Vers
l'âge de 60 ans environ, à l'époque de l'empereur Néron, un initié de la cour
romaine nommé Gaius Petronius écrivit un roman satirique en latin, "Le
Satyricon", sur la corruption morale dans la Rome impériale. Le paysage
général du roman a été la transition de Rome d’une république agraire à une
superpuissance multiculturelle et mondialisée.
Le
roman ne survit que dans une série de fragments étendus. Mais il y a
suffisamment de chapitres pour que les critiques s'accordent pour dire que le
très vivant Pétrone, surnommé le «juge de l'élégance», était un brillant
cynique. Il s'est souvent moqué des conséquences culturelles de l'afflux
soudain et perturbateur d'argent et d'étrangers venus d'ailleurs de la région
méditerranéenne dans une société romaine autrefois traditionnelle.
Colisée d'El-Jem (Tunisie) |
Le
roman décrit l’odyssée errante de trois jeunes Grecs célibataires paresseux,
sur-éduqués et surtout sous-employés: Encolpius, Ascyltos et Giton. Ils baguenaudaient
sans but autour du sud de l'Italie. Ils font la manche et soutirent de l’argent
aux nouveaux riches. Ils se moquent des coutumes romaines traditionnelles. Les
trois et leurs amis mènent la grande vie au milieu des excès culinaires,
culturels et sexuels de l'époque de Néron.
Certains
thèmes de «Le Satyricon» sont intemporels et résonnent encore aujourd'hui.
Néron |
La
transition abrupte d'une société de fermiers ruraux en centres métropolitains
côtiers avait créé deux Romes. L'un des deux mondes était constitué d'un réseau
sophistiqué et cosmopolite de commerçants, de magouilleurs, d'investisseurs,
d'universitaires et de copains impériaux de l'état profond. Leurs villas en
bord de mer étaient moins romaines que méditerranéennes. Et ils se voyaient
davantage comme des «citoyens du monde» que comme de simples citoyens romains.
Dans
le roman, une richesse sans précédent avait produit la licence. Les citadins de
la plèbe sucent et flattent les riches sans enfants dans l’espoir d’obtenir des
successions au lieu de faire l’effort de gagner leur propre argent.
Les
riches exploitent à leur tour les jeunes sexuellement et émotionnellement en
leur offrant de faux espoirs de décrocher un héritage.
Pétrone
semble se moquer du monde dans lequel il s'est adonné.
Les
normes acceptées par son roman sont la pornographie, la violence gratuite, la
promiscuité sexuelle, le transgenre, le mariage retardé, le refus de faire des enfants,
la peur du vieillissement, la peur de la clochardisation, l’escalade sociale,
le matérialisme ostentatoire, la longue adolescence, l’escroquerie et l’arnaque
au lieu de travailler.
Les
personnages sont obsédés par la mode coûteuse, les mets exotiques et les noms
prétentieux. Ils sont les heureux héritiers d'une infrastructure romaine
dynamique qui avait mondialisé trois continents. Rome avait incorporé les rives
de la Méditerranée dans le droit uniforme, la science, les institutions -
toutes contrôlées par la bureaucratie romaine et le pouvoir écrasant des
légions, dont beaucoup sont peuplées de non-Romains.
Jamais
dans l’histoire de la civilisation une génération n’a été aussi riche et aussi
tranquille, aussi désireuse de satisfaire tous les appétits imaginables - et
pourtant si ennuyée et si malheureuse.
Mais
il y avait aussi une seconde Rome dans l'ombre. De temps en temps, les
anti-héros branchés du roman se heurtent à des styles rustiques, commerçants et
légionnaires à l’ancienne. Ils sont ce que nous pourrions maintenant appeler,
aux USA, les «déplorables» ridiculisés
et les « ridicules ».
Même
Pétrone suggère que ces types plus rudes ont construit et maintenu le vaste
empire romain. Ils sont caricaturés comme des ploucs et pourtant admirés comme
des gens simples et robustes, sans les prétentions ni la décadence des robots
urbains du roman.
Pétrone
est un satiriste trop habile pour brosser un tableau noir et blanc des bons
vieux Romains traditionnels par rapport à leurs successeurs urbains corrompus.
Son point de vue est plus subtil.
La
mondialisation avait enrichi et uni les non-Romains dans une culture mondiale.
C'était un exploit admirable. Mais une telle homogénéisation atténue également
les coutumes, traditions et valeurs mêmes qui ont conduit à un succès aussi
étonnant de la part de Rome.
Le
multiculturalisme, l'urbanisme et le cosmopolitisme de «Satyricon» sont
le reflet d'un méli-mélo romain passionnant de langues, d'habitudes et de modes
de vie diversifiés, issus de l'Europe du Nord et de l'Ouest, de l'Asie et de
l'Afrique.
Mais
le nouvel empire a également dilué un agrarisme romain noble et unique. Il a
érodé le nationalisme et le patriotisme. La richesse, la taille et le manque de
cohésion de l’empire ont finalement réduit l’unité romaine, ainsi que le
mariage traditionnel, la maternité et l’autonomie.
L'éducation
était également perçue comme ambiguë. Dans le roman, une lecture large assure
érudition et sophistication, et aide la science à supplanter la superstition.
Mais parfois, l'éducation est également ambiguë. Les étudiants deviennent des
fainéants et des prétentieux. Les professeurs ne sont pas différents de pédants
bruyants. Les écrivains sont banals et ennuyeux. Les experts d'élite
ressemblent à des vieilees pipelettes
Pétrone
semble sous-entendre que quelle que soit la Rome de son temps, celle-ci n'était
probablement pas viable - mais serait au moins très excitante dans son déclin
spectaculaire.
Pétrone
soutient également que trop de progrès matériels rapides entraînent une
régression morale. Son dernier avertissement pourrait être particulièrement
troublant pour la génération actuelle d’Européens et d’Américains. Même si nous
nous vantons de globaliser le monde et d'enrichir matériellement et
culturellement l'Occident, nous perdons notre âme dans le processus.
Se
marier, élever des familles, rester au même endroit, continuer à travailler de
nos mains et remporter la gratification peuvent sembler ennuyeux et dépassés.
Mais presque 2.000 ans plus tard, c'est tout ce qui maintient la civilisation
en vie.
Source : The Similarities Between Declining Rome and the Modern US
Le première mondialisation a eu lieu sous l’empire romain
Même
langue, mêmes produits consommés, mêmes lois: les habitants de l’empire qui
vivaient sous l’ère de l’empereur Trajan appartenaient à une communauté qui
s’étendait de l’Espagne à l’Irak actuel.
La scène se déroule dans une grande ville cosmopolite.
Des habitants aux origines et aux couleurs différentes s’invectivent dans la
même langue. Ils ne pratiquent pas forcément la même religion, mais consomment
les mêmes produits, obéissent aux même lois, et partagent le sentiment
certainement un peu diffus d’appartenir à la même communauté. Ils sont tous les
citoyens de la même entité politique. Non, il ne s’agit pas de la description
d’une ville moderne mais d’une cité de l’Empire romain.
Sous l’empereur Trajan
qui règne entre 98 et 117, l’Empire romain connait alors son expansion maximum.
De l’Euphrate à l’Angleterre, de la Roumanie au Maroc, les
habitants de ces territoires se retrouvent sous la coupe de l’empereur et
partagent sinon les mêmes valeurs en tout cas un style de vie commun. Les
historiens Alberto Angela et Yves Roman publient chacun de leur
côté deux ouvrages qui permettent d’éclairer sous un jour nouveau cette
première mondialisation à la romaine qui n’est pas sans évoquer notre
globalisation actuelle.
Dans son livre,
«Empire», Alberto Angela emmène ses lecteurs dans ce vaste territoire en
suivant le chemin d’un sesterce, monnaie de laiton qui passe de mains en mains
et qui offre à l’auteur l’occasion de brosser mille et une scènes de la vie
quotidienne de l’empire. «Les Romains furent les architectes de la première
mondialisation de l’Histoire», affirme Alberto Angela. «Un même corps de
loi était en vigueur partout et les marchandises y circulaient facilement»
De son côté, l’historien français Yves Roman enfonce
le clou. Il vient de consacrer son dernier ouvrage «Rome,
de Romulus à Constantin. Histoire d’une première mondialisation » au
même sujet. Si l’auteur reconnait volontiers que les Romains n’ont pas inventé
le capitalisme à proprement parler, il n’en reste pas moins qu’ils sont les
premiers à «décloisonner» la Méditerranée et à y construire tout
autour une civilisation. «Vous pouviez vous asseoir dans une taverne
d’Alexandrie, de Londres ou de Rome et commander le même vin de Moselle, puis
assaisonner votre plat avec la même huile d’Hispanie. Dans la boutique d’à côté
vous pouviez acheter une tunique dont le lin était cultivé en Egypte mais qui
avait été tissée à Rome», s’enthousiasme Alberto Angela.
Pour Yves Roman, les
ingrédients de cette mondialisation sont à rechercher dans les origines même de
la cité: «Rome fut fondée par des bergers, des vagabonds et des hors-la-loi»,
note l’historien. «Elle doit être définie comme une cité toujours ouverte,
ce qui ne fût pas du goût de tout le monde en Italie». Si la plupart des
historiens de l’Antiquité, à l’instar de Paul Veyne, ont souvent parlé de
«civilisation gréco-romaine», Yves Roman nuance ce label et insiste sur les
spécificités de l’identité romaine. Cette dernière ne s’est pas élaborée autour
de la notion d’autochtonie mais a toujours su intégrer et assimiler d’autres
peuples à son territoire. La relation que les Romains entretiennent avec la
culture grecque se révèle paradoxale: «Admettre, quand on est à la tête
d’un immense empire, que la culture du peuple voisin peut être supérieure sur
bien des points à la sienne constitue une démarche originale, qui ne s’est
jamais rencontrée à l’identique dans le cours de l’histoire».
Pour les deux historiens il y a un texte fondamental
qui permet d’éclairer ce processus d’intégration à la romaine. Il s’agit de la
retranscription d’un discours prononcé par l’empereur Claude il y a vingt
siècles «mais qui pourrait avoir été lu ce matin même dans notre parlement»
assure Alberto Angela. Claude souhaite donner l’accès au Sénat à des notables
gaulois afin qu’ils puissent y siéger. «Pourquoi Sparte et Athènes, si
puissantes par les armes, ont-elles péri, si ce n’est pour avoir repoussé les
vaincus comme des étrangers?», s’interroge l’empereur. «Honneur à la
sagesse de Romulus, notre fondateur, qui tant de fois vit ses voisins en un
seul jour d’ennemis devenir citoyens!».
«Si ces paroles sont
pleines de tolérance envers l’autre, elles expriment aussi la volonté bien
réelle de l’intégrer. Rome a su créer ainsi une société multiethnique, mais
avec une culture officielle. Ni le droit romain, ni l’administration romaine ne
sauraient être remis en cause», analyse Alberto Angela. Pour Yves Roman ce
discours marque peut-être un des actes fondateur de ce nouvel espace mondialisé
qu’est devenu le territoire contrôlé par les Romains: «Ces vues prenaient
acte du décloisonnement du monde avec la ferme volonté de créer un empire
unifié». Les sénateurs vont tout de même refuser la demande de Claude. Il
faudra attendre encore quelques génération avant de voir la composition du
Sénat évoluer. Mais quelques générations plus tard c’est même un Septime Sévère
aux origines africaines qui prend les commande de l’Empire. Un véritable
« Barack Obama » du monde antique selon Alberto Angela. La politique
d’intégration à l’Empire fonctionne alors à plein régime.
Par la suite, quand la puissance
militaire de l’Empire déclinera, et que les pressions aux frontières
s’accentueront, Goths,
Alains et autres Burgondes ne chercheront pas à détruire leur voisin mais
plutôt à intégrer l’empire, «comme quelqu’un vivant aujourd’hui dans le
tiers-monde ne souhaite pas forcément voir disparaître New-York ou l’Occident
mais simplement porter des jeans, des baskets et jouir des avantages du système»,
affirme non sans malice Alberto Angela.
Les Romains atteignent un
niveau de civilisation matérielle tel qu’il faudra attendre le XXe siècle pour
retrouver cette prospérité. L’économie mondialisée autour de la Méditerranée
s’appuie sur une force de travail bon marché : les esclaves. «L’esclavage
est chose banale, rappelle Alberto Angela. Il ne choque personne. C’est
l’une des différences majeures entre l’Empire romain et notre époque».
Il
n’en reste pas moins qu’à la lecture des deux ouvrages, on ne peut
s’empêcher de tisser des liens entre ce monde disparu et le nôtre. Le
voyage du sesterce que nous propose Alberto Angela durant le règne de
Trajan , alors que l’Empire romain se trouve à son apogée, permet de
dresser le tableau d’une culture qui traverse des problèmes étonnamment
proches des nôtres : «Augmentation
du nombre des divorces et fléchissement de la natalité, engorgement du
système judiciaire à cause du nombre incroyable de procès, scandales
engendrés par le vol d’argent public et le financement de grands projets
fantômes, déforestation tragique de certaines régions à cause de la
pénurie de bois, ou encore «bétonnage» de zones côtières avec la
construction d’opulentes villas. Il y avait même une guerre en «Irak»,
et l’invasion de la Mésopotamie par Trajan-là où deux mille ans plus
tard interviendront les forces de la Coalition-nous rappelle les
problématiques militaires et géopolitiques du XXIe siècle ».
Il semble que Septime Severe etait le premier et unique empereur juif ou d'origine juive ou au moins simpatisant du monde juif. Comme par hasard l'Empire a commencé à s'ecrouler. Pour l'Empire Usa c'est la meme chose: Obama est comme Septime Severe d'origine afraicaine et tres attaché à la juiverie americaine.
RépondreSupprimerL'empereur Septime Sévère n'était pas juif mais Berbère de Libye. C'était d'ailleurs le vainqueur des terribles guerriers Parthes. Révisez votre histoire avant d'avancer des affirmations complètement fausses.
Supprimer“Septime Sévère (193 à 211) autorise les Juifs présents à Rome et sur le territoire de l’Empire romain à assumer des fonctions civiles et militaires, toutefois limitées dans les hiérarchies, et révisées à la baisse par ses successeurs”.
Supprimerhttp://jasmina31.over-blog.com/article-antiquite-aux-origines-des-premiers-juifs-en-gaule-74415911.html
Monsieur, je n'ai jamais affirmé categoriquement que Septime Severe etait un juif. J'ai ecrit: Il semble... et j'ai conclu: “Au moins simpatisant du monde juif”.
En autorisant les Juifs presents à Rome etc. Septime Severe etait probablement encore pire d'eux.