en tête de tous les sondages en ligne (dont il faut certes se méfier) mais elle est devenue la coqueluche des recherches sur Google, et ça, c'est du solide :
Un raz-de-marée de la belle Hawaïenne, jusqu'ici à peu près inconnue du grand public qui s'est soudain demandé qui pouvait bien être cette candidate qui disait des choses aussi sensées et avec une telle assurance. Les gens de l'autre bord politique reconnaissaient unanimement la qualité de sa prestation, y compris, ô divine surprise, fifille McCain avant d'effacer rapidement son tweet fort incorrect.
 
Des sondages de départ bas mais peut-être artificiellement trafiqués, une dynamique de campagne intéressante, des médias un peu perdus qui tour à tour critiquent et font semblant d'ignorer... Cela ne vous rappelle rien ? Ce blog avait prédit la victoire de Trump en 2016 [2] alors que personne ne lui donnait une chance, mais également le Brexit la même année, lui aussi regardé de haut par le petit landerneau politico-médiatique avant d'entrer en mode panique.
Assistera-t-on, avec Tulsi, à la même hystérie stupéfaite du système assommé par la réalité ? Il est encore trop tôt pour le dire mais une chose est sûre : un duel Tulsi-Donald en 2020 ne manquerait pas de sel. Les deux sont peu ou prou qualifiés d'agents de Moscou, les deux sont/ont été accusés de complaisance envers Assad. Pour le Deep State, une "finale" Gabbard-Trump serait le scénario catastrophe par excellence.
A cette occasion, Tulsi pourrait reprendre à son compte les promesses non respectées du Donald d'en finir avec le marais et, ainsi, partir favorite de la présidentielle : elle ferait le plein des voix du côté Démocrate, toujours prisonnier de sa trumpophobie maladive, mais attirerait aussi, à l'autre extrémité de l'échiquier politique, les secteurs conservateurs et isolationnistes trahis par l'actuel occupant de la Maison Blanche. Reste à passer l'écueil des primaires où les habituelles officines ne manqueront pas (ça a déjà commencé d'ailleurs) de lui savonner la planche...
Pendant ce temps, le Donald était au Japon où il assistait au très attendu sommet du G20. Sa rencontre fructueuse avec Poutine, lors de laquelle les deux hommes ont plaisanté sur l'inénarrable "ingérence russe", a dépité les petits plumitifs qui en ont littéralement la larme à l’œil :
A part cela, le président américain n'a pas obtenu grand chose, ni d'Erdogan qui reste droit dans ses babouches ottomanes dans sa volonté d'acquérir les S-400 (on eût préféré, pour une fois, que Washington arrive à ses fins), ni des Chinois.
Est-ce l'effet terres rares [3]? Les négociations commerciales reprennent, le Donald renonce à ajouter des tarifs douaniers sur 300 Mds de $ d'importations et autorise les compagnies high-tech US à vendre à nouveau leurs composants au géant chinois Huawei. De manière amusante, les journaux visiblement financés par Apple (par exemple le Figaro qui passe son temps à publier des articles à la gloire de la firme californienne) se sont bien gardés de rapporter la nouvelle...
Le dragon ne baisse aucunement les ailes et va, par exemple, continuer à importer du pétrole iranien au nez et à la barbe des sanctions de tonton Sam. Une bonne nouvelle n'arrivant jamais seule, Téhéran pourrait également recevoir une divine surprise sous la forme de S-400. La confirmation vient d'officiels militaires russes et contredit des informations parues ça et là au début du mois, affirmant que Moscou avait fermé la porte à un tel accord. Le triangle Chine-Russie-Iran, fondamental pour la multipolarité eurasienne, fait encore la preuve de sa solidité, ce dont commence à se rendre compte un Trump quelque peu dépité.
Comme nous l'annoncions dans un billet récent, Téhéran profite à plein des instances multilatérales et la tournée de Rouhani en Asie centrale (sommets OCS+CICA) n'a pas seulement permis de confirmer le soutien russe et chinois mais aussi d'autres acteurs du continent-monde. L'Iran retrouve un peu le sourire, d'autant que, dans le Golfe, même des ennemis comme les Émirats Arabes Unis commencent à prendre leurs distances d'avec la croisade US (on ne peut, il est vrai, demander aux grassouillets cheikhs de la péninsule arabique d'être à la fois riches et courageux...) Les derniers développements isolent le duo israélo-wahhabite qui se console en faisant des affaires ensemble.
Un mot encore sur le traditionnel sommet des BRICS en marge du G20. Il était intéressant de voir le comportement de l'américanolâtre néo-président brésilien dans cette structure de facto opposée à Washington. Les bruits alarmistes et peut-être inventés sur une possible exclusion du Brésil ne se sont pas traduits dans les faits et les oreilles de Bolsonaro ont dû quelque peu sursauter en entendant Poutine appeler à la dédollarisation ou défendre le Venezuela, point sur lequel le leader brésilien a préféré éviter de polémiquer avec son homologue russe. Bolsonaro, que d'aucuns pensaient il y a quelques mois qu'il mettrait des bâtons dans les roues des BRICS, a même partiellement épousé les discours sur le multilatéralisme en critiquant le protectionnisme unilatéral d'un certain pays...
Publié le 29 Juin 2019 par Observatus geopoliticus

NOTES

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Hannibal GENSÉRIC
 


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