Ruslan Mamedov, chercheur à l’Institut d’État des relations
internationales de l’Université MGIMO de Moscou, publie un article dans Al-Monitor dans
lequel il explique que l’intérêt de la Russie pour le Moyen-Orient et
l’expansion de sa présence dans la région vont au-delà de son
implication dans la guerre civile en Syrie.
Pendant plusieurs années, la Russie a su établir des partenariats
avec diverses puissances régionales, et l’Irak, où se sont déroulées le
12 mai les élections législatives, est devenu sa priorité.
En 2014, alors que Daech se trouvait aux portes de Bagdad et que les
États-Unis ne pouvaient approvisionner l’armée irakienne en armes,
Moscou a saisi l’opportunité de fournir « sans délai » à l’Irak les
équipements militaires nécessaires.
L’ambassadeur de Russie en Irak, Maxime Maximov, a déclaré en février
à Interfax que la Russie était prête à discuter de la possibilité
d’équiper l’Irak de systèmes antiaériens S-400.
Par le passé, l’industrie militaire russe a déjà fourni au
gouvernement irakien une énorme quantité d’équipements — dont des
hélicoptères MI-35M et MI-28N, des chasseurs bombardiers Su-25 et des
missiles antichars Kornet-E — qui ont prouvé leur efficacité dans les
combats contre Daech.
La sphère d’influence de la Russie s’est aussi agrandie en Irak grâce
à ses compagnies énergétiques. Elles étaient déjà présentes en Irak
bien avant l’invasion des États-Unis en 2003 et participaient à des
projets pétroliers et gaziers. Actuellement, les deux sociétés russes
Gazprom Neft et Lukoil sont implantées dans le pays.
Les affaires sont encore incertaines pour la société pétrolière russe
Rosneft. La compagnie avait des contrats dans les champs pétrolifères
de Kirkouk avec le gouvernement régional du Kurdistan irakien. Mais
quand Bagdad a repris le contrôle de Kirkouk en 2017, ces contrats ont
été suspendus. Des négociations seraient en cours au sujet de
l’implication de Rosneft dans de nouveaux projets, mais la société n’a
encore rien confirmé.
Pour Moscou, l’Irak n’est pas seulement un partenaire économique et
commercial, mais il pourrait servir de levier d’influence dans les
politiques régionales, tout en sachant que ses possibilités dans le pays
sont limitées, car l’Iran et les États-Unis sont les principaux acteurs
étrangers directement impliqués en Irak.
La Chine, partenaire économique clé de l’Irak, se fait discrète en
Irak. Ce qui est important pour la Russie, c’est que l’Iran soutienne
partiellement et prudemment la coopération entre Bagdad et Moscou et que
les États-Unis ne s’y opposent pas ouvertement.
La Russie et l’Irak collaborent dans certains secteurs, en
particulier l’armement et l’énergie. Par ailleurs, la Russie est devenue
un « allié naturel », autrement dit essentiel, de l’Irak dans la lutte
contre le terrorisme, depuis que la Russie, la Syrie, l’Iran et l’Irak
ont mis sur pied un centre de renseignement à Bagdad en 2015, dans le
but de lutter plus efficacement avec les groupes extrémistes.
Par conséquent, alors que la stratégie de Moscou consiste à
développer toutes sortes de relations avec Bagdad, le gouvernement russe
cherche une entente avec tous les dirigeants irakiens, du président au
chef des Unités de mobilisation populaire (Hachd al-Chaabi), pour
préserver l’intégrité territoriale du pays. Cette flexibilité semble
être le meilleur moyen pour Moscou de maintenir et d’accroître la
coopération bilatérale, quel que soit le résultat des prochaines
élections.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Les commentaires hors sujet, ou comportant des attaques personnelles ou des insultes seront supprimés. Les auteurs des écrits publiés en sont les seuls responsables. Leur contenu n'engage pas la responsabilité de ce blog ou de Hannibal Genséric.