Le S-300 peut détruire et exposer les faiblesses du
F-35
Le tragique
épisode qui a causé la mort de 15 membres des forces aériennes russes a eu
des répercussions
immédiates sur la situation en Syrie et au Moyen-Orient. Le 24 septembre,
le ministre russe de la Défense, Sergueï Choigou, a informé ses alliés et
adversaires que la livraison des systèmes de défense anti-aérienne S-300 à la
République arabe syrienne avait été approuvée par le président Vladimir
Poutine. La livraison avait été retardée, puis suspendue à la suite des
pressions exercées par
Israël en 2013.
En un sens,
la livraison de batteries de S-300 à la Syrie est plus préoccupante pour
Washington que pour Tel-Aviv. Israël possède plusieurs
F-35 et a prétendu les
avoir utilisés en Syrie pour frapper des transferts d’armes iraniens
présumés vers le Hezbollah. Avec les systèmes S-300 déployés dans une version
mise à jour et intégrés au système russe de commandement, de contrôle et de
communications (C3), il existe un risque sérieux (pour Washington) qu’Israël,
désormais incapable de changer le cours des événements en Syrie, puisse tenter
une manœuvre désespérée.
Ce n’est un
secret pour personne que la Grèce a acheté
des S-300 à la Russie il y a des années et que l’OTAN et Israël se sont
entraînés plusieurs fois contre le système de défense anti-aérienne russe. Les
hauts responsables des FDI [Armée
Israélienne, NdT] ont souvent insisté sur le fait qu’ils étaient capables de détruire les
S-300, ayant apparemment découvert leurs faiblesses.
L’avertissement
de Tel-Aviv selon lequel il attaquera et détruira les batteries de S-300 ne
doit pas être considéré comme une menace en l’air. Il suffit de regarder le
récent crash de l’avion de surveillance russe Il-20 pour comprendre à quel
point un Israël désespéré est prêt à être imprudent. En outre, plus d’un
commandant des FDI a
répété au fil des ans qu’un S-300 syrien serait considéré comme un objectif
légitime s’il menaçait un avion israélien.
À ce
stade, il est nécessaire d’ajouter quelques informations supplémentaires et de
clarifier certains points. Les S-300 de la Grèce sont vieux, ne sont plus
entretenus, et n’ont pas eu de mises à jour de leur électronique. Des systèmes
aussi modernes et complexes que les S-300 et S-400 nécessitent un entretien
régulier, des mises à niveau et souvent le remplacement de pièces pour
améliorer le matériel. Tout cela manque dans les batteries grecques.
Deuxièmement, c’est l’opérateur utilisant le système (radar, ciblage, visée,
visée, verrouillage, etc.) qui fait souvent la différence en termes
d’efficacité globale. De plus, le système est entièrement intégré au système C3
russe, ce qui rend inutile toute expérience antérieure acquise sur les S-300
grecs. Aucun pays occidental ne connaît les capacités réelles de la défense
anti-aérienne syrienne lorsqu’elle est renforcée et intégrée aux systèmes
russes. C’est un secret que Damas et Moscou continueront à garder bien au
chaud. Pourtant, il y a deux ans, au cours des opérations de libération d’Alep,
un officier supérieur de l’armée russe a
averti (probablement en faisant allusion à des avions furtifs de cinquième
génération comme les F-35 et F-22) que la portée et l’efficacité des systèmes
russes pourraient surprendre.
Voici les
propos du ministre russe de la Défense Sergei Shoigu concernant le déploiement
du S-300 en Syrie et son intégration avec d’autres systèmes russes :
« La Russie
brouillera la navigation par satellite, les radars embarqués et les systèmes de
communication des avions de combat, qui attaquent des cibles sur le territoire
syrien, depuis la mer Méditerranée bordant la Syrie. Nous sommes convaincus que
la mise en œuvre de ces mesures refroidira les têtes brûlées et empêchera les
actions irréfléchies qui menacent nos militaires. Sinon, nous réagirons en
fonction de la situation actuelle. Les troupes syriennes et les unités
militaires de défense aérienne seront équipées de systèmes de contrôle
automatique, qui ont été fournis aux forces armées russes. Cela permettra
d’assurer la gestion centralisée des forces et des installations de défense
aérienne syriennes, le suivi de la situation dans l’espace aérien et la
désignation rapide des cibles. Surtout, il sera utilisé pour identifier les
avions russes par les forces de défense anti-aérienne syriennes.
Si les
Israéliens poursuivent leurs tentatives téméraires d’éliminer le S-300 (s’ils
peuvent d’abord les trouver, étant donné qu’ils sont mobiles), ils risquent de
perdre leurs F-35. Le complexe militaro-industriel américain subirait des
dommages irréparables. Cela expliquerait aussi pourquoi Israël (et probablement
les États-Unis) fait pression sur Moscou depuis plus de cinq ans pour qu’il ne
livre pas le S-300 à la Syrie et à l’Iran. La réaction du Département d’État
américain à l’achat futur par la Turquie et l’Inde du S-400 confirme l’anxiété
des hauts fonctionnaires et des généraux américains à l’idée que les alliés
optent pour les systèmes russes. Cela permettrait une comparaison avec les
armes que ces alliés ont achetées aux États-Unis, ce qui conduirait à la
découverte de vulnérabilités et à la prise de conscience de l’infériorité
relative des armes américaines.
Compte tenu
de la tendance de Tel-Aviv à placer ses propres intérêts au-dessus de tous les
autres, il ne serait pas surprenant de les voir utiliser la possibilité
d’attaquer les S-300 avec leurs F-35 comme une arme pour faire chanter
Washington afin qu’il s’implique davantage dans le conflit. Pour les
États-Unis, il y a deux scénarios à éviter. Le premier est une implication
directe dans le conflit avec la Russie en Syrie, ce qui est maintenant
impensable et impraticable. Le second, beaucoup plus inquiétant pour les
planificateurs militaires, concerne la possibilité que les capacités et les
secrets du F-35 soient compromis ou qu’il soit même démontré qu’il ne fait pas
le poids face à des systèmes de défense anti-aériens vieux de près d’un
demi-siècle.
Un exemple
éclairant de la façon dont les États-Unis exploitent leurs avions les plus
perfectionnés dans la région a été donné dans l’est de la Syrie, autour de Deir ez-Zor. Dans cette
partie de la Syrie, il n’y a aucune menace de systèmes de défense aérienne
avancés, de sorte que les États-Unis sont souvent libres d’utiliser leur F-22
dans certaines circonstances. L’armée russe a montré à maintes reprises des
preuves radar qui montrent sans équivoque que lorsque des Su-35 russes apparaissent
dans le même ciel que le F-22, l’US Air Force évite simplement toute
confrontation et retire
rapidement ses actifs de cinquième génération comme le F-22. Le F-35 n’est même
pas prêt dans sa version navale et n’a pas encore été déployé sur un
porte-avions américain près du théâtre du Moyen-Orient ou du golfe Persique ;
il n’est présent dans aucune
base militaire américaine dans la région. Les États-Unis n’envisagent même
pas d’utiliser le F-35 en Syrie, et ne risqueraient pas non plus de l’utiliser
contre les défenses anti-aériennes russes. Israël est le seul pays qui, jusqu’à
présent, a peut-être déjà
utilisé ces avions en Syrie, mais c’était avant l’arrivée du S-300 sur les
lieux.
Le programme
F-35 a déjà coûté des centaines
de milliards de dollars et atteindra bientôt le chiffre exorbitant et
surréaliste de plus de 1.000 milliards de dollars. Il a déjà été vendu à des
dizaines de pays liés par des accords datant de plusieurs décennies. Le F-35 a
été conçu comme un avion de combat polyvalent et devrait constituer l’épine
dorsale de l’OTAN et de ses alliés. Son développement a commencé il y a
plus de 10 ans [depuis
1996, NdT] et, malgré les innombrables problèmes qui existent encore, il
est déjà opérationnel et prêt au combat, comme insistent à le dire les Israéliens.
Du point de vue américain, son emploi dans les opérations est minimisé et
autrement dissimulé. Moins il y a de données à la disposition des adversaires,
mieux c’est. Mais la vraie raison est peut-être la crainte d’une révélation des
faiblesses potentielles de l’avion, qui pourrait nuire aux ventes futures. À
l’heure actuelle, la commercialisation du F-35 par le Pentagone est basée sur
les évaluations fournies par Lockheed Martin, le fabricant, et sur les essais
effectués par les militaires qui l’ont commandé à Lockheed Martin. Évidemment,
Lockheed Martin et l’US Air Force n’ont aucun intérêt à révéler des faiblesses
ou des lacunes, surtout publiquement. La corruption est une chose importante à
Washington, contrairement
aux idées reçues.
La
combinaison de l’ego d’Israël, de son incapacité à changer le cours des
événements en Syrie et de la perte de sa capacité à voler dans tout le
Moyen-Orient en toute impunité, la Syrie étant désormais équipée d’une défense
aérienne de niveau supérieur – tous ces facteurs pourraient pousser Israël
à agir de manière désespérée en utilisant le F-35 pour détruire les batteries de
S-300. Washington se trouve dans la position peu enviable de n’avoir
probablement aucune influence sur Israël sur la question depuis qu’il a perdu
toute capacité à diriger les événements en Syrie.
Avec les
systèmes russes de défense anti-aérienne qui pourraient être déployés aux
quatre coins du monde, notamment en Chine, en Inde, en Arabie saoudite, au
Qatar, en Arabie saoudite, en Inde et qui sait combien d’autres pays sont en
attente, la Russie continue d’accroître sa capacité d’exportation et son
prestige militaire en démontrant sa maîtrise d’une large part du ciel de la
Syrie. Avec l’introduction imminente du S-500, on peut imaginer les nuits
blanches de ceux qui, au Pentagone et au siège de Lockheed Martin, craignent
qu’un F-35 ne soit abattu par un système S-300 fabriqué en 1969.
Par Federico
Pieraccini – Le 30 septembre 2016 – Source Strategic
Culture
Note du Saker
Francophone
Cet article est issu d'une analyse
de dedefensa.org sur les enjeux médiatiques autour du F-35. Il en va de la
crédibilité du complexe militaro-industriel américain.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Les commentaires hors sujet, ou comportant des attaques personnelles ou des insultes seront supprimés. Les auteurs des écrits publiés en sont les seuls responsables. Leur contenu n'engage pas la responsabilité de ce blog ou de Hannibal Genséric.