L’espace eurasiatique renforce son intégration.
Géopolitique, économie, défense, liens culturels: rien ne semble pouvoir
entraver ce processus, qui se nourrit du renforcement de la multipolarité. Pour
la Russie, pour la région et pour le monde, quelles perspectives?
Alors que les relations internationales sont à un
tournant, l'Eurasie va être de plus en plus amenée à occuper une position
stratégique, pas seulement pour la région qui la concerne, mais plus
généralement pour la planète tout entière. Union eurasiatique, Organisation de
coopération de Shanghai (OCS), Organisation du Traité de sécurité collective (OTSC),
Nouvelle route de la soie, les projets dans l'espace eurasien ne manquent pas.
Une chose est certaine, les peuples eurasiens se rassemblent. Et ce, aux dépens
des ambitions occidentales.
Faut-il rappeler que les intellectuels russes du début
du XXe siècle, et notamment à partir des années 1920, ont activement promu
l'idée que la Russie était culturellement et idéologiquement plus proche des
peuples turcophones et iranophones d'Asie centrale que de l'Occident?
Avaient-ils tort ou raison, le débat se poursuit jusqu'à aujourd'hui. Le fait
est que la Russie actuelle, après avoir surmontée les années de marasme des
années 1990, arrive bien plus facilement à trouver des intérêts communs au plus
haut niveau avec la Chine, l'Iran et la Turquie qu'avec les pays d'Europe dite
bruxelloise. C'est un fait.
Cela sans même parler des liens étroits
historico-culturels entre la Russie et les pays d'Asie centrale d'ex-URSS, qui
font partie aussi bien de la Communauté des États indépendants (CEI) que de
l'Organisation de coopération de Shanghai (OCS) et pour certains également de
l'Union économique eurasiatique. Toutes ces choses ne s'effacent pas.
Les libéraux russes des années 1990 avaient beau faire
miroiter l'intégration européenne et pro-occidentale à la Russie, au final,
on revient aux sources. Et qu'on se le dise très clairement: l'avenir de la Russie se trouve
bel et bien en Eurasie. La vraie. Évidemment, on peut toujours
penser aux idées gaullistes d'une «Grande Europe» allant de l’Atlantique à l’Oural,
le fait est que cela représente une utopie pure et simple sur le moyen et même
le long terme. L'Europe
dans sa version bruxelloise reste tellement assujettie aux intérêts de
Washington que les «belles» déclarations des Merkel, Macron & Co. n'y
changeront rien.
L'Eurasie, elle, continuera naturellement son chemin,
comme l'avaient voulu et souhaité les intellectuels Troubetskoï, Savitsky,
Alexeïev et d'autres qui les soutenaient. Elle collaborera avec les autres
grands ensembles du monde multipolaire que sont l'Afrique, l'Amérique latine et le monde arabe,
entre autres. L'Occident n'impressionne plus grand monde. D'ailleurs ce fut
vraiment amusant que d'observer les délégations occidentales venues récemment
en masse au Forum économique international de Saint-Pétersbourg pour parler de
collaboration économico-commerciale avec la Russie, tout en maintenant des
sanctions contre cette même Russie.
Évidemment, la vaste diversification de ses relations
extérieures entreprise par la Russie fait peur. Les Occidentaux craignent
réellement de perdre leurs parts de marché, tout en devant désormais faire face
à l'offensive russe dans les régions que les élites occidentales considéraient
jusqu'à maintenant comme étant leur «pré carré». Eh bien oui, la vieille
approche, c'est fini. Le grand marché russe est ouvert à tous : aux
exportateurs asiatiques, africains, latino-américains —et pas moins qu'aux
Européens.
D'autre part si les Occidentaux pensaient qu'en venant
soutenir un coup d'État armé et anticonstitutionnel à Kiev —la mère des
villes russes- la Russie resterait les bras croisés, en continuant à croire aux
illusions de relations honnêtes avec cette même Europe, c'était vraiment sous-estimer
Moscou.
Tout cela, c'est désormais fini. La Russie ira partout où elle
sera la bienvenue —et ces endroits ne manquent pas aux quatre coins
du monde, dans le cadre des intérêts mutuels qu'elle entretient avec ses
partenaires. Quant à l'Eurasie, elle représente indéniablement l'une des
principales priorités de Moscou. Et dans cette prolongation du concept
eurasien, il n'y a pas de place pour les retardataires européens.
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