À ceux
qui ont péremptoirement prétendu que Bachar al-Assad a gagné la
guerre, mais n’a pas gagné la paix ou encore, qu’il n’a pas gagné la
guerre, la Russie ou l’Iran l’ayant forcé à accepter certains compromis,
cet article de Monsieur Ghaleb Kandil tend à nous démontrer que s’il
est vrai que « les États n’ont pas d’amis ; ils n’ont que des
intérêts », le mérite du Président syrien et de son équipe est d’avoir
défendu leur pays en créant un modèle relationnel donnant la priorité
aux intérêts communs et à la compréhension des particularités de chacun.
[NdT].
La
machinerie de l’agression coloniale a inlassablement travaillé à
promouvoir des vagues de scepticisme destinées à semer le doute quant
aux rôles tenus par la Russie et l’Iran en soutien de l’État syrien dans
son combat contre les gangs du terrorisme et du takfirisme, outils de
la guerre par procuration dirigée par les États-Unis, en partenariat
avec les pays de l’OTAN, les pays du « Golfe » et une coalition
politique internationale initialement formée par plus de 80
gouvernements.
En effet, c’est dès la première Conférence de
Genève [Juin 2012] que les planificateurs américains ont cherché à
démanteler la coalition adverse, opposée à la guerre, regroupant la
Chine, la Russie, l’Iran et quelques gouvernements résistant à
l’hégémonie américaine. C’est aussi dès les premières années de
l’agression américano-sioniste qu’ils ont cherché à diaboliser
l’implication de la Russie et de l’Iran dans la défense de la Syrie et
le soutien économique, financier et militaire accordé à sa résilience.
Et c’est depuis longtemps qu’ils tentent d’exploiter toutes sortes
d’hypothèses portant sur leur « compétition pour influence » en Syrie.
Mais
voici ces planificateurs face à la réalité choquante réfutant toutes
leurs savantes hypothèses, vu la complémentarité militaire et politique
entre la Russie et l’Iran, malgré des divergences évidentes portant sur
nombre de problèmes en rapport avec des intérêts et des positionnements
particuliers, notamment, la place de la Syrie dans le conflit
arabo-sioniste.
L’Administration syrienne est parfaitement
consciente de toutes les particularités de ses alliés et des positions
de chacun face aux multiples problèmes. Il n’empêche qu’elle a réussi à
créer un environnement stratégique ayant mené à la réduction des marges
d’opposition et de contradictions entre les alliés, tout en maintenant
sa propre vision fondée sur les intérêts nationaux de la Syrie.
Ainsi,
la République arabe syrienne est l’associée de la fédération de Russie
dans l’« Alliance de la lutte contre le terrorisme », terrorisme dont la
menace fut le catalyseur décisif de l’engagement militaire russe
[Septembre 2015] ayant contribué à rééquilibrer les rapports de forces
sur le terrain, à renforcer la capacité de l’Armée arabe syrienne, à
rétablir l’autorité de l’État syrien dans de nombreuses régions du pays,
à reconstruire ses capacités de défense face à l’agression coloniale, à
acquérir et à renouveler ses capacités de dissuasion face à l’entité
sioniste.
Pour tout observateur sérieux, il est clair que
l’intervention russe reposait fondamentalement sur l’idée que la
bataille de défense de la Syrie serait une étape décisive de la lutte
contre l’hégémonie mondiale unilatérale des États-Unis, idée qui n’a
cessé d’évoluer depuis le premier veto russo-chinois [4 octobre 2011] au
Conseil de sécurité des Nations Unies. Par ailleurs, lors du sommet de
l’OTCS [Organisation du Traité de Sécurité Collective regroupant
l’Arménie, la Biélorussie, le Kazakhstan, le Kirghizstan, la Russie et
le Tadjikistan) tenu à Douchanbe, en septembre 2015, à la veille de la
mobilisation aérienne russe en direction de la Syrie, le président
Vladimir Poutine fut très clair sur l’importance cruciale de combattre
les terroristes sur le sol syrien, vu le danger de leur expansion sur
toute l’Asie, y compris la Russie et les pays voisins, dont la Chine.
Parallèlement,
la République arabe syrienne tient à sa solide alliance stratégique
conclue avec l’Iran depuis une quarantaine d’années en partenariat avec
l’Axe de la résistance, lequel repose sur la contradiction existentielle
avec l’entité sioniste vu son rôle de pierre angulaire du système de
domination coloniale de la région dirigé par les États-Unis.
D’où
la capacité éminemment exemplaire du Président Bachar al-Assad dans la
gestion de la défense de son pays selon ces deux axes ; gestion basée
sur leur complémentarité face aux menaces communes et sur le travail de
consolidation de leurs relations avec la Syrie, via un réseau de
partenariats et d’intérêts économiques dans le cadre d’une compréhension
commune du conflit. Ce qui explique les nombreux accords conclus avec
la Russie et l’Iran dans le sillage de la confrontation commune aux
ennemis de la Syrie, accords ayant dépassé le niveau militaire pour
porter sur les secteurs de l’économie, du pétrole, du commerce et de
l’industrie.
Cette vision est au cœur de l’approche syrienne en
vue de la planification de la reconstruction physique et économique,
selon les deux principes proposés par le Président syrien : redirection
du pays vers l’Est, priorité aux partenariats avec les pays ayant
soutenu la résistance de la Syrie et contribué à sa défense ; autrement
dit, priorité aux associés à la lutte contre le terrorisme et à ceux qui
refusent l’hégémonie du bloc occidental, à commencer par la Russie, la
Chine et, bien sûr, l’Iran, principal partenaire de l’Axe de la
résistance à l’hégémonie américano-sioniste.
Mais, autant la Syrie
respecte les particularités de ses alliés, autant elle tient aux
particularités de ses intérêts nationaux. C’est ainsi que lorsque la
vision syrienne d’un État futur centralisé et laïc s’est trouvée en
contradiction avec des initiatives russes et iraniennes, Moscou et
Téhéran ont dû adopter la vision de Damas, comme en témoigne l’examen
minutieux de tous les textes officiels concernant la Syrie, notamment
les textes des résolutions et déclarations finales des réunions et
conférences internationales successives tout au long de ces dernières
années, lesquels reflètent tous la vision syrienne dudit « processus
politique » fondé sur l’unité et l’intégrité territoriale, l’État
centralisé et la laïcité.
Ce comportement face aux initiatives
d’États alliés est désormais un modèle relationnel donnant la priorité
aux intérêts communs et à la compréhension des particularités. Dans ce
contexte, bien que la Syrie considérait et considère toujours que la
présence turque sur son sol est une occupation inacceptable, elle a
quand même tiré profit du confinement du rôle de la Turquie -fer de
lance de l’agression coloniale- par la Russie et l’Iran à la fois. Elle
en récolte les résultats par une opération conjointe
syro-russo-iranienne visant à libérer les zones encore sous le contrôle
des terroristes. C’est un long processus qui a débuté avec les batailles
de libération d’Alep et de la Ghouta. Il se poursuit aujourd’hui par la
bataille de libération d’Idleb, laquelle exige des opérations d’une
grande précision vu la complexité de la situation et la volonté d’en
limiter les coûts militaire et humain via les initiatives politiques des
alliés visant d’une part, à renforcer les capacités de l’Armée arabe
syrienne, d’autre part, à obliger la Turquie de choisir entre se plier à
la volonté américaine ou s’aligner sur le camp russo-iranien et donc, à
adopter des relations fondées sur les intérêts communs à deux pays
voisins. Ce qui explique la proposition de la Russie de revenir aux
accords signés par la Turquie et la Syrie [à Adana] en 1998.
Les
initiatives de confinement et de démantèlement des groupes armés sur le
terrain sont des tactiques avancées par le président Bachar al-Assad dès
le début de l’agression et bien avant l’implication de la Russie et de
l’Iran. Combinant l’action militaire à l’action politique, il a conçu
les décrets successifs d’amnistie et a dirigé des dialogues et des
réconciliations ayant facilité le déploiement de l’armée arabe syrienne
sur une grande partie du territoire syrien et le démantèlement des
ghettos mis en place par les factions armées dirigées par Al-Qaïda et
les Frères Musulmans. Ce qui a abouti aux « Accords d’Astana » et à
l’« Accord de Sotchi » par lequel la Turquie s’est engagée à séparer les
prétendus rebelles des gangs de terroristes dans le gouvernorat d’Idleb
[devenu la cinquième zone de désescalade - NdT]. Un engagement non
respecté géré avec sagesse par l’Armée arabe syrienne qui concentre
actuellement ses opérations sur cette zone censée être débarrassée des
armes lourdes.
La gestion du conflit ainsi mené par le président
Bachar al-Assad en partenariat avec les alliés russes et iraniens a
apporté des changements radicaux sur le terrain et des transformations
majeures en faveur de l’armée arabe syrienne. Elle a ouvert la voie au
démantèlement de la « coalition des agresseurs », laquelle a perdu de sa
cohésion face à la résilience de la Syrie soutenue par ses alliés. Il
n’en demeure pas moins qu’il est illusoire de croire en la libération de
tout le territoire national d’un seul coup. À chaque étape, les efforts
conjugués des alliés permettent l’exploitation politique et militaire
de nombre de contradictions au sein du camp ennemi et réduisent le prix à
payer par le peuple syrien et son armée en dépit du temps qui passe,
d’autant plus qu’il reste à libérer le pays des deux occupations turque
et américaine.
Par conséquent, la méthodologie adoptée par les
dirigeants syriens a préservé les constantes nationales et la solidité
des alliances malgré les particularités et les contradictions. Pour
exemple, les batailles du sud du pays prouvent le respect de l’allié
russe des positions de principe syriennes, en dépit de son
positionnement vis-à-vis d’Israël et malgré la forte adhésion de la
Syrie à l’Axe de la résistance. Un positionnement fondé sur les intérêts
russes avec, cependant, une conception respectant la particularité de
la situation syrienne face à l’ennemi sioniste, son engagement à libérer
son territoire occupé, ainsi que son soutien à la résistance
palestinienne et libanaise. Des engagements sans cesse rappelés haut et
fort par les dirigeants syriens, pendant que la Russie renoue avec sa
vision traditionnelle d’une paix globale et permanente, puisée dans son
héritage soviétique et basée sur l’idée du retrait sioniste des
territoires arabes occupés depuis 1967, à commencer par le Golan arabe
et syrien.
Ghaleb Kandil
20/05/2019Traduit de l’arabe par Mouna Alno-Nakhal
Source : New Orient News https://www.legrandsoir.info/la-syrie-ses-allies-et-la-gestion-du-conflit-new-orient-news.html
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Les commentaires hors sujet, ou comportant des attaques personnelles ou des insultes seront supprimés. Les auteurs des écrits publiés en sont les seuls responsables. Leur contenu n'engage pas la responsabilité de ce blog ou de Hannibal Genséric.