lundi 19 août 2019

La flotte de test F-35 est clouée au sol par les taux d’indisponibilité




Les problèmes d’indisponibilité de la flotte de test soulignent les problèmes de l’ensemble du programme.
Les avions d’attaque interarmées F-35 membres de la flotte de tests opérationnels de la base aérienne militaire californienne d’Edwards pâtissent de faibles taux de disponibilité, qui peuvent menacer la réussite de l’exécution de la phase essentielle de tests de combats du programme. Un graphique, établi par le groupe de tests intégrés du bureau du programme interarmées, et que nous avons pu récupérer, illustre ces données.


Cette révélation, que le programme F-35 se débat pour passer le dernier obstacle avant de pouvoir légalement passer en mode de production en usine, fait suite à de nombreux autres rapports récents, dont certains émis par POGO ainsi que par le Government Accountability Office [équivalent de la Cour des Comptes en France, NdT], qui indiquaient que le F-35, le système d’armement le plus onéreux de toute l’histoire, est loin d’être prêt à affronter les menaces, actuelles ou futures.
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Les 23 appareils référencés dans la flotte de test ont présenté un taux abyssal de 8,7% sur l’indicateur « pleinement apte à la mission » en juin 2019, selon le graphique, qui couvre la période allant de décembre 2018 à mi-juillet 2019. Un avion pleinement apte à la mission peut réaliser toutes les missions qui lui sont assignées : il s’agit d’un indicateur de mesure particulièrement important pour les programmes multi-missions tel que le F-35. Le taux de juin constituait en fait une améliorations sur le mois précédent, où la flotte avait atteint le score de 4,7%. Depuis le début de la phase de tests opérationnels en décembre 2018, la flotte présente une moyenne de 11% pour l’indicateur pleinement apte à la mission.
IOTE-Readiness-Rates_1150Le directeur des tests opérationnels du Pentagone a affirmé que la flotte de test doit présenter un taux de disponibilité de 80% pour répondre au planning exigeant du projet directeur de tests et d’évaluations du programme.
Les états d’incapacité aux missions des aéronefs peuvent se voir causés par des manques de pièces de rechanges, ou des échecs dans des systèmes de mission, comme le radar, ou les instruments de guerre électronique. Selon des sources internes au programme F-35, un composant fréquemment source de pannes est le Système de Brèche Distribué [Distributed Aperture System, NdT]. Ce système délivre au pilote des avertissements en cas de missiles en approche, et génère des images [en réalité augmentée, NdT] dans le casque à 400 000 dollars porté par pilote. Cela n’empêche pas le F-35 de voler, et, du fait du partage de données entre appareils, certaines informations manquantes à un F-35 défaillant peuvent être obtenues depuis un système fonctionnel sur un autre F-35. Mais cela ne remédie que partiellement au problème. Pour tester complètement les capacités du programme, tous les systèmes doivent fonctionner correctement.
Les dirigeants du Pentagone n’ont pas souhaité apporter de commentaires quant à ces informations.
Les taux d’aptitude à la mission de la flotte de tests opérationnels sont surprenants, au vu de la visibilité particulièrement élevée de la mission de cette flotte. Selon les lois fédérales, un programme d’acquisition important en matière de défense ne peut pas légalement passer en mode de production plein tant que le directeur des tests et évaluations opérationnels [director of operational test and evaluation (DOT&E), NdT] ne remet pas son rapport finalisé au secrétaire de la défense et au Congrès, établissant les conclusions du processus de test. Pour cette raison, la flotte de tests opérationnels reçoit un soutien tout particulier sous forme d’équipes de maintenance renforcées, et figure sans doute en haut de la liste de priorités dans la distribution des pièces de rechange.
Le graphique de disponibilité de la flotte de tests opérationnels indique que les appareils utilisés pour les tests opérationnels ont des résultats plus mauvais que le reste de la flotte F-35, qui n’a atteint dans son ensemble qu’un petit 27% pour l’indicateur pleinement apte à la mission, selon les dernières informations disponibles.
Les derniers tests le confirment : Le F-35 reste loin d’être apte au combat
Le bureau de tests opérationnels du Pentagone signale qu’en 2018, le programme F-35 reste vulnérables à des attaques cybernétiques découvertes au fil des années précédentes. LIRE LA SUITE
Ces informations font suite à un rapport récent de l’Air Force Times, établissant que le taux de disponibilité agrégé de tous les programmes aéronefs de l’Air Force ont constamment baissé au cours des huit dernières années. En 2012, l’ensemble des 5 400 appareils ont présenté un taux de « capacité à la mission » de 77,9%. Rendu en 2018, ce taux avait glissé à 69,97%. Un appareil en capacité à la mission peut réaliser au moins l’une des tâches qui lui sont assignées.
En septembre 2018, James Mattis alors Secrétaire à la Défense, faisant acte de la crise de capacité des aéronefs en couvaison, avait émis une directive ordonnant aux services d’atteindre un ratio de capacité à la mission de 80% pour fin septembre 2019. Les données de l’Air Force indiquent qu’il est peu probable que cet objectif puisse être atteint.
La directive de l’ancien Secrétaire constituait un pas dans la bonne direction, mais l’objectif qu’il fixait à ses services était assez peu ambitieux. Il précisait un objectif pour les taux de capacité à la mission, par pour les taux de pleine capacité à la mission ; alors que ce second indicateur constitue une mesure bien plus pertinente de la capacité d’une flotte au combat.
L’Air Force a apporté plusieurs explications pour ces mauvais indicateurs. Un porte-parole a déclaré à l’Air Force Times que la principale raison des baisses de taux résidait dans l’âge de la flotte, actuellement établi à 28 ans en moyenne. Un examen des données présentées par l’article de l’Air Force Times sème le doute quant à cette affirmation. Les nouveaux appareils, tels le F-22 et le F-35, présentent des moyennes plus faibles pour l’indicateur d’aptitude à la mission que les anciens appareils qu’ils sont supposés remplacer. Par exemple, la flotte de F-22 présente un taux d’aptitude à la mission de 51,74% en 2018, alors que l’ancien F-15E présente un taux de 71,16% sur la même période. La flotte de F-35A agrège un taux de capacité à la mission de 49,55%, là où le F-16D agrège 66,24%, et l’avion A-10C agrège quant à lui un taux de capacité à la mission de 72,51%.
Le graphique de disponibilité de la flotte de tests opérationnels indique que les appareils utilisés pour les tests opérationnels ont des résultats plus mauvais que le reste de la flotte F-35.
Le colonel Bill Maxwell, dirigeant de la division maintenance de l’Air Force, a également essayé de dissiper les inquiétudes, en affirmant à l’Air Force Times que le taux de pleine aptitude à la mission ne constituait « qu’un instantané dans le temps ».
Cependant, le graphique d’aptitude de la flotte F-35 de tests opérationnels récupéré par POGO indique clairement être établi sur des relevés de données mesurés sur un intervalle de six mois. Le graphique indique des fluctuations relatives de taux au long de la période en question, mais les taux d’aptitude mesurés au fil de l’ensemble du processus critique de tests au combat sont restés mauvais de manière constante.
On s’attend à ce que le Pentagone détermine en octobre 2019 si le programme F-35 est considéré comme prêt à passer en mode de production à taux pleins. À la vue de l’embourbement de la flotte de tests, il est difficile d’imaginer comment le programme de tests en cours pourrait être achevé dans les temps.
Il pourrait s’agir d’un moment révélateur pour Robert Behler, le directeur des tests opérationnels. Il pourrait, pour satisfaire au calendrier arbitraire du Pentagone, déclarer la fin des tests et donner son feu vert à un passage en production à taux pleins sans aller au bout de plan de tests convenu. Mais une telle décision mettrait en doute l’intégrité du processus de tests et l’utilité-même de ses propres services. Et les soldats qui devront avoir confiance en cet appareil pour rester en vie auraient des raisons de douter de sa valeur au combat ; quant au peuple des États-Unis, il aurait toutes les raisons de douter qu’un programme qu’il aura financé au cours des 17 dernières années puisse délivrer les performances qui avaient été annoncées.
Par Dan Grazier
Le 6 août 2019 − Source pogo.org
Note du Saker Francophone
Un épisode de plus dans la saga du F-35, le fer à repasser volant, qui constitue une excellente fenêtre ouverte sur la dégénérescence accélérée de l'Empire.
Traduit par Vincent pour le Saker Francophone
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Hannibal GENSÉRIC
 

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