Le rapport
d'avril 2019 de l'institut de recherche Egmont compare les stratégies mises en
place par les autorités de Tunisie, d'Égypte et du Maroc pour faire face au
retour des jihadistes partis à l'étranger. Si la réponse dans ce dernier pays
est plus globale, celle des deux premiers est trop axée sur la sécurité, selon
le coordinateur de l'étude.
Selon les chiffres officiels, ils seraient plus de 5 000
individus à avoir quitté le Maghreb (et en majorité les trois pays
étudiés) pour rejoindre l’organisation État islamique (EI) en Syrie et en Irak, sans compter un important contingent de 2 000 combattants affiliés à l’EI partis en Libye. La Tunisie est le pays de la zone avec « le plus fort taux de combattants à l’étranger par habitant », mais des milliers d’affiliés sont partis aussi du Maroc et d’Égypte. Aujourd’hui, à la suite de la perte de pouvoir et de territoire de Daesh,
la question de leur retour se pose. Si beaucoup d’entre eux ont perdu
la vie, « depuis 2012, plus de 1 000 sont déjà retournés » dans leurs
pays d’origine
Basé à Bruxelles – tout en collaborant avec des chercheurs sur place – , l’institut de recherche indépendant Egmont s’est penché sur cette épineuse problématique. Dans son dernier rapport intitulé Returnees in the Maghreb : comparing policies on returning foreign terrorist fighters in Egypt, Morocco and Tunisia, plusieurs chercheurs ont observé comment les autorités tunisiennes, égyptiennes et marocaines font face – ou pas – au retour des jihadistes partis à l’étranger. Thomas Renard, chercheur à l’institut Egmont et coordinateur de l’étude, revient sur les principaux enjeux.
Jeune Afrique : Le Maghreb a été particulièrement touché par la problématique du recrutement. Comment expliquez-vous cela ?
Thomas Renard : Au Maghreb, et dans ces trois pays en particulier, plusieurs facteurs se combinent. Aucun n’a un lien direct avec le départ pour l’EI, mais ils ont créé un terreau fertile. Tout d’abord, il faut considérer qu’ils ont une scène islamiste et jihadiste déjà présente. Il faut également prendre en compte le contexte historique, politique et économique. Même si les trois États ont vécu 2011 de manière très différente, dans la période post-printemps arabes, la déception a été commune et est venue se combiner avec une véritable dynamique à l’œuvre en Syrie et en Irak.
Basé à Bruxelles – tout en collaborant avec des chercheurs sur place – , l’institut de recherche indépendant Egmont s’est penché sur cette épineuse problématique. Dans son dernier rapport intitulé Returnees in the Maghreb : comparing policies on returning foreign terrorist fighters in Egypt, Morocco and Tunisia, plusieurs chercheurs ont observé comment les autorités tunisiennes, égyptiennes et marocaines font face – ou pas – au retour des jihadistes partis à l’étranger. Thomas Renard, chercheur à l’institut Egmont et coordinateur de l’étude, revient sur les principaux enjeux.
Jeune Afrique : Le Maghreb a été particulièrement touché par la problématique du recrutement. Comment expliquez-vous cela ?
Thomas Renard : Au Maghreb, et dans ces trois pays en particulier, plusieurs facteurs se combinent. Aucun n’a un lien direct avec le départ pour l’EI, mais ils ont créé un terreau fertile. Tout d’abord, il faut considérer qu’ils ont une scène islamiste et jihadiste déjà présente. Il faut également prendre en compte le contexte historique, politique et économique. Même si les trois États ont vécu 2011 de manière très différente, dans la période post-printemps arabes, la déception a été commune et est venue se combiner avec une véritable dynamique à l’œuvre en Syrie et en Irak.
Observez-vous un lien entre les printemps arabes et cette question ?
Pas directement, mais il y a eu une fenêtre d’opportunité qui s’est
ouverte pour ensuite se refermer. Dans plusieurs récits recueillis pour
notre rapport, des éléments comme « l’insécurité économique », « le
sentiment d’injustice » et « l’absence d’opportunité » reviennent. Les
inégalités économiques et sociales de plus en plus évidentes dans une
société très jeune créent une forme de vulnérabilité au sein de la
population. Je répète qu’il n’existe pas de lien de causalité direct
entre ces facteurs et le fait de partir pour le jihad, mais ils
participent à créer ce terreau fertile.
C’est un mélange de facteurs collectifs et d’éléments de fragilité
individuelle, combinés avec un puissant réseau de recrutement, comme
c’était le cas pour la Syrie et l’Irak. On a constaté que cette «
radicalisation » est un phénomène à la fois très complexe et ancré
localement. Il a lieu dans certaines localités précises : on a pu
l’observer au Maroc, où l’on a accès à des données plus précises, mais
également en Tunisie et en Égypte.
Le Maroc semble effectivement le pays le mieux outillé pour
faire face au retour des jihadistes par rapport à la Tunisie et
l’Égypte, qui adoptent une approche « purement sécuritaire ». Pourquoi ?
Entre les trois pays, le Maroc est effectivement celui le mieux équipé pour faire face à cette problématique.
Sans qu’il faille pour autant louer son modèle, c’est le seul pays qui
va un peu au-delà de l’approche purement sécuritaire, en introduisant
par exemple des programmes de rééducation en prison. En Égypte et en
Tunisie, les services de sécurité ont été complètement dépassés par la
question, et souvent les jihadistes qui retournent au pays ne sont même
pas identifiés.
Des mesures légales et administratives devraient être mises en place
pour savoir qui part, qui revient et quoi en faire. Mais on a constaté
que ni l’Égypte ni la Tunisie n’ont mis leur système législatif en
conformité avec les recommandations internationales. Et même quand on
arrive à identifier, interpeller et judiciariser les dossiers de ces
personnes, il n’y a aucun suivi individuel. Il n’existe aucun programme
de prévention ou de réinsertion dans la société. De plus, ces pays ont
déjà été confrontés au retour de combattants dans les années 1990 et
2000, mais aucune mesure n’a été prise.
Peut-on parler de foreign fighters ?
Le concept de foreign fighter est occido-centré et n’est pas
vraiment valable, car il n’illustre pas la complexité de la situation.
Au Maghreb, il y a une couche additionnelle qui vient s’ajouter : des
zones de non-gouvernance internes ou proches. C’est le cas par exemple en Égypte, où des islamistes sont installés dans le nord du Sinaï. Mais la manière de traiter le problème des jihadistes est relativement semblable.
La communication politique de ces pays porte souvent sur la «
lutte contre le terrorisme ou l’islamisme ». En lisant votre rapport,
on se rend compte que finalement peu de mesures efficaces sont prises
pour faire face au problème…
Ces pays ont une longue histoire de terrorisme, y compris jihadiste,
et ont développé historiquement des services de sécurité assez forts.
Mais en réalité, l’Égypte et la Tunisie n’arrivent plus à gérer un
phénomène qui ne concerne plus quelques individus, mais un groupe
important de personnes. Cela montre toutes les limites de l’approche
exclusivement sécuritaire.
Source : Jeune Afrique
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VOIR AUSSI
Commentaire :
Cet article passe
sous silence le réseau des Frères Musulmans (parti Ennahdha) qui couvre
tout le pays, y compris les mosquées et les écoles (coraniques, [corps-à-nique , pire qu'à l'église catholique]) qui sont sensées être sous
la responsabilité du gouvernement, sauf que le Sinistre des affaires
religieuses est, justement, du Parti Ennahdha.
L'auteur oublie aussi
de souligner que le djihadiste et sa famille en Tunisie, touchent une
indemnité de départ au Jihad, un salaire mensuel, et une indemnité
conséquente en cas de mort en Syrak ou ailleurs.
Pour plus de détails, voir ce qui suit.
Hannibal GENSERIC
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