dimanche 26 avril 2020

Aide-toi et le ciel t'aidera


En ces temps pandémiques, le ciel ne viendra peut-être pas à la rescousse mais il demeure une scène privilégiée sur laquelle continuent de se dérouler les grandes joutes internationales.

Le lancement, mercredi dernier, d'une fusée iranienne mettant en orbite un satellite militaire a envoyé des ondes de choc du côté de Washington, entraînant l'habituelle litanie de commentaires de Pompeo & Co sur "l'escalade" provoquée par Téhéran. Peut-être pas tout à fait à tort pour le coup...

 
Cette opération, menée exclusivement par les Gardiens de la révolution, est un succès technologique certain. Le satellite, poétiquement nommé Nour (lumière en persan), et le lanceur ont été entièrement fabriqués en Iran, constituant un pied de nez monumental à la stratégie de "pression maximum" décidée par la Maison blanche.[1]
« Nour 1 » : plus grand secret iranien ?
C'est surtout la fusée qui inquiète, à juste titre, les généraux américains. Guère besoin d'être spécialiste ès aéronautique pour savoir en effet que von Braun et ses V2 sont à la base du programme spatial des États-Unis ou que les Soyuz qui font actuellement le voyage vers l'ISS sont des missiles intercontinentaux soviétiques améliorés.
Tiré comme un missile à partir d'un TEL, le lanceur Qased permet maintenant d'effectuer des lancements dans un délai relativement court et depuis n'importe quelle base. Un tournant majeur dans le développement du programme balistique iranien qui, on s'en doute, affole les États clients de l'Empire au Moyen-Orient.
Tropas del ejército árabe sirio establecen control sobre la última ... Si Washington fait les gros yeux, Moscou vole au secours de son allié. Aux accusations pompéiennes de non respect des résolutions de l'ONU par Téhéran, la belle Maria a répondu du tac au tac : "Ce n'est pas la première fois qu'une nation [suivez mon regard], qui a violé de manière flagrante les normes du droit international, particulièrement la résolution 2231 du Conseil de Sécurité [sur le nucléaire iranien], tente de détourner les condamnations internationales par des accusations sans fondement contre l'Iran." Clair et sans ambages.
Toujours dans la région, une autre mauvaise nouvelle vient assombrir la mine déjà passablement navrée des stratèges US. Elle nous vient de Bagdad cette fois, où il est de plus en plus question d'un certain S-400...
La chose avait été abordée en janvier, après l'assassinat de Soleimani, quand le MoD russe avait profité du scandale pour suggérer de protéger le ciel irakien grâce au petit bijou anti-aérien d'Almaz-Antei. Depuis, les rumeurs allaient et venaient mais rien de concret n'en était sorti. Ce n'est plus le cas. Le Comité de Défense et de Sécurité du parlement aurait déposé sur le bureau du Premier ministre sortant Abdul Mahdi une demande officielle d'achat du S-400. La décision définitive sera prise quand le nouveau candidat au poste, al Khadimi, sera intronisé.
On imagine aisément les perles de sueur goutter sur le front soucieux des analystes du Pentagone mais aussi à Tel-Aviv, car c'est une possible bulle de déni qui se profile. L'occasion de rappeler ce concept :
Au comité militaire de l’Otan, on a pris conscience de la vulnérabilité des forces aériennes de l’Alliance en cas de conflit avec Moscou. Et pas seulement. Car les Occidentaux pourraient aussi perdre leur supériorité aérienne en temps de paix, la présence de ces dispositifs d’anti-accès étant, par exemple, susceptiblse de gêner considérablement le déploiement de moyens d’urgence en Europe de l’Est, tels que ceux préconisés par les Américains. En réduisant la liberté d’action des Alliés sur leur propre zone de responsabilité, le déni d’accès russe deviendrait alors aussi déni d’action à même de contraindre la décision politique. (...) Jamais, depuis la fin de la Guerre froide, l’Otan n’avait été confrontée à des environnements “non-permissifs”.

«Les Russes ne font plus rire», note un observateur, d’autant que leurs systèmes antiaériens, que certains pensaient inefficients, disposent en réalité d’algorithmes très avancés. Qu’il s’agisse du S-300 ou du S-400, ces systèmes complexes utilisent plusieurs types de radars fonctionnant sur différentes fréquences. Ils sont mobiles et disposent d’une maintenance autonome.
Avec un Irak doté de S-400 et un Iran de S-300, la chasse israélienne peut sûrement dire adieu à toute idée de bombardement sur des sites iraniens, en tout cas par la voie normale. Quant aux États-Unis, c'est toute leur activité dans la zone qui risque d'être bouleversée, notamment leur immunité dans les cieux mésopotamiens.
Nul doute, dans ces conditions, que le nouveau Premier ministre sera harcelé par les envoyés de Washington, avec menaces de sanctions à la clé voire plus. Mais si le pouvoir de nuisance impérial est encore réel à Bagdad, l'assassinat de Soleimani, universellement condamné dans le pays, a rebattu les cartes. Nous commettrons d'ailleurs prochainement un article sur le bras de fer américano-iranien, notamment en Irak. À suivre...
Never twice without thrice. DC la Folle doit, bien malgré elle, méditer cet adage en apprenant, troisième désillusion, que la dinde volante fait encore des siennes. Un article d'Opex360 nous l'explique, délicieusement titré "Le Pentagone a réglé cinq lacunes graves du F35 mais en a trouvé quatre nouvelles" ( ! ) :
L’an passé, le magazine Defense News avait révélé que le F-35, l’avion de 5e génération développé par Lockheed-Martin, présentait pas moins de 13 lacunes classées dans la catégorie CAT-1B, c’est à dire qu’elles étaient susceptibles d’avoir un « impact » sur les missions pour lesquelles il a été conçu.[2]
« Tous ces problèmes, à l’exception de quelques-uns, ont échappé au contrôle intense du Congrès et des médias. D’autres ont été brièvement mentionnés dans des rapports de groupes de surveillance du gouvernement. Mais la majorité d’entre eux n’ont pas été révélés publiquement, ce qui dénote un manque de transparence s’agissant du système d’armes le plus coûteux et le plus prestigieux » du Pentagone fit valoir Defense News à l’époque.
Outre les défauts d’ALIS [Autonomic Logistics Information System], un programme informatique qui, comptant une dizaine de millions de lignes de code, permet de gérer la maintenance et l’approvisionnement en pièces détachées des F-35, il était question de pics de pression dans le cockpit susceptibles de provoquer des barotraumatismes aux pilotes, de températures pouvant influer sur les performances de l’avion, de « cloques » sur le revêtement « furtif » dès que la vitesse dépassait Mach 1,2 [surtout pour les F-35B et F-35C], d’une caméra de vision nocturne affichant des stries vertes, ou encore un moteur qui, par temps chaud, était susceptible de ne pas donner toute la puissance nécessaire pour maintenir un F-35B en suspension [d’où le risque d’atterrissage « brutal »].
Moins d’un an plus tard, le bureau du Pentagone chargé de gérer le programme F-35 a avancé. S’il a été décidé d’arrêter les frais avec le système ALIS, qui sera remplacé par le logiciel « ODIN », cinq de ces 13 lacunes de catégorie CAT-1B ont été réglées. Et cinq autres ont été classées dans une catégorie de déficience inférieure.
En revanche, quatre nouveaux défauts de CAT-1B ont été découverts, ce qui peut encore sembler surprenant au regard de l’avancée du programme. Ce qui veut dire qu’il reste encore sept déficiences à régler au plus vite (...) Quant à la nature de ces quatre déficiences identifiées, il n’est pas possible d’en savoir plus pour le moment : elles sont en effet « classifiées ».
Décidément, une semaine à oublier pour l'Icare impérial...

Source : Chroniques du Grand Jeu

--------------------------------------

NOTES de H. Genséric
[1] "Le satellite iranien cartographie 24h/24 Israël et en fournit les donnés au Hezbollah"
Jeudi 23 avril, le commandant en chef de la Force aérospatiale du CGRI, le général Hajizade soulignait comment le premier satellite militaire iranien, Nour, qui se trouve depuis trois jours en orbite, avait réussi à contourner le renseignement américain et israélien par le fait particulièrement innovent qu'est la mobilité de sa lanceur tri étage à combustible combiné. Le général a rappelé qu'avec Nour-1, puisqu'il y aura Nour-2, 3....c'est un "échange qui se fait : on lui fournit des données et vice versa". C'est cette remarque qui aurait visiblement le plus effrayé Israël dont la presse, incrédule, évoque "l’œil indiscret de l'Iran" qui scrutera désormais tous les agissements d'Israël. 
Maariv ne peut en ce sens se garder de qualifier la mise en orbite de Nour-1 de « grand acquis » et partant l'entrée "de l’Iran dans le club d’élite de superpuissances ayant la capacité de lancer un satellite militaire en utilisant un carburant combiné dans des porte-satellites". Et d'écrire : « Cet acquis pourrait offrir à l’Iran une capacité énorme car il s'agit d’un élan certes technique mais à la portée militaire ».
Tout en essayant d'occulter la crainte d'avoir à faire face à un axe de la Résistance dont les composantes sauraient anticiper, garce aux données satellites fournies par l'Iran, d'anticiper les agissements israéliens il écrit : « Avec ce satellite militaire mis en orbite, les dangers que l'Iran pourrait créer pour Israël ne connaîtront plus aucune limite. L’aspect le plus préoccupant de cet acquis est que l’Iran a enregistré un important progrès dans le domaine balistique et qu’aucun endroit, au Moyen-Orient, ne sera désormais hors de la portée des missiles iraniens et tout ceci alors que l'Iran est cible des plus dures qui soit».
Et le journal d'ajouter: « Il va sans dire qu'Israël est pris de court, aucun élément de son renseignement n'ayant pas été capable d'en détecter les moindres signes. Idem pour le Pentagone, qui a été désagréablement surpris, a mis deux jours avant de reconnaître que Nour-1 est effectivement mis en orbite. Au fait, le CGRI a su dévoyer toute intention avec le concept de lanceur de fusil mobile. A quoi rime ce concept? Outre que l'Iran s'est engagé pleinement sur la voie de la conception des missiles transcontinentaux, allant jusqu'à 5000 kilomètres de portée, le pays pourrait se targuer d'un nouveau élément qu'il vient d'ajouter à son arsenal balistique : la mobilité de ses lancers. Cet acquis sonne le glas de tout plan de guerre anti-Iran basé essentiellement sur des frappes massives des sites de lancement de missiles iraniens car l'Iran a prouvé qu'il en possède aussi des mobiles ».  
Southfront commente cette remarque en ces termes : « On va encore plus loin que Maariv. Cette semaine les Iraniens ont dévoilé trois drones-missiles de croisière d'une portée de 1500 kilomètres, puis un radar antenne réseau à commande de phase 3D d'une portée de 800 kilomètres et un autre, de contrôle 3D d'une portée de 400 kilomètres. Le premier peut intercepter des missiles balistique et le second, des drones voire des avions furtifs. Et bien toute la stratégie de guerre US/Israël repose sur des bombardements massifs des sites stratégiques en Iran. Avec des lanceurs de missiles de longue portée mobiles et des radars ultra puissants, cette stratégie semble avoir déjà du plombe dans l'aile. Surtout que Nour-1 ne cessera désormais de cartographier et de surveiller les sites militaires israéliens tout comme sa centrale nucléaire pour en transmettre les données, entre autres, au Hezbollah, et aux autres alliés iraniens et leur permettre d'anticiper toute frappe anti-Iran. 
Hannibal GENSÉRIC

1 commentaire:

  1. Drôle, Hannibal
    https://fr.timesofisrael.com/le-nouveau-porte-parole-de-trump-pour-la-sante-a-diffame-soros-et-les-rothschild/?fbclid=IwAR20t3WDOtVIaBHrKoDz9GFcqV9Ha1q5q_ZXcRYjMLhVNW2qNmt3PXkXWCA

    RépondreSupprimer

Les commentaires hors sujet, ou comportant des attaques personnelles ou des insultes seront supprimés. Les auteurs des écrits publiés en sont les seuls responsables. Leur contenu n'engage pas la responsabilité de ce blog ou de Hannibal Genséric.